Quand les résultats de dosages hormonaux sont aberrants du fait de la présence d’anticorps hétérophiles

24/06/2015 Par Pr Philippe Chanson

Les immuno-essais, malgré leur sensibilité et leur spécificité, sont sujets à un certain nombre d’interférences. En particulier, les interférences peuvent être liées à la présence d’anticorps endogènes comme les anticorps hétérophiles ou les anticorps anti-animal ou les auto-anticorps. Les anticorps exogènes donnés à un patient pour un traitement peuvent aussi entrer en compétition avec l’anticorps utilisé pour le dosage et perturber la réaction antigène/anticorps, aboutissant à une interférence dans l’immuno-essai. Les anticorps interférents peuvent donner des résultats faussement élevés ou, moins fréquemment, faussement bas. La prévalence semble basse, < 2 %. Une équipe turque rapporte le cas d’une patiente de 33 ans, sans symptôme spécifique en dehors d’une fatigue, d’une perte de poids et de sueurs survenant dans la période du post-partum. Elle a donc été évaluée au plan hormonal et les premiers dosages ont montré une élévation très importante de la TSH avec paradoxalement une T4 libre et une T3 libre normales. Elle a donc reçu de la T4 mais du fait de l’absence de réponse de la TSH après un an de traitement par T4 et du fait de l’élévation d’autres hormones, elle a été adressée au centre d’Ankara. Les dosages anormaux portaient non seulement sur la TSH, très élevée, mais également sur l’ACTH, la FSH, la PTH, l’IGF1, la prolactine, la β-hCG et la calcitonine sans qu’il n’y ait de signe clinique évocateur associé. Les mesures ont été répétées plusieurs fois sur le même échantillon sanguin par différents laboratoires, en utilisant des méthodes différentes : immuno-dosage par chemiluminescence, par électro-chemiluninescence et les résultats étaient divergents d’un laboratoire à l’autre. Des dilutions des échantillons ont révélé une absence de linéarité suggérant des interférences dans le dosage. En fait, toutes les mesures hormonales étaient normales lorsqu’on bloquait les anticorps hétérophiles. Le sérum de la patiente a donc été sujet à une précipitation par le polyéthylène glycol (PEG). Le contrôle du dosage après PEG a montré des valeurs cette fois strictement normales. Ce cas illustre donc la possibilité de trouver des concentrations hormonales faussement élevées, et cela pour plusieurs hormones, du fait d’interférences dans les dosages liées à la présence d’anticorps hétérophiles. Ces anticorps étaient des anticorps anti-souris qu’avait donc développés cette patiente alors même qu’elle n’avait pas eu de contact connu avec des souris.

 
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