Les manipulations cervicales doivent-elles être réservées aux médecins ?
C’est ainsi qu’il y a un an, un kinésithérapeute a été condamné en appel à 3000 euros pour avoir provoqué chez elle des «séquelles majeures avec perte d’autonomie», retrace C.Thibert dans un article du Figaro Santé (6 janvier 2020). Autre exemple, des médecins du CHU de Reims ont rapporté, en aout 2019, le cas d’une femme de 34 ans devenue tétraplégique à la suite d’une séance de chiropraxie. Le mécanisme de ces accidents fait intervenir une dissection artérielle liée aux manipulations, qui est favorisée par la proximité des artères et des os dans cette région anatomique. « L’orsque l’on procède à une torsion rapide de la nuque, on met en contact l’artère avec l’os. Et pour autant que cette artère est déjà des altérations, c’est là que la déchirure de la paroi peut se faire » explique ainsi dans Le Figaro, le Pr Roman Sztajzel, neurologue vasculaire à l’hôpital de la Tour à Genève. Ces personnes présentent donc probablement un terrain anatomique particulier sous-jacent - à type de faiblesse de la paroi artérielle, héréditaire ou non - qui favorise ce type d’accidents. Il est alors difficile de savoir si la manipulation a aggravé une situation préexistante, ou si elle est directement à l’origine de l’accident. La dissection peut se résorber spontanément, ne se manifestant que par une douleur passagère, ou par un état vertigineux ou nauséeux pouvant se prolonger pendant deux à trois jours après la manipulation; mais elle peut aussi entrainer un accident vasculaire cérébral (AVC). « Pendant des années les dissections artérielles les dissections artérielles étaient surtout dus à des accidents de la route, mais depuis quelques temps, nous avons de plus en plus de cas consécutifs à des manipulations vertébrales, affirme un chirurgien vasculaire qui souhaite rester dans l’anomymat, précise C. Thibert. J’ai vu une bonne dizaine de patients dans ce cas en 10 ans d’exercice, le plus souvent de jeunes adultes ». Pour autant, il reste difficile d’en évaluer l’incidence avec précision, aucun registre français ne portant sur les dissections artérielles liées aux manipulations. Dans les études internationales, les taux vont de 1/100 000 à 1/1million. Un risque donc faible, mais potentiellement grave, qui fait qu’il ne faut jamais négliger des douleurs inhabituelles de la nuque, du crâne ou d’un œil survenant après une manipulation cervicale, des nausées ou des vertiges, qui ont une valeur d’alerte. Alors que faire pour limiter ce risque ? La Société française de médecine manuelle orthopédique et ostéopathique (Sofmmoo) a publié en 1997 des recommandations sur la « Prévention des accidents vertébro-basilaires après manipulation cervicale ». Elles insistent sur la nécessité de rechercher des facteurs de risque par l’interrogatoire et un examen neurologique simple : « Au cours de l'interrogatoire, il est essentiel de questionner la patiente afin de savoir si elle a déjà eu un traitement par manipulation cervicale et si ce traitement a été suivi d'effets indésirables, en particulier vertiges ou état nauséeux » est-il ainsi précisé. Les auteurs contre-indiquent les manipulations lorsque la douleur pour laquelle le patient est venu consulter ne peut être rapportée au rachis cervical. Enfin, les membres de cette société recommandent de ne pas « recourir aux manipulations cervicales rotatoires chez la femme de moins de 50 ans » et conseillent de favoriser les techniques « douces ». Mais pour le Dr David Cypel, président de la Sofmmoo, cela ne suffit pas car « l’immense majorité des accidents décrits dans la littérature scientifiques sont le fait de thérapeutes qui ne sont pas médecins » affirme-t-il dans l’article du Figaro. Un diagnostic médical est nécessaire avant les manipulations cervicales ; mais dans la réalité, il n’est que rarement effectué, les ostéopathes non médecins étant souvent bien plus accessibles. La Sofmmoo conseille donc de diminuer les manipulations cervicales. L’article cite, en outre, un texte publié en 2012 dans The british Medical Journal, dans lequel 3 médecins appelaient à abandonner purement et simplement la manipulation du rachis cervical, du fait d’un balance bénéfice/risque peu favorable selon eux.
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