Implant cérébral d’Elon Musk : qu’en pensent les scientifiques de l’Inserm?
Si aucune avancée scientifique réelle n’a été dévoilée par Elon Musk lors de la présentation de l’implant cérébral Neuralink, cette innovation s’inscrit dans une dynamique porteuse d’espoirs. Début Septembre, le milliardaire américain Elon Musk présentait en grande pompe, lors d’une conférence de presse, sa nouvelle invention, à savoir un implant cérébral mis au point par la société Neuralink, et doté d’une technologie qualifiée de « révolutionnaire » qui est sensée améliorer la prise en charge de nombreuses pathologies cérébrales, et d’améliorer les capacités de notre cerveau. Alors réelle avancée scientifique, ou coup de com’ ? De la taille d’une pièce de 2 euros, et facilement implantable dans le cerveau grâce à un nouveau robot développé également par la compagnie, l’implant Neuralink, qui fonctionne grâce à une technologie bluetooth représente, selon Elon Musk, la dernière génération des « interfaces machine-cerveau ». Mais, selon les spécialistes de l’Inserm, peu de réelles nouveautés ont été présentées lors de cette conférence de presse ; et la portée de cet implant, tel qu’il a été présenté, « semble encore en fait assez réduite ». Le seul élément scientifique tangible a été l’enregistrement de l’activité cérébrale observée chez un porc implanté. Mais « la possibilité d’enregistrer l’activité des neurones grâce à un implant cérébral, comme cela a été fait chez l’un des animaux testés, n’est pas nouvelle. Elle a déjà été démontrée par de nombreux autres groupes de recherche ». Et plusieurs publications ont été réalisées sur ce sujet. Une dynamique prometteuse L’objectif des « interfaces cerveau-machine » est de court-circuiter une lésion ou une insuffisance cérébrale, pour traiter des personnes souffrant, par exemple, de handicap moteur, ou autre trouble neurologique… Le concept est basé sur la possibilité de transmettre un ordre cérébral à une machine (par exemple une prothèse ou un exosquelette, mais également un implant rétinien ou encore un logiciel de voix artificielle…), via l’implant. Les recherches dans ce domaine se multiplient. Cependant, pour l’Inserm, « les données présentées par Elon Musk suggèrent que son équipe n’est guère plus avancée que d’autres groupes ». On peut citer ainsi le dispositif créé et publié en...
2013, par une équipe américaine (Pittsburgh) apportant une « preuve de concept » qu’un dispositif implanté à la surface du cerveau permettait de guider un bras robotisé. A la même période, un autre groupe américain a démontré l’intérêt des implants profonds miniaturisés. Plus récemment, deux patients tétraplégiques ont réussi commander un exosquelette grâce à des implants de surface, selon des recherches françaises (Grenoble), sans pour autant réussir à marcher. Limiter les risques liés à l’implantation Au final les recherches de Neuralink ne semblent pas avoir faire progresser une des problématiques majeures qui se posent dans ce domaine qui est de pouvoir insérer sans risque ces implants dans un organe aussi fragile que le cerveau. Il s’agit en effet de « faire pénétrer dans le cerveau des implants à très haute densité pour capter l’activité cérébrale dans toute sa complexité, et pour les y laisser à long terme sans provoquer de réaction inflammatoire ou de lésions » explique l’Inserm, dans un texte rédigé avec le soutien de François Berger, Directeur du BrainTech Lab (Inserm U 1205). Elon Musk mise sur une implantation mini-invasive robot-assistée, l’implant étant alors placé soit à la surface du crâne, soit juste sous la boîte crânienne. Cependant, Jusqu’à présent, cette technologie ne permettait pas de mesurer avec précision l’activité cérébrale et sa complexité architecturale, contrairement aux procédés d’implantation plus invasifs (directement dans le cortex), qui permettent d’enregistrer des signaux neuronaux avec une très grande précision spatiale, mais au risque de complications et d’une perte de signal à long terme. Absence de preuve Elon Musk affirme que Neuralink a évité ces deux types d’écueils mais sans donner de détails sur la technique et le fonctionnement de son robot. Or, « pour que ces innovations aient réellement un impact pour les patients, la recherche ne peut pas se passer d’investigations solides au long cours, d’expérimentations en laboratoire pour évaluer la biocompatibilité ou d’évaluations par les pairs » commente l’Inserm. L’organisme scientifique conclut en insistant sur la prudence « quant à de possibles dérives éthiques [qui] doit continuer à guider la recherche sur les interfaces cerveau-machine, en tenant toujours compte de la complexité du cerveau, qui ne peut se résumer à une circuiterie électronique dopée par l’intelligence artificielle ».
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