Diabète de type 2 : la HAS réagit aux tacles des diabétologues sur les gliflozines
La Haute Autorité de Santé (HAS) vient de publier une mise au point visant à préciser le contexte concernant l’absence, pour le moment, de mise sur le marché des traitements de la classe la plus récente des antidiabétiques : les inhibiteurs de SGLT2 ou gliflozines. Il s’agit de répondre aux « professionnels de santé et aux sociétés savantes ayant récemment exprimé leur regret de ne pas pouvoir prescrire à leurs patients » ces traitements. Dans son récent consensus d’experts rédigé en vue de futures recommandations sur la prise en charge médicamenteuse du diabète de type 2, la Société francophone du diabète (SFD) a ainsi clairement positionné cette classe médicamenteuse dans son algorythme thérapeutique. Pour le Pr Darmon (Marseille), membre du conseil scientifique de la SFD, cette classe thérapeutique non disponible en France aujourd’hui, est « toutefois incontournable », avec un rapport bénéfices/risques « favorable en dépit d’effets indésirables identifiés ». En deuxième ligne de traitement après la metformine, et « en cas de maladie cardiovasculaire avérée, insuffisance cardiaque ou rénale chronique, un iSGLT2 ou un agoniste des récepteurs du GLP-1 (GLP-1 RA) est plus pertinent [que les inhibiteurs DPP4] en raison d’effets bénéfiques collatéraux cardiovasculaires ou rénaux » explique l’expert. Et dans son « Evaluation du rapport bénéfices-risques des inhibiteurs de SGLT2 » (mars 2019), la SFD concluait que « s’il est nécessaire de poursuivre une pharmacovigilance attentive dans des études de post-marketing au long cours, le rapport bénéfices/risques des iSGLT2 apparaît aujourd’hui hautement favorable et la fréquence des effets indésirables rapportés ne devrait pas priver les patients français DT2 à haut risque CV ou rénal de cette nouvelle option thérapeutique ».
La HAS a tenu cependant à préciser que cette absence de mise à disposition résulte, pour l’indication dans le diabète de type 2, d’un défaut « d’accord sur le prix entre les laboratoires et le Comité économique des produits de santé (Ceps) » et non d’un avis défavorable de la HAS. Au contraire, deux glifllozines, Forxiga (dapagliflozine, AstraZeneca) et Invokana (canagliflozine, Janssen), bénéficient actuellement d’un avis favorable pour l’accès au remboursement. L’agence sanitaire « ne peut que regretter le lien erroné qui est établi entre les évaluations qu’elle a menées, favorables au remboursement, et l’impossibilité pour les professionnels de santé de prescrire ces médicaments à leurs patients, liée à une décision des laboratoires n’ayant pas obtenu satisfaction sur le prix de vente ». La main aux laboratoires La HAS rappelle ainsi que la commission de la transparence (CT), chargée d’évaluer les médicaments, « travaille dans le respect de trois valeurs fondamentales » : la rigueur scientifique, la transparence et l’indépendance. La CT fonde ses avis sur le Service médical rendu (SMR) et l’amélioration du SMR. Vient ensuite, en cas d’intérêt clinique suffisant, l’étape de la négociation du prix entre l’industriel et le Ceps. Dans le cas des gliflozines, trois d’entre elles (Jardiance [empagliflozine, Boehringer Ingelheim], Forxiga et Invokana) ont reçu en 2014, un avis favorable de la CT, sur le fait que « les données cliniques disponibles ont démontré un effet modeste de ces médicaments sur la réduction de l’hémoglobine glyquée (critère de jugement biologique) et un profil de tolérance acceptable ». L’ASMR a cependant été jugé inexistant (V). Les avis de la HAS reposaient sur l’absence de surrisque d’événements cardiovasculaires, la diminution de la mortalité ainsi qu’un effet sur l’insuffisance cardiaque chez les patients diabétiques traités par gliflozines. Cependant « si ces résultats sont jugés prometteurs par la HAS, ils ne permettent pas cependant de démontrer de manière robuste l’efficacité des gliflozines sur la mortalité et l’insuffisance cardiaque. Ils sont le fruit d’études de tolérance réalisées contre placebo, qui n’ont pas, par construction, la solidité statistique et le niveau d’exigence requis pour apporter la preuve scientifique d’une efficacité » ajoute l’agence sanitaire. En conséquence, le prix proposé aux laboratoires était bas, se situant « très en-dessous de ce qui est accepté dans les autres pays développés pour ces molécules, et les industriels ont refusé cette proposition » affirmait la SFD dans son avis de mars dernier. Et par la suite, « les laboratoires n’ont pas commercialisé leur médicament en raison de l’échec de leur négociation de prix avec le Ceps » complète la HAS. En outre, du fait de nouvelles données de tolérance (amputation du membre inférieur), Jardiance a reçu... un avis défavorable de la CT en 2019. La HAS précise qu’il appartient dorénavant aux laboratoires de la saisir pour une réévaluation sur la base des nouvelles études disponibles. Pas encore d’AMM dans l’insuffisance cardiaque Par ailleurs, dans le traitement de l’insuffisance cardiaque, « aucune gliflozine n’a d’autorisation de mise sur le marché, prérequis indispensable avant toute évaluation par la HAS ». Par conséquent, elles ne peuvent pas être proposées au remboursement dans cette indication. De nouvelles études sont en cours. Et la HAS se dit « prête à évaluer toute nouvelle donnée sur l’intérêt des gliflozines dans l’insuffisance cardiaque comme d’ailleurs dans d’autres pathologies (néphropathie diabétique par exemple) dès lors que les laboratoires auront sollicité et obtenu une AMM pour ces médicaments dans cette indication et que, comme rappelé plus haut, les laboratoires auront déposé à la CT un dossier de demande d’accès au remboursement.
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