Christophe Castaner, porte-parole du Gouvernement, a annoncé au micro de Jean-Jacques Bourdin que le tiers payant généralisé (TPG) serait bien mis en place au 1er décembre 2017. Une déclaration qui a ulcéré l'Union française pour une médecine libre (UFML). Le mouvement dirigé par le Dr Jérôme Marty prépare une grève illimitée à compter du 1er décembre prochain. Le Dr Marty s'explique sur Egora.
Pourquoi cette grève illimitée à compter du 1er décembre 2017 ? Dr Jérôme Marty : Nous avons vu les positions changeantes d'Agnès Buzyn ou du Premier ministre, qui ont annoncé dans un premier temps qu'ils n'étaient pas trop fans de l'obligation du tiers payant puis qui sont revenus sur leurs déclarations quelques semaines plus tard. Ils ont alors expliqué qu'au contraire, il s'agissait d'une loi sociale importante qui permet de diminuer les inégalités d'accès aux soins. Nous avons l'impression qu'ils reprennent les vieux discours de Marisol Touraine et qu'ils veulent nous resservir un tiers payant généralisé obligatoire. Le Premier ministre ou la ministre de la Santé parlent désormais du tiers payant comme d'un droit pour tous les Français. Cela signifie donc pour les médecins, obligation de pratiquer le tiers payant puisque si c'est un droit, la personne qui ne le fait pas se met, de fait, hors la loi. Nous avons toujours lutté contre le tiers payant généralisé obligatoire. Nous craignons avec ce système l'assujetissement à l'Assurance maladie, qui est devenue aujourd'hui organisatrice du soin. Le tiers payant peut aussi servir à désengager progressivement l'Assurance Maladie, à faire monter les complémentaires. Nous risquons de nous retrouver dans des réseaux de soins. Nous appelons les confrères à être extrêmement méfiants. Ce tiers payant mettrait fin à la façon d'exercer la médecine libérale dans ce pays. Deux rapports, l'un de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'autre de l'Assurance maladie sont en préparation sur les modalités d'application du tiers payant. Pensez-vous qu'ils pourront changer la donne ? Non. A la différence des syndicats, dont nous avons vu que -globalement- tous ont salué les positions d'Agnès Buzyn, nous sommes extrêmement méfiants depuis le début. Je pense que nous avons tout à craindre de la ratification de toutes les lois Touraine. Je n'ai pas vu qu'elle comptait revenir sur les groupements hospitaliers de territoire, ni sur le tiers payant généralisé… Certes, il faut lui laisser un peu de temps, nous allons donc lui laisser jusqu'à la rentrée. Notre grève sera conditionnée à l'officialisation des propos du porte-parole du gouvernement Christophe Castaner, qui a dit que le tiers payant généralisée serait mis en place au 1er décembre, faisant fi de ce fameux rapport de l'Igas. Je rappelle d'ailleurs au sujet de ce rapport qu'il avait déjà eu lieu en 2013, sous les mêmes questions. C'est absurde. Au départ, vous étiez satisfait de la nomination d'Agnès Buzyn… Nous le sommes toujours, cela ne peut pas être pire que Touraine. En plus il s'agit d'une consœur, donc nous devons lui faire confiance. Mais sur un point aussi grave dans ses conséquences potentielles que le tiers payant généralisé, nous ne pouvons pas nous perdre en confiance. Nous sommes obligés de préparer le coup d'après. Ce serait trop grave de donner gage, de rester les bras croisés et attendre puis de se dire "mince, on s'est fait avoir". Il n'y a rien de plus important que l'indépendance des médecins. Comment jugez-vous les deux premiers mois d'Agnès Buzyn ? Je les juge de manière assez floue. C'en est de même pour la politique de Macron en général, d'ailleurs. On ne sait pas trop où on va. Il y a toutefois une nette amélioration par rapport au gouvernement précèdent. Cela ne pouvait pas être pire. Nous avions Marisol Touraine qui était une ministre férue d'affaires sociales mais qui ne connaissait rien à la santé. Nous avons maintenant une experte de la santé qui ne connaît rien aux affaires sociales. Nous pouvons craindre que l'entourage n'ait pas changé et qu'il y ait une pression politique qui se fasse sur la partie affaires sociales et finances. Quelles solutions pour permettre un meilleur accès aux soins ? Il y a beaucoup de maisons médicales vides, aujourd'hui. C'est une des solutions mais ça n'est pas la solution. Il faut revoir la gouvernance des soins. Elle doit être tripartite, à parité de pouvoir entre l'Etat, les représentants de soignants et de patients. Il faut mettre en place une vraie démocratie sanitaire. Et il faut rouvrir la thématique des rémunérations. On ne peut pas imaginer que les médecins de France soient toujours au plus bas de la moyenne européenne. Il va falloir que l'on ose sortir l'enveloppe tarifaire de l'ONDAM. On a une enveloppe tarifaire qui représente 11% des dépenses de l'Assurance maladie. Il faut oser sortir ça de l'ONDAM. Il faut forcer le politique à définir clairement ce qu'est le coût de l'acte et arrêter de se cacher derrière l'ONDAM.
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