Egora.fr : Quelle est la situation dans l'île ? Dr Christine Kowalczyk : Nous interpellons le Gouvernement sur la situation de la santé à La Réunion. Les professionnels de santé se sont fédérés en inter-URPS, en inter-syndicats pour pouvoir mesurer l'impact économique du mouvement des Gilets jaunes sur notre activité. Les points de situations qui nous parviennent nous informent que pour 92 % d'entre nous, l'activité a été impactée par les barrages mis en place depuis mardi dernier. La vie a un peu repris depuis cette date, mais il règne un énorme sentiment d'insécurité : cinq pharmacies ont été vandalisées, des cabinets de kinésithérapie aussi, des professionnels ont été agressés. Des médecins ont fermé par crainte d'être bloqués mais ce qui ressort de tous les mails que nous recevons, c'est l'énorme sentiment d'insécurité. C'est du vandalisme pur. Une pharmacie a été complètement pillée, c'était du cambriolage.
Quelles sont les conséquences pour la population ? Aujourd'hui, notre activité est largement en baisse Pas uniquement pour les cas aigus, aussi pour les renouvellements de prescriptions. Mais comme les barrages se sont de nouveau durcis dans certaines régions, il y a plusieurs types de pénuries : de médicaments, de médecins qui n'arrivent pas à gagner leur cabinet et aussi d'essence. On a réquisitionné des pharmacies, mais elles ne voient personne car les patients ont peur, ils sont dans une grande insécurité. Nous sommes solidaires du mouvement des Gilets jaunes, on trouve qu'il y a vraiment trop d'inégalités, mais ce mouvement n'est pas contrôlé, il y a des voyous et il entrave trop la circulation des personnes. Par prudence, les gens ne sortent pas car ensuite, ils sont bloqués. Nous n'avons plus d'essence et certains commerces alimentaires n'ont plus de denrées. Des gens n'ont plus rien à manger. Mais je ne veux pas axer mon propos sur les voyous. Après les événements de la semaine derniere, c'est maintenant notre libre circulation qui est entravée. De ce point de vue, la situation s'est durcie ? Oui. Nous avons plus de barrages que la semaine dernière. Nous en avions 20 ce week-end, il y en a 40 aujourd'hui. Les professionnels de santé qui avaient l'habitude de faire des visites – les médecins en font peu à La Réunion – nous disent qu'ils ne peuvent plus les faire. Une patiente âgée m'a dit que son infirmière n'a pas pu venir depuis deux jours, car elle n'a pas réussi à passer les barrages et qu'ensuite, elle n'avait plus d'essence. Les Gilets jaunes sont entrés dans les collèges pour les fermer. Mes enfants ne sont pas allés à l'école depuis 10 jours. C'est l'anarchie, tous les services administratifs sont fermés et le Gouvernement ne dit rien.
Comment voyez-vous les prochains jours? La venue d'Annick Girardin, mercredi*, risque-t-elle de calmer un peu les choses ? Les Gilets jaunes annoncent un renforcement du mouvement jusqu'à mercredi, qui sera l'apothéose. On a un peu peur. Aujourd'hui, la moitié de mes patients sont au chômage technique. Le Medef, les artisans demandent au mouvement de réfléchir à la méthodologie. Mais si les mesures annoncées ne conviennent pas, comme le mouvement est en roue libre, non contrôlé, il ne sera pas près de s'arrêter.
La CSMF a relayé, dans un communiqué, l'appel des médecins réunionnais, plongés dans une "situation grave et urgente", qui demandent au Gouvernement d'agir au plus vite pour que la situation rentre dans l'ordre.
Réunis en une intersyndicale, les syndicats de santé réunionnais pressent le Gouvernement d'agir, les déplacements au domicile des patients étant difficiles et voire impossibles dans certains secteurs. "Certains professionnels de santé ont été agressés et leurs cabinets ou officines ont été vandalisés", témoignent-ils. Ils demandent au Gouvernement "un moratoire sur les charges, voire une suppression totale de celles-ci sur les mois de novembre et décembre 2018 afin de préserver une activité pérenne et surtout préserver le travail de nos employés de cabinets ou d’officines".
*Mis à jour le 27 novembre à 10 h 15
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M A G
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Mais quelle mentalité de geôlier, que de vouloir imposer toujours plus de contraintes ! Au nom d'une "dette", largement payée, co... Lire plus