"La rémunération à l'acte bloque le développement des coopérations" entre professionnels de santé, estime la HAS
Article initialement publié sur le site Concours pluripro Peut mieux faire ! Alors que les coopérations et le partage des tâches entre professionnels de santé peuvent constituer "une réponse pertinente" aux "multiples défis du système de santé (accès aux soins, attractivité des métiers, amélioration de la qualité…)", sur le terrain, il y a peu d'avancées en la matière. Dans un communiqué publié ce mercredi, la Haute Autorité de santé réaffirme son plaidoyer en faveur d'un "cadre rénové créant les conditions favorables au développement des nouvelles formes de coopération", tout en regrettant que le recours aux protocoles de coopération et au partage de tâches "reste limité". Fin 2023, seuls 57 protocoles nationaux de coopération avaient été autorisés, rapporte la HAS. Ces derniers ont permis "en 2022 à un peu plus de 400 000 patients de bénéficier de près de 600 millions d’actes délégués". Un résultat "d'autant plus remarquable", estime-t-elle, que "très peu d’événements indésirables ont été rapportés (0,12 %) et qu’aucun événement indésirable grave n’a été déclaré". Moins de 10% de ces patients (9,1%) ont été réorientés vers les délégants dont, plus du tiers, pour les protocoles d’échographie entre radiologues et manipulateurs en électroradiologie médicale. Si la satisfaction des patients n'a pas été évaluée, "celle des professionnels impliqués se révèle dès aujourd’hui acquise", assure-t-elle. De plus, 106 protocoles locaux ont été autorisés "et très peu ont évolué vers une application nationale", note la HAS qui estime que des "obstacles organisationnels et financiers" freinent les retombées attendues. Pour preuve, cite l'instance, elle a donné un avis favorable sur le protocole de coopération entre médecins et infirmières pour la prise en charge à domicile des patients âgés ou en situation de handicap et en difficultés pour se déplacer aux cabinets des médecins, mais 21 mois plus tard, "la rémunération du protocole n’est pas fixée" *. Enfin, à fin 2022, seules 1.718 IPA étaient diplômées… "loin de l’ambition affichée : 5 700 diplômés en 2027". Ainsi, à ce jour, "nous n’avons pas atteint tous les objectifs attendus d’amélioration de la prise en charge des patients, d’attractivité des métiers de la santé et de réponse aux tensions sur l’offre de soins". Et ceci, "alors même que la création des CPTS et les potentialités du numérique en santé offrent des opportunités nouvelles pour des coopérations et des partages de tâches, adaptées à chaque territoire", regrette la HAS. Il faut donc "lever les principaux obstacles" : les complexités administratives pour mettre en œuvre les protocoles de coopération ; l’insuffisance ou l’absence de financement dédiés ; l’absence de soutien aux équipes qui veulent s’engager ; ou encore le nombre réduit de compétences partagées. Opérer "un puissant changement de logiciel" Aujourd'hui, il faut "opérer un puissant changement de logiciel", assure la HAS. Ainsi, la "vie administrative" des protocoles de coopération doit être simplifiée, à travers notamment un cahier des charges national élaboré par la HAS et mis en application par les ARS pour "examiner plus rapidement les demandes de protocoles sans compromis sur la qualité et l’efficacité". Il faut également soutenir les équipes car les moyens sont "inégalement offerts" : les ARS doivent donc mobiliser plus fortement les ressources d’appui nécessaires au sein de chaque agence ou déléguer contractuellement, avec un financement dédié, le soutien méthodologique aux structures d’exercice coordonné.
De plus, la rémunération à l’acte "bloque le développement des coopérations", assure la HAS, qui milite pour la création d'un forfait de coopération "suffisamment valorisant pour tous, le cas échéant dans le cadre de négociations avec l’Assurance maladie". Pour preuve, "des expérimentations montrent que cela est tout à fait possible, et ce d’autant plus que les structures d’exercice collectif ou les CPTS peuvent faire office de garant méthodologique et de la répartition du forfait de coopération". Ainsi, les collaborations entre professionnels de santé doivent être développées "parce qu’elles assoient la crédibilité du 'virage ambulatoire'", répondent à l’objectif d’amélioration continue de la qualité des soins et favorisent la cohésion des équipes mobilisées. D'autant que les partages de tâches et les protocoles de coopération permettent d’intégrer les innovations technologiques et favorisent les innovations organisationnelles. * Michel Michel Varroud-Vial, conseiller coopérations interprofessionnelles à la DGOS, nous a confirmé en octobre dernier la mise en place d'un forfait de "370 euros par an et par patient, cumulable avec les actes habituels pour les médecins et les infirmières". L'arrêté n'a pas encore été publié.
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