“Tous aux Urgences, la HAS ne pourra y voir d'inconvénients” a réagi Bb40 ; “Étonnant” pour Christophxkrs ; “Les parents vont chez le kiné même le week-end. Il y a un suivi et au moindre signe d'alerte de dégradation, une décision est prise. Laissez les parents démunis face à un nourrisson qui tousse et s'encombre implique un retour aux urgences illico. Ou trop tard”, souligne F.mg ; “D'accord avec ces recommandations pour les formes graves et bénignes de la bronchiolite, mais dans les 24/48h qui demande de la surveillance, qui est la personne la mieux placée pour surveiller, éduquer et rassurer les parents sinon le kiné ?”, relève de son côté Yvesturlin. Lecteurs d’Egora.fr, vous êtes nombreux à avoir réagi et exprimé votre étonnement suite aux nouvelles recommandations de prise en charge du premier épisode de bronchiolite aiguë chez le nourrisson de moins de 12 mois de la HAS qui ne fait pas figurer la prise en charge kinésithérapique. Les syndicats et l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes sont montés au créneau pour dénoncer la méthode retenue pour réaliser ces recommandations et surtout, leur mauvaise interprétation. Le président de la Fédération Française des Masseurs Kinésithérapeutes Rééducateurs, Sébastien Guérard, s’explique. Egora.fr : Dans un communiqué, vous évoquez une mauvaise interprétation des recommandations. Que voulez-vous dire ? Sébastien Guérard : Ce n’est pas parce que la HAS ne recommande pas qu’elle contre-indique. La HAS va recommander une pratique à partir du moment où elle est étayée scientifiquement. Aujourd’hui, on reconnaît que le drainage bronchique ne l’est pas. Pour autant, il n’est pas contre-indiqué. S’il y a bien une chose qui est prouvée, c’est que sur les formes moyennes à modérées de bronchiolite, il n’est pas néfaste. Ensuite, on a tendance à noyer toute la kinésithérapie et la réduire uniquement à cette pratique. On oublie tout le versant éducatif, prophylactique et préventif de la kinésithérapie. 97% des patients souffrant de bronchiolite passent par le kiné libéral. Or, on s’est concentrés sur les 3% d’enfants hospitalisés pour donner ces recommandations qui finalement ne concernent que des cas “exceptionnels” de petits hospitalisés. Malheureusement, il n’existe pas d’étude complète à ce jour. Les seules structures qui ont les moyens de fournir des études suffisamment puissantes, ce sont souvent les services de pédiatrie hospitalière parce qu’il y a un financement derrière. Mais nous ne parlons donc pas des...
mêmes malades. Nous parlons effectivement bien de la même maladie, mais à une phase différente.
Quelques études réalisées par des kinés ont fleuri ces dernières années, mais elles ne sont pas suffisamment concluantes dans la mesure où elles ne sont pas suffisamment puissantes. Elles ne concernent pas assez de cas parce qu’elles sont souvent mono-centrique, c’est-à-dire que c’est un kiné spécialisé qui va mener l’étude dans son cabinet. Pour que l’étude ait de l’intérêt sur le plan scientifique, il faut qu’elle soit parfaitement reproductible et aux quatre coins du territoire. Donc autant d’éléments qui font que ces études ne sont malheureusement pas retenues dans les travaux de la HAS. Vous contestez également la méthodologie des recommandations de la HAS. Pourquoi ? Lors des concertations, il n’y a eu que cinq ou six experts kinésithérapeutes contre quatorze ou quinze médecins autour de la table qui ont finalement parlé de pratiques qu’ils ne connaissent pas et ne pratiquent pas au quotidien. On sait que dans le groupe d’experts, il y avait deux écoles qui se sont affrontées. L’une de ces écoles était favorable à la prise en charge kinésithérapique du nourrisson et l’autre, complètement allergique. Certains experts en sont même venus à tirer des conclusions sur des techniques - notamment celle du “clapping” -, qui sont totalement révolues et qu’on ne pratique absolument plus depuis 30 ans. Or, elles apparaissent dans ces recommandations. C’est comme si en médecine générale, on parlait encore de la saignée ! À mon sens, méthodologiquement, ce n’est pas comme ça qu’on fait...
avancer la bonne pratique dans une discipline. D’autant que pour avoir du poids et de l’importance, une recommandation de la HAS doit avoir autour de la table des représentants des usagers. Ce qu’on déplore sur cette recommandation, c’est que les seuls grands absents… étaient les usagers ! Le centre de la recommandation qui devait être “la prise en charge du nouveau-né lors du premier épisode aigu de bronchiolite”, c’est finalement des conclusions qui ne concernent quasiment que la kinésithérapie et pas le reste de la prise en charge… Et elles aboutissent sur des recommandations qui ne concernent que la kinésithérapie. Quelle est la spécificité de la prise en charge kinésithérapique dans les cas de bronchiolites ? Ce que propose la kinésithérapie en libéral, c’est d’éviter des complications des formes modérées à moyennes. Au-delà de l’aspect éducatif sur le mouchage du bébé, la surveillance de l’alimentation et la prévention des risques, le kinésithérapeute accompagne les parents et les rassurent. Ils surveillent la saturation des petits patients. Nous nous y fions énormément pour mesurer le niveau d’atteinte et d’encombrement, et on sait que ça peut leur apporter confort et mieux-être. Cette prise en charge permet surtout d’éviter un taux de recours aux urgences important. Nous déplorons d’ailleurs des publications qui tombent en plein mois de novembre, à la veille de l’épidémie. C’est une mauvaise idée. Les parents vont être perdus, ne vont plus savoir quoi faire et la première chose sur laquelle ils vont se jeter, ce sont les urgences. Mais encore une fois, 97 % des enfants n’ont pas besoin d’y aller. Est-ce une dévalorisation du métier de kiné ? Je ne sais pas s’il faut aller jusque-là dans le propos. Je ne pense pas que ce soit du "kiné-bashing" et de toute façon, à la fin, c’est souvent l’usager qui a raison. On sait qu’ils se tournent naturellement vers les kinés. Ils ont l’expérience et voient le comportement de leur enfant qui est clairement soulagé après la prise en charge. Chaque année, 400 000 enfants sont touchés par la bronchiolite.
Karine, pratiquant la kiné respiratoire depuis plus de 20 ans sur les enfants sur les bébés, n’a constaté aucune annulation dans son cabinet depuis deux semaines. “Pour les parents, la kiné respiratoire agit sur le bien-être de leurs enfants, la nourriture, le sommeil… Il n’y a pas débat. Les cabinets de pédiatres sont déjà remplis, les urgences sont remplies alors qui surveille les enfants ? C’est nous. Nous prenons la saturation pour savoir si le bébé va bien ou s’il faut, au contraire, l’envoyer à l’hôpital. Nous leur donnons aussi des conseils”, explique-t-elle. “Beaucoup d’enfants ne terminent pas à l’hôpital parce qu’on a été là. D’autant qu’on a mal lu les recommandations. Elles portent sur les bébés de moins de 12 mois ayant un premier épisode de bronchiolite sévère, c’est-à-dire hospitalisé et sous oxygène. À ce stade, évidemment qu’on ne fait pas de kiné respiratoire. Mais cela concerne, encore une fois, 3% des bébés.”
Celle qui se fait appeler “Tata Karine” sur les réseaux sociaux tient également à apporter une précision. “Aujourd’hui, on utilise le terme bronchiolite pour tout et n’importe quoi : les bronchites, les bronchites asthmatiformes, l’asthme chronique du nourrisson… La plupart des cas qu’on a en cabinet ne concernent pas la bronchiolite, mais toutes ces pathologies. Les recommandations ne prennent pas non plus en compte son évolution ces dernières années. Avant, les bronchiolites étaient très sifflantes alors que maintenant les enfants sont très glaireux. Le prise en charge par les kinés permet de faire en sorte que le bébé soit désencombré et puisse respirer normalement.” Elle souhaiterait enfin que tous ceux qui pratiquent la kiné respiratoire soient plus formés. “On est assez peu à s’occuper d’enfants. La pédiatrie est vraiment spécifique. Pour être crédibles, il faut vraiment savoir de quoi on parle.”
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