Les patients guéris de leur maladie de Cushing gardent un excès de mortalité

07/07/2016 Par Pr Philippe Chanson

La principale cause de syndrome de Cushing est la maladie en Cushing en relation avec un microadénome hypophysaire sécrétant de l’ACTH. Lorsqu’elle n’est pas traitée, la maladie de Cushing augmente la mortalité, principalement de cause cardiovasculaire. Cependant différentes études de cohorte ont montré que même si la mortalité était améliorée après traitement de la maladie de Cushing, il persistait en comparaison de la population générale un sur-risque de morbi-mortalité chez ces patients. Un groupe international, anglais, néozélandais, hollandais et danois, a mené une étude de cohorte rétrospective à partir des observations cliniques provenant de centres spécialisés au Royaume-Uni, au Danemark, aux Pays-Bas et en Nouvelle-Zélande, sur les cas de maladie de Cushing suivis un minimum de 10 années après la guérison de leur hypercorticisme sans avoir récidivé. Leurs taux de mortalité ont été comparés à ceux de la population générale et exprimés en rapports standardisés de mortalité (mortalité observée/mortalité attendue dans la population générale). Les données de suivi jusqu’à 10 ans après la guérison ont été obtenues pour 320 patients (correspondant à 3 790 personnes x années de suivi). Le suivi médian était de 11.8 années (espace interquartile 7-26) et ne variait pas d’un pays à l’autre. Il n’y avait pas de différence significative dans les caractéristiques démographiques, la durée du suivi, les comorbidités, le nombre de traitement ou le type de traitement entre les hommes et les femmes, ce qui a permis de pooler les données des deux sexes pour les analyses de survie. 51 patients (16 %) de la cohorte sont décédés au cours du suivi entre l’entrée dans l’étude et les 10 ans après la guérison. La survie médiane, à partir de l’entrée dans l’étude (c’est-à-dire l’obtention de la guérison), était similaire chez les femmes (31 ans ; 19-38) et les hommes (28 ans ; 24-42) et était d’environ 40 ans (30-48) à partir de la rémission. Le rapport standardisé de mortalité globale pour la mortalité quelle qu’en soit la cause était de 1.61 (IC 956 % = 1.23-2.12, p = 0.0001). Le RSM pour les maladies circulatoires était augmenté à 2.72 (1.88-3.95 ; p < 0.0001) mais les décès par cancer n’étaient pas supérieurs à ce qui était attendu (0.79 ; 0.41-1.51). La présence d’un diabète mais non d’une hypertension était un facteur de risque indépendant de mortalité (hazard ratio = 2.82 ; 1.29-6.17 ; p = 0.0095). Les auteurs ont noté une réduction progressive de la survie avec l’augmentation du nombre de traitements nécessaires. Les patients guéris par la chirurgie hypophysaire seule avaient une survie à long terme similaire à celle de la population générale (RSM = 0.95 ; 0.58-1.55) en comparaison de ceux qui avaient nécessité d’autres traitements (radiothérapie, surrénalectomie...) : 2.53 ; 1.82-3.53 ; p < 0.0001. En conclusion, les patients ayant une maladie de Cushing en rapport avec un microadénome hypophysaire sécrétant de l’ACTH et qui ont été en rémission pendant plus de 10 ans après le traitement de leur maladie de Cushing gardent un risque supérieur de mortalité globale (particulièrement de maladies cardio-circulatoires) en comparaison de la population générale. Toutefois, la survie médiane, à partir de la guérison, est excellente puisqu’elle atteint environ 30-40 années après la rémission. La complexité du traitement et l’augmentation du nombre de traitements qui reflètent que la maladie est plus difficile à contrôler semble affecter de manière négative la survie. C’est la chirurgie hypophysaire qui est le traitement préférable pour permettre une évolution optimale et il faut donc, pour le maximum de succès, qu’elle soit réalisée dans des centres chirurgicaux d’excellence.

 
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