Conseillers médicaux en environnement intérieur : une aide précieuse

25/06/2021 Par Corinne Tutin
Allergologie

Ces professionnels peuvent permettre d’objectiver les sources d’exposition allergénique et accompagner l’éviction. Infirmière et conseillère médicale en environnement intérieur (CMEI), Emilie Hecquet est co-coordinatrice de la plateforme CMEI* mise en place par l’agence régionale de santé et le conseil régional des Hauts-de-France. Elle explique à Egora comment fonctionne cette plateforme dans cette région, à l’occasion du 16ème congrès francophone d’allergologie (27-28 mai).   Egora : Quel est le rôle des conseillers en environnement intérieur et comment sont-ils formés ? Emilie Hecquet : Des diplômes universitaires (DU) ou interuniversitaires (DIU) sont organisés dans plusieurs facultés de médecine françaises pour former des professionnels venant du secteur de la santé (infirmiers…) ou de l’habitat à devenir conseillers médicaux en environnement intérieur (CMEI), conseillers en environnement intérieur (CEI) ou conseillers habitat santé (CHS). Ce qui correspond à des fonctions très proches. Le métier consiste à effectuer des enquêtes de santé environnementale sur prescription médicale. Pour l’instant, il n’est pas encore reconnu. Mais, dans certaines régions comme la nôtre, les prestations sont prises en charge financièrement. Il existe aussi quelques professionnels indépendants. Comment fonctionne votre plateforme et quels sont les médecins qui vous sollicitent ? La plateforme existe depuis 2013 et est hébergée au sein de l’Association pour la prévention de la pollution atmosphérique (APPA)**. Environ 70 % des médecins qui nous sollicitent sont des pneumologues et des pneumopédiatres, mais des allergologues et quelques médecins généralistes adressent aussi une prescription à la plateforme pour demande d’intervention. Dans les Hauts-de-France, nous n’intervenons que pour des pathologies respiratoires et/ou allergiques. Les pneumologues font souvent appel à nous, lorsqu’ils font face à un asthme mal contrôlé inexpliqué, pour rechercher des facteurs d’aggravation au domicile comme la présence d’humidité, des moisissures, parfois pour appuyer des recommandations qu’ils ont déjà faites au patient : réduction de l’exposition allergénique aux acariens et aux poils d’animaux, suppression des huiles essentielles ou de parfums d’intérieur souvent considérés par le grand public comme assainissants, limitation de l’utilisation d’eau de javel ou du tabagisme passif. Reste que, lorsqu’on a affaire à des comportements ancrés, les résistances sont courantes.  Les CMEI de notre plateforme ont d’ailleurs suivi, en 2020, une formation sur l’entretien motivationnel dans le but d’accompagner au changement de comportement. On nous demande aussi de trouver l’antigène responsable de pneumopathies d’hypersensibilité comme celles liées à la présence d’oiseaux. Parfois nous enquêtons chez des patients avec une BPCO, une mucoviscidose pour les aider à limiter la présence de facteurs pouvant être source d’exacerbations de leur maladie (irritants, moisissures).  L’enquête environnementale ne doit être réalisée qu’après une prescription étayée, un premier bilan pneumologique et allergologique. Nous n’allons pas au domicile du patient, lorsque nous avons l’impression que nous risquons d’être instrumentalisés et que la demande est faite dans un contexte de litige avec le propriétaire, un voisin (plainte pour odeurs gênantes…). En pratique, comment cela se passe-t-il ? La visite dure en général une heure et demie et débute par un entretien avec le patient. En plus du contrôle visuel et sensoriel de l’habitat, nous faisons systématiquement quelques mesures : température, humidité relative et de contact, monoxyde de carbone (pour vérifier que le chauffage à combustion n’est pas défectueux), dioxyde de carbone (un indice de confinement important quand on parle de qualité de l’air intérieur), recherche de moisissures en cas d’humidité, parfois prélèvements chimiques (formaldéhyde…).  Certains prélèvements sont faits pour conforter l’hypothèse d’une source d’exposition suspectée par le CMEI lors de sa visite et peuvent étayer un courrier fait au bailleur lorsque nous conseillons des modifications de l’habitat (amélioration des systèmes de ventilation, qui sont souvent à l’origine de problèmes d’humidité et de moisissure, correction de fuites d’eau…). Notre courrier est souvent utile pour sensibiliser à la nécessité de remédier au(x) désordre(s)constaté(s). Mais, n’a pas de valeur réglementaire. Vous avez réalisé une enquête auprès des médecins ayant fait appel à votre plateforme. Qu’a-t-elle montré ? Nous pensions que les médecins attendaient que nous effectuions des prélèvements, par ailleurs souvent coûteux et difficilement exploitables hors contexte. En fait, l’analyse de 108 questionnaires renvoyés par 49 prescripteurs différents a révélé que seulement 21 questionnaires mentionnaient la réalisation de ces prélèvements comme objectif de la visite. Bien plus fréquemment, les praticiens ont rapporté que l’intervention du CMEI avait apporté des éléments d’information pour compléter le bilan médical (91 réponses sur 108), aider à l’éviction des facteurs aggravants (84 réponses sur 108). Les praticiens citaient aussi l’aide au changement de comportement des patients (62 sur 108) et l’appui ciblé aux recommandations médicales (57 sur 108). * Portail des conseillers en environnement intérieur des Hauts-de-France. www.cmei-hdf.fr ** Association pour la prévention de la pollution atmosphérique : www.appa.asso.fr  

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