Les chiffres ne laissent aucune place au doute. Les femmes sont moins touchées par le Sars-CoV2 que les hommes. Une moindre prévalence des comorbidités féminines pourraient avoir un rôle. Mais pas seulement. Comment expliquer ce risque réduit chez la femme ? Les différences immunologiques qui existent entre les hommes et les femmes, et notamment la question de la réponse immunitaire innée, pourraient contribuer à la réponse observée. Les femmes moins sujettes aux formes sévères A l’échelon mondial, les hommes sont surreprésentés parmi les patients hospitalisés pour formes sévères de Covid-19 : on compte trois fois plus d’hommes que de femmes. C’est ce que révèle une récente étude1 publiée dans la revue Nature communications qui souligne que les hommes ont trois fois plus de risques d'être admis en soins intensifs, et plus de risques de mourir du coronavirus. Les données ont été collectées à partir de 90 rapports issus de 46 pays et 44 États américains, totalisant plus de 3 millions de patients. Les chercheurs évoquent la piste biologique : l’œstradiol offrirait une protection plus importante contre l'infection. De fait, l’inégalité des genres en réponse au Sars-CoV2 se confirme au plan national. Publiée le 9 février, une vaste étude menée par l’Assurance Maladie, l’Agence national de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et Epi-Phare portant sur un peu plus de 87 800 personnes hospitalisées à cause du Covid-19, dont 15 660 en sont décédées à l'hôpital, confirme cette inégalité. Les résultats montrent en effet que les hommes sont plus à risque d'hospitalisation et de décès pour Covid-19, un risque multiplié respectivement par 1,4 et 2,1 par rapport aux femmes. Une piste pour comprendre l’incidence de formes graves chez les hommes Une équipe franco-américaine, dirigée conjointement par Jean-Laurent Casanova et Laurent Abel, a identifié les premières causes génétiques et immunologiques expliquant 15% des forme graves de Covid-19. Les malades ont un point commun : un défaut d’activité des interférons de type I (IFN 1). Publiés2 dans la revue Science, les résultats ont mis en évidence chez certains patients des anomalies génétiques qui diminuent la production des IFN 1 (3-4% des formes graves). Chez d’autres patients, des maladies auto-immunes bloquent l’action des IFN 1 (10-11% des formes graves). Sur les 101 patients présentant des anticorps dirigés contre les IFN 1, 95 étaient des hommes. Le rôle des facteurs hormonaux dans la meilleure immunité des femmes « D’une manière générale, les œstrogènes sont associés à une meilleure réponse immunitaire innée qui facilite la production d’IFN 1 qui a des propriétés antivirales. Cela explique aussi pourquoi les femmes sont plus sujettes aux maladies auto-immunes » explique le Pr Pierre Delobel*, infectiologue au CHU de Toulouse. Publiées dans le journal Trends in Endocrinology and Metabolism3, les recherches du Pr Graziano Pinna se sont intéressées...
au cas particulier des femmes enceintes et aux différences observées entre les hommes et les femmes face aux formes graves de la maladie. Il a découvert que les œstrogènes et la progestérone, mais aussi l'alloprégnanolone, influençaient les cellules immunitaires, stimulaient la production d’anticorps, favorisaient la réparation de certaines cellules respiratoires, et inhibaient le récepteur ACE2, voie d'entrée du Covid-19 dans les cellules. Ces hormones permettraient donc de protéger les femmes contre certains symptômes. La piste génétique des récepteurs TLR7 Le gène des récepteurs TLR7, qui interviennent dans le réponse immunitaire contre les virus, est porté par le chromosome X. « Chez la femme, certains gènes échappent à l’inactivation de l’X et s’expriment en double dose. TLR7 fait partie de ces gènes. Les femmes sont donc plus sensibles, lorsqu’elles croisent un ARN viral, à déclencher une réponse immunitaire avec de l’IFN-α qui a un effet protecteur sur les virus. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’elles sont en phase hormonale. L’effet est moins évident chez une femme ménopausée. De manière générale, ce n’est pas par hasard si les femmes en âge de procréer ont un avantage sélectif pour mieux se protéger contre les infections en termes de reproduction et survie de l’espèce. Il est tentant d’appliquer tout cela au Covid même si les choses n’ont pas encore été bien démontrées » précise le Pr Delobel. Les femmes seraient plus sujettes au Covid-long Selon les résultats d'une étude4 menée par une équipe de chercheurs du King’s College de Londres sur une cohorte de 4182 patients présentant un test PCR positif, environ 1 personne sur 7 (14,5%) avec un Covid-19 symptomatique serait malade pendant au moins 4 semaines, 1 sur 20 (5,1%) pendant 8 semaines et 1 sur 45 (2,2%) pendant 12 semaines ou plus. Aucun facteur de risques de développer une forme longue n’a encore été mis en évidence aujourd’hui. D’autant plus qu’un grand nombre de ces patients n’ont pas été hospitalisés. L’étude anglaise a toutefois tenté de dresser un profil type des malades du Covid-long. Ainsi, les personnes âgées, les femmes et les personnes présentant un plus grand nombre de symptômes la première semaine seraient davantage susceptibles de développer un Covid long.
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