Activité libérale à l’hôpital : la Cour des comptes veut plafonner les honoraires des médecins
"La permanence des soins (notamment l'accueil 24/24) est clairement une mission de service public qui pèse trop lourdement sur les seuls établissements publics et leurs salariés", a déclaré Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, en présentant à la presse un rapport intitulé "Les établissements de santé publics et privés, entre concurrence et complémentarité". Afin de rééquilibrer les sujétions pour mieux répondre aux besoins des usagers mais aussi à l’enjeu de l’attractivité des carrières médicales, les Sages formulent plusieurs recommandations.
Ils proposent ainsi "de conditionner la délivrance" par les ARS des autorisations d'activités du secteur privé "au respect de plusieurs critères" de service public hospitalier, tels que "la participation à la permanence des soins, les gardes et astreintes le week-end et en nuit profonde". La Cour recommande d'ailleurs de "rendre obligatoire la participation" aux gardes et astreintes "des praticiens exerçant en établissement de santé privés", mesure contenue dans la proposition de la loi Valletoux qui sera bientôt examinée au Sénat, et également d'organiser la mutualisation territoriale des ressources en personnel soignant pour la nuit, la fin de semaine, le mois d’août, les jours fériés et les fêtes de fin d’année" entre établissements.
144 000 euros en moyenne aux HCL
Le rapport s'intéresse également à l'activité libérale exercée en établissement, notamment à l'hôpital. En 2019, les honoraires pris en charge par l’Assurance maladie des médecins exerçant sous forme libérale dans les établissements de santé (tous statuts confondus) se sont élevés à 6,7 milliards d'euros en 2019, toutes activités comprises. Aux Hospices civils de Lyon, par exemple, 127 praticiens exercent une activité libérale, qui leur a rapporté en moyenne 144 000 €. "Le minimum d’honoraires perçus cette même année était de 16 700 € et le maximum de 1,08 million d'€, avant versement de la redevance due aux HCL. Les trois praticiens ayant perçu le plus d’honoraires, tous PU-PH, interviennent en chirurgie orthopédique (1,08 M€), en radiothérapie (0,92 M€) et en ophtalmologie (0,53 M€)."
"La proportion d’activité due au service public par les praticiens d’un hôpital public autorisés à exercer une activité libérale au sein de celui-ci, doit être mieux garantie", considère le rapport. La Cour des comptes recommande en ce sens "un plafonnement du revenu de l’activité libérale par rapport aux revenus de l’activité salariée des praticiens", qui s'ajouterait "aux limites actuelles reposant sur le temps de travail et le nombre d’actes, peu vérifiables et donc insuffisamment contrôlés", étant donnée l'"autonomie" d'organisation dont bénéficient les médecins. "Cette donnée est aisée à objectiver, car elle est transmise tous les trimestres à la direction, argumente la Cour. Cela permettrait de conforter le dispositif de régulation, d’autant plus qu’il ne s’applique qu’à une proportion très limitée des praticiens publics, 10 %. Ainsi, le contrat d’exercice des praticiens publics dont les honoraires annuels au titre de la pratique privée atteignent une certaine proportion des émoluments publics, pourrait comporter des engagements complémentaires définis avec le directeur de l’établissement public et le président de la commission médicale d’établissement concernant les objectifs d’activité publique desdits praticiens, ainsi que les modalités d’organisation de leur pratique afin d’en garantir la compatibilité avec les intérêts légitimes de l’établissement."
La Cour appelle par ailleurs à une réforme de la tarification de l’activité libérale dans les établissements publics de santé de manière à éviter que l’Assurance maladie ne paye deux fois le temps médical consacré aux prestations : une fois au titre du groupe homogène de séjour (GHS), et une deuxième fois au titre des honoraires des praticiens.
[avec AFP]
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