Céphalées : identifier les situations d’urgence

16/11/2023 Par Muriel Pulicani
Neurologie JNMG 2023
Il importe de savoir différencier les céphalées pour apprécier leur sévérité et leur caractère d’urgence.  

 

Le diagnostic étiologique d’une céphalée passe avant tout par l’interrogatoire du patient, pour connaître l’ancienneté de la douleur, son mode d’apparition (brutal ou progressif), son caractère habituel ou non, son évolution (amélioration, aggravation…), le nombre de crises par mois (épisodiques ou quotidiennes), les facteurs déclenchants (effort, orgasme, post-partum, émotion, prise ou arrêt d’un médicament, toxiques, facteurs hormonaux…) et la présence de pathologies ou signes associés : vomissements, fièvre, infection, déficit neurologique, troubles visuels, douleur cervicale, lombaire … 

Le caractère ancien et habituel oriente vers une céphalée primaire, une survenue récente et inhabituelle, ou vers une céphalée secondaire. Dans ce deuxième cas, "il faut faire une imagerie en urgence, car la majorité des céphalées secondaires sont d’origine neurovasculaire et à risque d’aggravation et de complications", a alerté la Dre Caroline Roos, neurologue au centre d’urgence des céphalées de l’hôpital Lariboisière (AP-HP), lors d’une session neurologie des JNMG. 

 

Céphalée primaire : réduire le nombre de crises  

80% des céphalées sont des céphalées primaires, qui regroupent notamment les migraines avec ou sans aura (15% de la population), la céphalée de tension (30%) et l’algie vasculaire de la face. Les migraines sont définies par la classification internationale des céphalées - 3ème édition (ICHD-3) : au moins cinq crises par mois durant 4 à 72 h, ayant au moins deux des caractéristiques suivantes : topographie unilatérale, pulsatile, douleur modérée ou sévère, aggravée par l’activité physique de routine, et accompagnées de nausées et/ou vomissements et/ou photophobie et/ou phonophobie. L’examen physique est normal et ne donne pas lieu à exploration. 

Le traitement est spécifique du type de céphalée. "Le traitement de crise n’a pas beaucoup changé avec le temps", a commenté la Dre Roos, saluant toutefois les anticorps anti-CGRP "qui ont tous des niveaux de preuve d’efficacité très élevée" dans la migraine chronique. 

L’impact de la migraine sur la qualité de vie est évalué avec l’échelle HIT-6 et la comorbidité anxio-dépressive, avec l’échelle HAD. "Ces pathologies doivent être prises en compte de façon concomitante, en adressant le patient à un psychiatre", a indiqué Caroline Roos. Un traitement de fond peut être instauré. "L’objectif malheureusement n’est pas de guérir le patient mais de diminuer la fréquence des crises." 

 

Céphalée secondaire : traiter la cause et la douleur 

Toute modification récente d’une céphalée chronique fait suspecter une céphalée secondaire. Cette dernière peut constituer le symptôme de pathologies parfois graves, le syndrome méningé et le syndrome d’hypertension intracrânienne (HTIC) relevant de l’urgence vitale. Des examens doivent être réalisés en urgence : imagerie cérébrale, angiographie cérébrale et/ou cervicale, ponction lombaire en l’absence de diagnostic, parfois complétés par des examens biologiques, ophtalmologiques... "Le profil du patient et le contexte de survenue de la céphalée peuvent aider dans la démarche exploratoire : un sujet âgé évoque une maladie de Horton ; une fièvre, une méningite ; une contraception orale, une thrombose veineuse cérébrale… ", a illustré la Dre Roos. 

Les principales causes de céphalées récentes à début brutal sont l’hémorragie sous-arachnoïdienne (10 à 30% des cas, dus pour 85% d’entre eux à la rupture d’un anévrisme intracrânien) et le syndrome de vasoconstriction cérébrale réversible (10 à 45% des céphalées en coup de tonnerre vues aux urgences). Les céphalées récentes d’aggravation progressive peuvent être dues – entre autres – à une méningite ou méningo-encéphalite, un syndrome d’hypertension ou d’hypotension intracrânienne, une intoxication au monoxyde de carbone, des traitements médicamenteux (inhibiteurs de la phosphodiestérase, dipyridamole, dérivés nitrés, anticalciques sauf flunarizine…), une apnée du sommeil, une dysthyroïdie... 

La prise en charge comprend un traitement symptomatique par antalgique non spécifique (paracétamol, néfopam) et un traitement étiologique de l’affection décelée. 

 

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