Rôle du pédiatre, santé mentale, vaccination... comment les candidats à la présidentielle veulent soigner les enfants

09/03/2022 Par Marielle Ammouche
Pédiatrie
La santé des enfants est insuffisamment prise en charge et pourrait même se dégrader à l’avenir du fait du développement des maladies chroniques et des troubles mentaux, mais aussi du manque de pédiatres. Travail aidé et coordonné pour favoriser l’accès aux soins, remboursement des vaccins recommandés, consultation de pédiatrie au 4 ème mois de grossesse, développement de la recherche… les propositions des candidats sont variées pour tenter d’améliorer la situation.
 

Nouvelles maladies (Covid, Pims, Covid long), troubles mentaux, impact scolaire et social …la crise sanitaire a fait porter un lourd tribut aux enfants et aux adolescents, faisant prendre conscience, en outre, des insuffisances dans l’organisation des soins pour cette population. A la veille de l'élection présidentielle, le Syndicat des pédiatres français (SNPF) a décidé d’auditionner les candidats sur leurs projets politiques concernant la santé de nos enfants et adolescents. Le 17 février, les représentants de cinq candidats à l'Elysée se sont donc prêtés à cet exercice. Etaient ainsi réunis le Dr Barriot, conseiller santé de Marine Le Pen (Rassemblement National) ; le Dr François Braun, référent santé Majorité Présidentielle ; le Pr Philippe Juvin, conseiller santé de Valérie Pécresse (Les Républicains) ; le Dr Véronique Rogez, conseillère santé de Nicolas Dupont-Aignan, représentée (Debout la France), et Boris Vallaud, conseiller santé d’Anne Hidalgo (Parti Socialiste). Le Dr Brigitte Virey, présidente du SNPF a souligné les enjeux majeurs d’une politique ambitieuse de l’enfant, tous les indicateurs de santé s'étant dégradés depuis des années. "L’évolution de la santé de l’enfant est préoccupante dans notre pays. Dans tous les domaines, la prise en charge de cette population n’est pas satisfaisante. […] La pandémie de covid-19, en raison de ses confinements inégalitaires, a mis en évidence, ou tout au moins accentué, certaines problématiques déjà présentes chez l’enfant : le décrochage scolaire qui a touché surtout les enfants déjà en difficulté et les plus précaires ; les troubles neurodéveloppementaux y compris l’autisme ; l’addiction aux écrans et les troubles de l’attention qu’ils génèrent ; les troubles des comportements sociaux. Depuis septembre 2020, il y a eu deux fois plus d’enfants qui sont passés aux urgences psychiatriques pour des problèmes d’anxiété, de dépression, de troubles du sommeil. Et on observe deux à trois fois plus de tentatives de suicide chez les moins de 16 ans". La spécialiste a insisté sur la nécessité de disposer de données épidémiologiques spécifiques pour conduire des politiques de santé publique de l’enfant efficaces. Une proposition d’ailleurs reprise par l’ensemble des représentants des partis. Le Dr Patrick Barriot et Boris Vallaud ont aussi mis l’accent sur la nécessité d’une approche globale qui intègre les indicateurs sociaux, dans la mesure où l’état de santé est très lié aux gradients sociaux, le parti socialiste soulignant les inégalités de santé territoriales, majeures dans ce domaine. Debout la France souligne l’importance de mieux prendre en compte les déterminants environnementaux, et souhaite mettre l’accent sur les cancers pédiatriques, grande cause pour ce parti. Une thématique reprise par plusieurs autres des personnalités présentes. Boris vallaud souhaite, par ailleurs, que la santé mentale soit la grande cause du quinquennat. Un sujet repris par Les Républicains, qui veulent créer un "INCa de la Santé mentale".   Quelles propositions pour la prévention ? Concernant le dépistage et la prévention, l’ensemble des candidats réaffirment la nécessité que le pédiatre soit le partenaire prioritaire pour la santé de l’enfant. Ils considèrent, en particulier, que la compétence vaccinale doit rester entre ses mains, car ce rendez-vous est l’occasion pour le médecin d’une consultation élargie. "La vaccination n’est pas l’injection", insiste le Pr Juvin, représentant des Républicains. En outre, tous souhaitent que l’ensemble des vaccins soient remboursés par l’Assurance maladie, à partir du moment où ils sont recommandés (méningocoque B, rotavirus). Parmi les propositions es Républicains figure aussi la mise en place "d’une consultation par un pédiatre au 4 e mois de grossesse", qui soit une consultation de préparation à l’arrivée de l’enfant. Le Rassemblement national a rappelé par ailleurs les insuffisances de la médecine scolaire et souhaite donner les moyens pour que les visites obligatoires dans ce cadre deviennent une réalité. Dans ce domaine, le parti socialiste propose que la médecine scolaire soit confiée aux départements. Debout la France pense, par ailleurs, que les consultations obligatoires sont trop nombreuses. Pour le Dr Braun, de LREM, il faut viser...

un objectif de 100% de médecins traitants pour les enfants, renforcer l’accès à l’information pour les parents (par exemple sur le programme "1 000 premiers jours"), et développer des campagnes plus ciblées sur les pathologies de l’enfant.   Comment améliorer le parcours de soins en pédiatrie ?
  Les politiques se sont ensuite penchés sur le problème de la démographie médicale et de l’accès aux soins. En effet, comme l’a souligné le Dr Virey, actuellement, 40% des pédiatres ont plus de 60 ans. Et l’accès à ce spécialiste est très inégal selon les territoires. "La pédiatrie est actuellement condamnée, notamment par les différents rapport, Igas, Cour des comptes. Il nous est reproché de ne pas voir tous les enfants. Mais à aucun moment les gouvernements successifs depuis plus de vingt ans n’ont pris la décision d’augmenter le nombre de pédiatres libéraux en pariant sur l’attractivité de ce métier", s’alarme cette spécialiste. Selon elle, on ne peut morceler la santé des enfants en fonction des organes. Une prise en charge globale est fondamentale. Les réponses proposées par les candidats à la présidentielle sont centrées sur la formation initiale des pédiatres, la fin du numerus clausus, mais aussi le développement de maisons pluriprofessionnelles, soit générales, soit pédiatriques, qui sont encore trop peu nombreuses sur le territoire, rappelle le Dr Virey. Le parti socialiste souhaite former des pédiatres en plus grand nombre, mais aussi des infirmières, des sages-femmes, des puéricultrices, dont le diplôme "mérite réflexion" pour voir comment ces professionnelles peuvent constituer "un auxiliaire utile du travail pédiatrique". Dans son programme, Anne Hidalgo souhaite qu’une 4 ème année d’internat soit effectuée dans les territoires déficitaires. Les Républicains souhaitent un "choc de formation" avec doublement du numerus clausus, une 4 ème année d’internat de médecine générale, et une augmentation du temps de formation à la pédiatrie et en exercice libéral. Ils veulent créer plus de lien entre le médecin généraliste et le pédiatre libéral. Pour Debout la France, il faut aussi accroître le nombre de pédiatres en formation, ainsi que des aides à l’installation sous forme de bourse, et une formation aux jeunes parents. Il s’agit aussi de dégager du temps médical, via notamment le travail "aidé", qui est approuvé par tous les intervenants. Concernant la délégation de tâches, les politiques considèrent que les paramédicaux doivent être, et rester, des partenaires du médecin sous sa supervision et dans un espace de soins dédié, du fait du colloque singulier entre le professionnel, l’enfant et ses parents. Pour le Pr Juvin, il pourrait s’agir de puéricultrices formées - équivalent d’IPA, qui seraient en cabinet autour des pédiatres, et qui auraient la charge de missions de conseil, et d’accompagnement à la parentalité. Boris Vallaud évoque aussi de véritables "parcours de soins de l’enfant" dans le cadre des CPTS, des maisons de santé pluridisciplinaires, des maisons de santé pédiatriques. "Le médecin pédiatre doit être au centre d’une équipe pluriprofessionelle", souligne aussi le Dr François Braun, de la majorité présidentielle. La République en Marche souhaite améliorer la coordination globale autour de l’enfant. Des formations type Formation Spécialisée Transversale (FST) pourraient être utiles aux médecins généralistes qui prennent en charge la très grande majorité des enfants (85%), le pédiatre restant le médecin expert. La prise en charge doit se faire "à des moments clés de la vie de l’enfant, pas uniquement au moment des soins". Tous insistent fortement sur la nécessité de maintenir l’accès libre au pédiatre.

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