“La situation sanitaire continue de marquer les comptes de la Sécurité sociale mais son amélioration a des conséquences comptables positives”, s’est réjoui vendredi 24 septembre le ministre de la Santé, Olivier Véran, lors de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), aux côtés du ministre de l’Economie. Mais, a-t-il prévenu, “ces bonnes nouvelles ne doivent cependant pas nous faire oublier le décrochage durable entre les recettes et les dépenses”. En effet, d’après les prévisions du PLFSS 2022, le déficit de la Sécurité sociale devrait considérablement s’améliorer l’an prochain (-13 milliards d’euros) - passant de 34,6 milliards d’euros en 2021 à 21,6 milliards en 2022 - grâce à une forte baisse des dépenses prévues pour pallier la crise sanitaire : de fait, 4,9 milliards d’euros ont été provisionnés dans l’objectif national de dépenses d’Assurance maladie (Ondam) 2022 à ce titre (1,6 milliard pour les tests et 3,3 milliards pour la campagne vaccinale), contre 14,5 milliards dans l’Ondam 2021 rectifié. Ce PLFSS sera “celui de la sortie de crise”, affirme ainsi Olivier Véran. Si “les dépenses nettes consolidées du régime général et du FSV ne progresseraient que de 0,8%” en 2022, les recettes, elles, devraient significativement augmenter de 3,9% en raison du “rebond de la masse salariale du secteur privé” (+6,6%). Pour les années suivantes, les prévisions demeurent “incertaines” tant l’évolution de l’épidémie est difficile à prévoir, de même que la vigueur de la reprise économique. A ce stade, elles font état d’un déficit “en baisse mais persistant, de 13 Md€ en 2024”.
+3,8% pour l’Ondam, hors dépenses liées au Covid
En tenant compte des mesures exceptionnelles prises pour lutter contre l’épidémie de Covid et le déploiement des mesures actées dans le cadre du Ségur de la santé, les dépenses de l’Assurance maladie en 2021 sont estimées à 237,1 milliards d’euros, soit une hausse de 7,4% par rapport à l’Ondam rectifié 2020. En 2022, prévoit le Gouvernement, “l’Ondam continuera à progresser”. Hors dépenses liées à la crise sanitaire, il augmentera de 3,8% à champ constant (soit une hausse de 8,4 milliards d’euros investis dans le système de santé). La hausse sera de...
+2,6% hors dépenses liées à la crise et à celles liées au Ségur. “Toutefois, du fait de la baisse des dépenses liées à la crise sanitaire, sur l’ensemble du périmètre, l’évolution serait de -0,6% par rapport à l’Ondam rectifié 2021.” Dans le détail, l’enveloppe allouée aux établissements de santé devrait s’établir à 95,3 milliards d’euros, soit une augmentation de 4,1%, affichant ainsi 3,7 milliards d’euros de financements nouveaux, sans compter les dépenses liées à la crise. 0,85 milliard d’euros seront consacrés aux engagements du Ségur de la santé, 0,55 milliard aux mesures RH complémentaires (revalorisation des agents en catégorie C, réforme du statut de praticien contractuel unique, revalorisation de la rémunération des sages-femmes hospitalières, etc.), 0,37 milliard aux mesures décidées dans le cadre du Conseil stratégique des industries de santé 2021 et 1,96 milliard au titre de l’évolution tendancielle et des autres mesures.
En somme, “aucun impératif d’économies” n’incombe aux hôpitaux dans le cadre de ce plan. Les sous-Ondam personnes âgées et personnes handicapées bénéficient également d’une nette augmentation (respectivement 4,2% et 4,7%). Au total, 1,2 milliard d’euros de financements nouveaux seront consacrés au secteur du médico-social l’an prochain, dont 750 millions dédiés au financement de revalorisations salariales dans le cadre du Ségur de la santé et des conclusions de la mission Laforcade. Par ailleurs, l’Ondam 2022 intègre 2,7 milliards d’euros de financement nouveau au titre de la poursuite de la mise en œuvre des engagements du Ségur.
L’enveloppe dédiée aux soins de ville apparaît quant à elle bien plus maigre, avec une évolution du sous-Ondam de +3,3%, soit 3,2 milliards d’euros. Zoom sur les mesures qui peuvent impacter votre exercice.
Mise en oeuvre des mesures de l’avenant 9
Sans surprise, l’Ondam 2022 intègre le financement des mesures actées dans le cadre de l’avenant 9 à la convention médicale signée en juillet dernier par la Cnam et trois syndicats de médecins libéraux, notamment un assouplissement du recours à la téléconsultation, plébiscitée lors de la crise, mais aussi les modalités de rémunération de la participation des médecins libéraux au Service d’accès aux soins (SAS), qui devrait être généralisé début 2022, selon les souhaits du Gouvernement. Le dispositif - qui doit permettre d’apporter une réponse aux demandes de soins non programmés associant la Ville et l’Hôpital - prévoit de rémunérer les médecins...
participant à la régulation 90 euros de l'heure avec prise en charge des cotisations sociales pour les médecins de secteur 1, et une rémunération forfaitaire par paliers pour les effecteurs. Si la Cnam a estimé lors d’un point presse jeudi 23 septembre que ces rémunérations étaient assez “importantes”, cela n’est pas de l’avis des médecins qui les jugent insuffisantes.
Accès élargi à la télésurveillance pour certaines pathologies chroniques
Le PLFSS 2022 prévoit également de généraliser plusieurs expérimentations menées dans le cadre du dispositif article 51, notamment "Étapes" qui permet la prise en charge par l’Assurance maladie, dans un cadre dérogatoire, de la télésurveillance pour 5 pathologies chroniques (diabète, insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, insuffisance respiratoire et prothèses cardiaques implantables à visée thérapeutique), ainsi que la prise en charge du diabète gestationnel par télésurveillance. A ce titre, le PLFSS vise à “inscrire dans le droit commun la prise en charge de la télésurveillance par l’Assurance maladie”. Le texte du PLFSS précise qu’une “tarification forfaitaire des activités de télésurveillance sera mise en place en 2022 pour assurer le financement par l’Assurance maladie” de ces activités. Ils intégreront la prise en charge des équipes pluridisciplinaires, les dispositifs médicaux de télésurveillance et ceux permettant la collecte des données. Dépistage du VIH en laboratoire sans ordonnance Autre expérimentation qui va faire l’objet d’une généralisation à tout le territoire : le dépistage du VIH en laboratoire de biologie médicale, et ce, sans ordonnance. Cette expérimentation avait été mise en place à l’initiative des “villes sans Sida”. En 2019, un rapport de la Cour des comptes (Prévention et prise en charge du VIH) avait déjà préconisé d’autoriser le remboursement des sérologies en laboratoires de ville sans prescription médicale.
Contraception gratuite pour les femmes de moins de 26 ans
Annoncée par Olivier Véran début septembre sur France 2, la gratuité de la contraception pour les femmes de moins de 26 ans est également inscrite dans ce PLFSS. Jusqu’ici, la contraception (quelle qu’elle soit) était prise en charge intégralement par l’Assurance maladie pour les mineures. Ce sont désormais 3 millions de jeunes femmes de 18 à 25 ans qui pourront en bénéficier. Une mesure qui devrait permettre de contrer le renoncement de nombreuses à cette mesure qui prendra effet le 1er janvier prochain.
Contraception : la désaffection pour les pilules de 3 ème et 4 ème génération se confirme La prescription de lunettes autorisée pour les orthoptistes S’ils réalisent déjà des “bilans visuels simples” pour les faibles corrections (dont l’examen de réfraction), les orthoptistes vont bientôt pouvoir également prescrire...
des “aides visuelles adaptées” (lunettes, lentilles de contact) pour les corrections faibles. Et ce, sans prescription médicale préalable, précise le texte. Six millions de patients pourraient être concernés par la mesure. Depuis la réforme du 100% santé, défendue par Emmanuel Macron, ces professionnels de santé jouissent de compétences élargies, comme la possibilité d’adapter les corrections dans le cadre d’un renouvellement, à l’instar des opticiens, mais aussi d’une coopération accrue avec les ophtalmologues. Objectif du Gouvernement : renforcer la prévention et faciliter l’accès aux soins. Favoriser l’accès à des médicaments onéreux Prévoyant 1 milliard d’euros de dépenses relatives aux produits de santé pour 2022 - Emmanuel Macron souhaitant porter la croissance moyenne du secteur à 2,4% - le Gouvernement entend favoriser l’accès aux médicaments et dispositifs médicaux onéreux à l’hôpital en élargissant dès l’année prochaine le périmètre de la liste établi dans le cadre du dispositif de financement intégral en sus du tarif des séjours hospitaliers aux produits de santé avec un service médical rendu (SMR) ou attendu (SA) important. Les médicaments apportant une amélioration du service médical rendu aux patients seront mis à disposition dès l’obtention de l’avis de la HAS, même s’ils ne sont pas “éligibles à l’accès précoce”. Transformation du modèle des Ehpad Défendant un virage domiciliaire dans la prise en charge des personnes âgées avec, entre autres l’instauration dès 2022 d’un tarif plancher national à hauteur de 22 euros par heure d’intervention pour les services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) prestataires dispensant des prestations d’aide et d’accompagnement dans le cadre de plans d’aide APA (allocation personnalisée d’autonomie) et PCH (prestation de compensation du handicap), le Gouvernement entend également transformer le modèle de l’Ehpad, dont la crise sanitaire a montré les limites. Plusieurs mesures structurantes sont détaillées dans ce PLFSS, à commencer par l’évolution des missions de ces établissements. A la faveur d’un “décloisonnement des acteurs de l’accompagnement des personnes âgées à domicile et en établissement”, le Gouvernement prévoit que les Ehpad puissent devenir “centres de ressources” pour l’ensemble des professionnels du secteur de l’autonomie sur son territoire. Ils pourront aussi proposer une offre d’accompagnement à domicile pour les personnes âgées nécessitant un soutien plus intensifs. De nouvelles places en Ehpad seront créées pour les personnes dont la perte d’autonomie est la plus sévère. Côté professionnels, des revalorisations salariales seront massives et le temps de médecin coordonnateur sera porté dans tous les établissements de ce type à au moins deux jours de présence par semaine. Aujourd’hui, alerte le Gouvernement, “1.500 Ehpad ne bénéficient pas de ce temps médical”. De même, la présence d’une infirmière de nuit sera généralisée. “C’est un PLFSS ambitieux, un PLFSS responsable, un PLFSS qui tient compte de circonstances exceptionnelles et qui poursuit les grandes transformations engagées ces derniers mois”, a estimé Olivier Véran. Le budget de la Sécu sera présenté le vendredi 6 octobre en conseil des ministres, avant d’être examiné par le Parlement quelques jours plus tard.
La colère se fait une fois de plus entendre du côté des médecins de ville, par la voix du Syndicat des médecins libéraux (SML) qui a vivement réagi au contenu du PLFSS 2022 dans un communiqué. Ce dernier déplore que le Gouvernement ait “une fois de plus” privilégié l’hôpital au détriment de la ville qui, estime le SML, n’a par ailleurs pas pu bénéficier du Ségur de la santé “qui n’a permis de financer que les seules attentes des hôpitaux”. L’organisation conclut, amère, que “les médecins libéraux sont les grands oubliés de ce dernier budget du quinquennat”. “Le SML en prend acte et prévient que cette politique, n’offrant aucune perspective aux médecins libéraux, va aggraver la crise des vocations et des installations des jeunes médecins.” D’autant qu’il a découvert que, malgré les promesses d’Olivier Véran, le PLFSS 2022 contient un transfert de compétences : la possibilité pour les orthoptistes de prescrire lunettes et lentilles, ainsi que des financements en faveur d’expérimentations “dont un grand nombre favorise la déstructuration des périmètres des métiers”.
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