Ce DMP qui continue de vous désespérer

07/12/2018 Par Fanny Napolier

Ils ont eu beau tenter de lui refaire une jeunesse, de le rendre séduisant, simple, voire indispensable… Rien n'y fait. Les médecins en ont vu d'autres et se montrent toujours aussi sceptiques face au DMP version 2018. Quelques optimistes, pourtant, tentent de faire vibrer une lueur d'espoir dans la défiance ambiante.

  Annoncé, repoussé, relancé, réformé : le dossier médical partagé revient de loin. Porté par la Cnam, qui a repris le dossier en 2016 après 12 ans d'échecs couteux (500 millions d'euros), ce "carnet de santé numérique" doit devenir "une évidence pour tous les Français, comme la carte vitale", a annoncé Agnès Buzyn, à l'occasion du lancement officiel du nouveau DMP, mardi 6 novembre. Objectif : ouvrir 40 millions de dossiers d'ici à 2022. Plébiscité par les patients, adopté par les pharmaciens, le DMP doit pourtant encore convaincre les médecins traitants de son utilité. D'autant que la nouvelle version ne prévoit aucune rémunération spécifique pour les médecins. Or la rédaction de l'indispensable synthèse médicale prend du temps, et mérite rémunération alerte les syndicats.

Enfin, vous avez été nombreux à saluer le travail d'analyse réalisé par l'ingénieur en systèmes de santé Philippe Ameline. Cet expert, qui a décortiqué l'histoire du DMP et les dessous de sa nouvelle version, se montre très pessimiste.   Vos réactions :  

"Chercher un document dans une armoire est exténuant"

Par fernande Analyse parfaite de l'inutilité programmée du DMP. Inexploitable en tant que bibliothèque de documents. Les médecins qui utilisent les logiciels hospitaliers savent bien qu'il est "exténuant " et chronophage de rechercher un document dans une armoire pleine fut-elle virtuelle. La plupart du temps on reste concentré dans son domaine de pathologie et par bonheur on peut parfois trouver une lettre de synthèse faite par un confrère malin (écrite dans le but de gagner du temps à la consultation suivante) Le DMP dont l'idée aurait pu séduire certains en les faisant croire que "tout était écrit" de façon synthétique et leur ferait gagner du temps de consultation est mort-né. Une fiche synthétique réalisée tous les 6 mois ou un an pour les patients sans pathologies ou tous les 3 mois pour les polypathologiques ou aigus et cela par un INTERNISTE AVEC UN VOCABULAIRE CODIFIÉ compréhensible par tous serait peut-être exploitable. De profundis ...  

"Il suffit de tenir peu de monde par les couilles"

Par bourgpat [Les Danois ne sont] Pas plus performants mais une vision très différente de la vie privée et des documents qui peuvent ou pas être publics. Avec aussi des systèmes assurantiels et de sécurité sociale différents pouvant par exemple réduire les prises en charge du patient en cas de non-respect des politiques de prévention. Une histoire amusante aux USA sur le fait que bcp de personnes ne veulent pas la prise en charge de avortements par les assurances. Car avec les lois sur la transparence, ces données pourraient facilement devenir publiques, voire deviendraient gênantes d'un point de la liberté électorale. Si vous ne votez par pour le bon candidat, le mauvais candidat pourra libérer les données gênantes vous concernant. Sur des élections serrées avec une forte abstention, il suffit de tenir peu de monde par les couilles.          

"Arrêtons de se planquer derrière l'argument du secret médical"

Par nturpin8589 Ça ne marchera que si les médecins et autres professionnels de santé le remplissent... pour cela il leur faudra des outils informatiques automatisés simplifiant ce travail. Le partage est la clé d'un système efficient... Il faudra oublier également les ego et arrêter de se planquer derrière l'argument du secret médical qui n'a AUCUN sens quand il s'agit de partager avec d'autres pro...    

"Il faut accepter la période actuelle de balbutiements"

Par Dominique_S Pas d'accord avec vous. Il faut accepter la période actuelle de balbutiements. La Poste a du souci à se faire. A terme tous les hôpitaux et cabinets de spécialistes préfèreront poster leurs comptes rendus sur le DMP. Et les généralistes n'auront rien d'autre à faire que d'aller piocher sur le DMP ce qui sera nécessaire au suivi de leurs patients. Le DMP sera donc au service du médecin traitant et ne lui ajoutera que très peu de travail (Pourquoi pas une petite synthèse annuelle facultative ?).      

"Demander leur avis à des praticiens.... Mais pourquoi donc ?"

Par ALLHUT Pour la plupart des logiciels dits de dossiers médicaux, c'était la même logique : une bibliothèque de documents (type Explorateur de Windows), ce qui est apparemment bon pour une administration, mais très souvent insuffisant pour le médecin. Et pourtant, la plupart, sans doute mal informés des capacités éventuelles d'un bon outil, s'en contentent. Presqu'aucun logiciel n'est basé sur la saisie des données, structurée, à réponse pré programmée selon les désirs de chacun, à partir desquelles il est facile de faire des exports automatiques soit, vers un courrier ou une observation de type hospitalier, soit vers une synthèse elle-même structurée pour le DMP, soit par exemple vers la fiche de RCP (réunion de concertation pluridisciplinaire en cancérologie). Pour ces dernières, on dispose depuis plus de 10 ans de dizaines de milliers de fiches de RCP. Mais non structurées, sur papier, ou sur traitement de texte ou en pdf, en version numérique. Elles sont donc inexploitables. Alors que cette mine d'information sur d'immenses cohortes en cancérologie pourrait montrer la pratique réelle, et y apporter des correctifs si elle était inadéquate. Mais, bon, le DMP a permis a pas mal de groupes d'inutiles d'utiliser les fonds publics (500 millions d'euros). Alors pourquoi se plaindre ? Quant à demander leur avis à des praticiens.... Mais pourquoi donc ? ALLHUT      

"C'est aux patients de conserver les éléments de leur suivi médical"

Par PATMO Le DMP est un nouvel avatar du ministère de la santé pour minimiser sa responsabilité vis à vis du patient "et du médecin". Cela a déjà coûté des milliards qui n'ont pas été perdus pour tout le monde. Ne serait-il pas plus simple de sensibiliser les patients pour qu'ils conservent les éléments de leur suivi médical ? Je ne saurais dire combien de fois en 35 ans de pratique j'ai vu des patients jeter leurs examens bio ou radio en disant que c'était le boulot du médecin de tout conserver. Sensibilisons les patients à leur santé au lieu de les déresponsabiliser. La santé c'est quelque chose de personnel, se reposer sur le monde médical ne fait qu'aggraver une fausse sensation de sécurité. Le médecin a déjà suffisamment à faire avec le diagnostic, le traitement et le suivi sans avoir en plus à assurer la mémoire de toute une vie. Nous gardons déjà beaucoup d'éléments papiers ou informatiques (30 ans) chacun doit s'assumer au lieu de se reposer sur autrui.      

"Le DMP est un outil, on en fera ce que l'on voudra"

Par CES84 Dommage effectivement de se donner toutes les bonnes ou mauvaises raisons de ne pas essayer... C'est un outil on en fera ce que l'on voudra... A partir du moment où un maximum de personnes en seront dotées, le DMP montrera ses forces et ses faiblesses et des actions d'ajustement ou de développement pourront être menées pour qu'il ne soit pas à l'origine de problèmes judiciaires et pour qu'il soit plus utile. Cet article est bien écrit, les bases sont fondées mais fondées sur notre passé. La médecine évolue et notre environnement technologique aussi. Je n'avais pas de portable quand j'ai débuté et mes rendez-vous sont maintenant sur mon téléphone... Fantasmer sur les difficultés du futur d'un DMP qu'on n'utilise pas encore est anxiogène... De ce côté-là ce n'est pas très sympa... Nous sommes déjà tous au taquet !! Bon week-end Dr FD

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