Le conventionnement sélectif, le politique en a rêvé plus d’une fois ! Et de nouveau avec le PLFSS 2023, via l'article 22 (aliénas 3 à 5), donnant à l'Assurance maladie et aux syndicats de médecins libéraux la possibilité de définir, dans le cadre conventionnel, "les conditions à remplir par les professionnels de santé pour être conventionnés, relatives à leur formation et expérience ainsi qu’aux zones d'exercice définies par l'ARS". Avenir Spé saisit la balle au bond en proposant une autorégulation de l’offre de soins spécialisés par la profession elle-même et plus précisément par les équipes de soins spécialisés (les ESS) devant, à l’échelle d’un territoire - a priori le département - organiser une équité d’accès aux soins spécialisés pour tous les habitants.
"Nous revendiquons une responsabilité populationnelle à l’échelle des territoires", indique le Dr Patrick Gasser, gastroentérologue libéral, président du syndicat Avenir Spé, au cours d’une conférence de presse. Et cette responsabilité passe par un conventionnement sélectif, géré par ces ESS afin d’organiser l’offre de soins spécialisés sur l’ensemble du territoire considéré. Un objectif ambitieux puisqu’il s’agit à terme de créer une ESS par spécialité par département en s’appuyant sur les compétences d’un géographe de la santé pour configurer au mieux l’offre en l’adaptant aux besoins de santé. Et de couvrir 100% d’un territoire quand l’offre de soins structurée via les CPTS laisse de nombreux "trous dans la raquette".
Concrètement, l’ESS constitue une communauté "sans mur". Elle fédère des spécialistes en mono ou multisites, organisés autour d’un noyau de professionnels œuvrant à son bon fonctionnement : secrétariat, équipe mobile, case-manager. La taille de l’ESS est modulable, dépendant de la spécialité, de l’incidence des pathologies, des besoins des patients et du nombre de spécialistes et des paramédicaux présents sur le territoire concerné.
Plusieurs expérimentations visant à démonter le bien-fondé des ESS sont actuellement en cours, notamment en cardiologie. Le Dr Marc Villaceque, président du Syndicat national des cardiologues, cite notamment les expérimentations en télécardiologie portant sur la prise en charge des patients insuffisants cardiaques et faisant intervenir des infirmières de pratique avancée formée à la réalisation des échographies. Par une telle organisation fondée sur une dynamique collaborative et l’alliance des compétences, un patient insuffisant cardiaque doit pouvoir accéder à l’expertise voulue, au bon moment, où qu’il réside sur le territoire concerné. Une ESS a ainsi pour objet de structurer les parcours de soins de plusieurs pathologies prises en charge par une même spécialité médicale et d’organiser leur prise en charge coordonnée par les acteurs des 1er, 2e et 3e recours.
Le mois dernier, Avenir Spé, avec les représentants de l’ensemble des spécialités adhérentes, a présenté à l’Assurance Maladie (représentée par son directeur général, Thomas Fatôme, et sa directrice déléguée, Marguerite Cazeneuve) et au ministère de la Santé (représenté par la directrice de l’offre de soins, Cécile Lambert), un cahier des charges permettant de structurer les ESS. Co-construit par les spécialités de terrain à partir des expérimentations en cours, ce cahier des charges permet de clarifier et de préciser un certain nombre de points concernant les ESS, notamment leur définition légale, leurs missions, leur dimensionnement, leur pilotage, leur gouvernance et enfin leur financement.
*Avenir Spé constitue avec le syndicat "Le Bloc", l’union syndicale "Avenir Spé – Le Bloc", premier syndicat des médecins spécialistes (40% des suffrages aux URPS 2021).
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