Le premier sujet abordé en séance thématique, le 22 novembre dernier, lors de la réouverture des négociations conventionnelles a été celui du médecin généraliste traitant… Rien d’étonnant à l’heure où près de 7 millions de Français en sont dépourvus. Celui-ci sortira-t-il renforcé de la nouvelle convention 2024-2029 alors que, vingt ans après sa création, le concept ne fait plus tout à fait l’unanimité ? En octobre dernier, le think tank Lisa (Laboratoire d’idées santé autonomie) interrogeait la pertinence de ce dispositif dans une tribune qu’Egora avait reproduite dans son intégralité : "La médecine générale ne gagnerait-elle pas à s’affranchir de la notion de médecin traitant ?". Car pour le Dr Patrick Gasser, vice-président de Lisa et président d’Avenir Spé, "le médecin traitant ne peut plus être le gatekeeper de l’organisation des soins sur l’ensemble du territoire". Un pavé dans la mare, qui n’a pas manqué de faire réagir. "S’il n’y avait plus de médecin traitant, cela poserait beaucoup de difficultés et amplifierait les inégalités de santé, met en garde le Pr Paul Frappé, président du Collège de la médecine générale. Même si cela peut paraître une contrainte, les délais d’attente vers les médecins spécialistes seraient en réalité plus compliqués sans adressage." File active : +5% Selon la Cnam, les généralistes comptaient, en moyenne en 2022, 1 710 patients dans leur file active (soit 5% de plus qu’en 2016) et étaient le médecin traitant de 997 patients adultes (soit 8,5% de plus qu’en 2016). "Si on brade le parcours de soins, c’est le système entier qui s’écroule, et le risque, c’est la privatisation et la financiarisation, argumente pour sa part la Dre Agnès Giannotti, présidente de MG France. Nous aurons une convention réussie si nous redonnons de l’attractivité à la fonction de médecin généraliste traitant et si l’articulation entre le premier et le second recours permet de répondre aux besoins de soins de la population." C’est aussi ce que défend la CSMF : "Le médecin traitant, c’est le chef d’orchestre car il travaille en collaboration avec d’autres et il coordonne, résume son président, le Dr Franck Devulder. C’est pourquoi la question de son attractivité est essentielle dans la convention." L’exécutif a également souhaité mettre au menu des discussions les notions de qualité et de pertinence. Consommations de benzodiazépines, inhibiteurs de la pompe à protons, antibiotiques, antidiabétiques et analgésiques ont été examinées à la loupe… ce qui n’a pas manqué de retenir l’attention des syndicats de pharmaciens. Ceux-ci ont ainsi réclamé et obtenu que les négociations sur leur propre avenant conventionnel se tiennent en parallèle de celles des médecins. Pour l’heure, la Cnam n’a pas mis d’autres négociations à son agenda. Mais certains s’impatientent, en particulier les structures pluriprofessionnelles. "La convention médicale de 2024, même si elle est par définition monoprofessionnelle, serait une réussite si elle renforçait les équipes de soins primaires, espère le Dr Pascal Gendry, président d’AVECsanté, la fédération nationale des maisons de santé (MSP). Mais il faut aussi que les négociations des autres professions aboutissent et surtout un nouveau round pour les négociations de l’accord conventionnel interprofessionnel (ACI) des maisons de santé." "Trois ans de retard" Le calendrier sur la prochaine convention médicale a été établi jusqu’à fin janvier 2024. "Aujourd’hui, les négociations se passent bien, car, dans la méthode et dans la forme, il y a davantage d’écoute et de respect mutuel, constate Franck Devulder. Mais on sait qu’on n’est pas encore entré dans le dur." Thomas Fatôme devrait mettre cartes sur table au sujet des revalorisations le mois prochain. Au rythme où vont les choses, les syndicats sont raisonnablement optimistes sur une signature au début du printemps, soit avec près de trois ans de retard sur le calendrier et avec une mise en application des revalorisations pas avant l’automne. "C’est presque antinomique avec l’attractivité", souligne le président de la CMSF, qui a demandé au ministre de la Santé de faire sauter les délais de six mois des stabilisateurs économiques. Les autres papiers du dossier :
- Grand âge : un projet de loi avant l’été
- L’impatience gronde chez les médecins hospitaliers
- IPA, pharmaciens, médecins... cohabitation sereine ou conflit latent ?
La sélection de la rédaction
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