Manque d'infirmières, lits fermés, soignants épuisés... A l'hôpital, on craint "des vacances terrifiantes"
Jusqu’où ira la crise de l’hôpital public ? Depuis plusieurs semaines, partout en France, des établissements de santé ferment des services ou redéclenchent le plan blanc, deux ans et demi après le début de l’épidémie de Covid-19, faute de personnels. Dans le Nord, les hôpitaux de Roubaix et Tourcoing sont dans ce cas, à la suite d’un "absentéisme" historiquement élevé et à l’épuisement des professionnels. Les autres départements ne sont pas épargnés. "Le Covid a mis à mal un hôpital qui était déjà malade avant de rentrer dans la crise", a expliqué Frédéric Valletoux, président de la Fédération Hospitalière de France, sur franceinfo ce jeudi. "C'est la première fois qu'on voit au mois d'avril, au printemps, un absentéisme aussi fort", a-t-il déploré, se montrant particulièrement inquiet à l'approche de la période estivale. De son côté, Etienne Martinot, secrétaire départemental Force Ouvrière Santé dans le Pas-de-Calais, a prédis "des vacances terrifiantes" pour les hôpitaux français, si rien n'est fait pour éviter leur naufrage. A Paris, "on est perpétuellement sur la brèche, a indiqué le directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) la veille, mercredi 27 avril, au micro de franceinfo. La situation est vraiment difficile pour tout le monde. On ne tourne pas comme on devrait tourner. Les professionnels font un énorme travail pour ne pas refuser de patients, pour fonctionner 24h/24, mais dans des conditions anormalement difficiles." "Il nous manque 8% d’infirmières depuis six mois", a-t-il en effet expliqué, déplorant "une sorte de désaffection, de ras-le-bol, de difficultés, de fatigue depuis cet été". Conséquence : les fermetures de lits ont explosé. "D’habitude on a à peu près 4 ou 5% des lits qui ne sont pas ouverts parce qu’il y a un problème ponctuel ou qu’on désinfecte, etc. Depuis six mois, ça oscille entre 14 et 16%. On a 10% de lits de plus fermés." "On essaie de ne pas fermer de services, a assuré Martin Hirsch, mais il y a beaucoup de services qui la moitié, à peine deux tiers, de leurs lits ouverts." Selon le DG de l’AP-HP, le manque de personnels (arrêts maladie, postes vacants) touche d’autres pays européens, notamment nos voisins allemands. "A Berlin, le grand hôpital de la Charité avait 43% de leurs lits fermés au mois de janvier."
Début avril, le président de la commission médicale d’établissement (CME) de l’AP-HP, Rémi Salomon, lançait déjà l’alerte sur TF1, indiquant que "l’hôpital arrive à un point de rupture". Un drapeau rouge brandi à son tour par Martin Hirsch : "Le modèle sur lequel on a construit l’hôpital – qui était bien adapté à la fin du XXème siècle – n’est plus adapté aujourd’hui", a-t-il confié. "Depuis le début des années 2000 et le passage aux 35 heures, il y a un dérochage des salaires à l’hôpital qui m’a fait dire depuis des années que ça craquerait si on n’augmentait pas les infirmières", a-t-il reconnu. "Quand les infirmières sortant d’école préfèrent l’intérim plutôt que de prendre un emploi stable, c’est qu’il y a un problème […] C’est comme s’il y avait l’uberisation au milieu du statut de la fonction publique du XXème siècle", a-t-il analysé, constatant que malgré le Ségur de la santé, les revalorisations et les efforts d’adaptation, "la crise est toujours là, aigüe". "Visiblement, ça n’est pas suffisant." Un constat partagé ce jeudi par le président de la FHF qui a appelé à poursuivre les efforts du Ségur. Le directeur général de l’AP-HP a suggéré une réflexion sur l’hôpital, notamment à "repenser les statuts". "Les jeunes médecins ne sont plus attirés par la carrière de leurs prédécesseurs et on ne leur propose que cela." Réorganiser les congés Le président de la FHF a lui aussi interpellé le Gouvernement : "On voit des soignants qui sont partis pendant la crise Covid, ça n'était pas des vagues énormes, mais ça peut être plus important si demain on ne montre pas très vite qu'on prend le sujet à bras le corps." Ce dernier a réclamé dans un premier temps de réorganiser les congés. "Dans l'urgence, on ne va pas faire émerger 25 000 professionnels de santé, ça va prendre du temps, mais déjà on peut prendre des mesures".
Frédéric Valletoux a estimé nécessaire "d'organiser la permanence des soins avec la médecine de ville" et "d'organiser les vacances territoire par territoire pour que tout le monde ne parte pas en même temps", en particulier en août. "Je ne dis pas : 'Ne partez pas en vacances', je dis : 'Organisons les plannings'", a-t-il précisé. "On est capables, en France, d'organiser la permanence des boulangeries, mais on n'est pas capable d'organiser la permanence des médecins ?", a-t-il finalement lâché. [avec franceinfo]
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