
Médecins : 34 millions d'euros de fraudes à l'Assurance maladie détectées en 2024
Lors d'un point presse organisé ce jeudi 20 mars, la Caisse nationale de l'Assurance maladie a présenté les résultats de la lutte contre la fraude menée l'an dernier. En 2024, 628 millions d'euros de fraudes ont été détectées et stoppées. Si "les assurés représentent la majeure partie des fraudes" en nombre, "les enjeux financiers sont d'abord du côté des professionnels de santé de ville", a précisé le directeur de la Cnam, Thomas Fatôme.

628 millions d'euros. C'est le montant des fraudes à l'Assurance maladie qui ont été détectées et stoppées en 2024, en hausse de 35% par rapport à 2023 (467 millions d'euros). "C'est un nouveau chiffre record pour l'Assurance maladie qui traduit sa mobilisation très nettement renforcée", s'est satisfait le directeur général de la Cnam, lors d'un point presse ce jeudi 20 mars. Le montant du préjudice détecté et stoppé n'a, en effet, cessé d'augmenter ces dix dernières années, à l'exception de 2020 et 2021 (marquées par l'épidémie de Covid). Ces montants "dépassent très largement les objectifs qui nous ont été fixés dans la convention d'objectifs et de gestion", de 500 millions d'euros pour la seule année 2024, a souligné Thomas Fatôme.
Parmi ces 628 millions d'euros de fraudes détectées et stoppées par les services de l'Assurance maladie l'an dernier, 263 millions ont été évitées (+55% par rapport à 2023). "C’est-à-dire par exemple qu'on a réussi à détecter un arrêt de travail frauduleux avant de le payer" ou "à détecter une fausse société d'audioprothèse avec qu'elle n'agisse", a précisé Thomas Fatôme, devant la presse venue en nombre au siège de la Cnam pour assister à la présentation de ces résultats. Le directeur général a ajouté que l'objectif de l'Assurance maladie reste bien "d'agir le plus rapidement possible [sur la fraude], d'éviter d'être a posteriori dans des récupérations de montants indument versés qui sont difficiles".
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Nathalie Hanseler Corréard
Oui
Retraitée depuis la Covid. Mon vécu : ayant fait des semaines de 70H (5,5 J/sem) près de BX avec 4 gardes par an, puis déménagé à ... Lire plus
L'immense majorité de nos professionnels respectent les règles du jeu
Si, en nombre, les assurés représentent la majeure partie (52%) des fraudes et activités fictives détectées et stoppées en 2024, l'essentiel des montants détournés provient en réalité de professionnels de santé. "Un peu moins de 70% des montants de fraudes sont liés à l'activité de professionnels de santé en ville", a indiqué le directeur général de la Cnam ; contre 18% pour les assurés et 14% pour les établissements. "Les enjeux financiers sont d'abord du côté des professionnels de santé", a-t-il poursuivi, tout en insistant sur le fait que la fraude est le fait "d'une minorité" de soignants. "L'immense majorité de nos professionnels respectent les règles du jeu."

10 millions d'euros de fraude pour les médecins généralistes, en baisse de 47%
S'agissant des fraudes des assurés, dont le montant du préjudice détecté et stoppé s'élève à 109 millions d'euros, celles-ci sont pour près de 39% liées aux arrêts de travail (42 millions d'euros en 2024). Cela peut prendre la forme de faux avis d'arrêts de travail ou se caractériser par la transmission de faux bulletins de salaires, la falsification d'arrêts de travail prescrits ou encore d'une activité non autorisée. "Ce que l'on voit émerger ce sont les faux purs et durs, a signalé Thomas Fatôme. 30 millions des 42 millions de préjudice sont liés à de faux arrêts de travail". Un phénomène s'expliquant par une "recrudescence" des faux arrêts vendus sur les réseaux sociaux ou sur Internet. La Cnam se félicite toutefois d'avoir pu stopper 60% de ces faux arrêts "avant le versement des indemnités journalières".
On est passé d'une fraude artisanale et un peu opportuniste à une fraude beaucoup plus organisée
Un peu plus de 320 dossiers de fraudes pour les généralistes
Du côté des professionnels de santé, le préjudice financier s'est élevé l'an dernier à 416 millions d'euros, contre 330 millions en 2023 (+26%). Le secteur de l'audioprothèse est "un des blockbusters de la lutte contre la fraude", a appuyé Thomas Fatôme. Les fraudes aux audioprothèses représentent à elles seules 115 millions d'euros de préjudice (dont 88 millions de fraudes évitées), en hausse de +441%, selon la Cnam. En cause notamment : le 100% santé, qui "a ouvert un espace de fraudes très diversifiées, entre des fausses sociétés, des faux audioprothésistes sans diplôme, des facturations fictives en bande organisée entre, parfois, prescripteur, audioprothésiste et patient, et parfois également des patients évidemment d'agissements frauduleux et d'actes fictifs".
Viennent ensuite, par profession, les pharmaciens avec 62 millions d'euros de fraudes détectées, les infirmières (56 millions), les transporteurs (42 millions), les centres de santé pour lesquels 39 millions d'euros de fraudes ont été détectées en 2024 – essentiellement dans le champ du dentaire et de l'ophtalmologie, les médecins spécialistes (24 millions), les fournisseurs (18 millions), les kinés (17 millions), les dentistes (14 millions) et, enfin, les médecins généralistes, dont le montant du préjudice financier a atteint 10 millions d'euros en 2024 (en baisse de 47%).
Au total, sur 35 000 dossiers de lutte contre les fraudes ont été ouverts en 2024, dont 9500 concernant les professionnels de santé (2700 pour les audioprothésistes, 1300 pour les infirmières, 1100 pour les pharmaciens, et 322 pour les médecins généralistes).

Marc Scholler, directeur délégué de l'Assurance maladie chargé des finances, de la lutte contre les fraudes et de l'audit, a également avancé "l'arrivée" d'un nouveau type de fraudeurs, "bien souvent extérieurs au monde de la santé" qui "s'y greffent, comme des parasites". "On est passé d'une fraude artisanale et un peu opportuniste à une fraude beaucoup plus organisée, professionnalisée et avec des méthodes de plus en plus sophistiquées, a-t-il poursuivi. Ce sont des réseaux qui exploitent tous les potentiels et les nouvelles technologies, mais aussi les faiblesses humaines." Marc Scholler a cité, par exemple, le recrutement de mules pour certains trafics sur les réseaux sociaux, les méthodes de phishing, ou encore la falsification de documents (faux certificats, fausses ordonnances, fausses facturations…).
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