Loi Kouchner : 20 ans et pas une ride

04/03/2022 Par Dr Alain Trébucq
En ce 4 mars 2022, tous ceux qui ont porté la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades s’étaient donné rendez-vous au ministère de la Santé pour en fêter le 20e anniversaire lors d’un colloque organisé par l’Institut Droit et Santé. Au premier rang, Bernard Kouchner bien sûr, qui a donné son nom à cette loi, et aussi Didier Tabuteau, alors directeur de cabinet du ministre de la santé et désormais vice-président du Conseil d’Etat, donc premier fonctionnaire de France, dont chacun s’accorde à dire qu’il est celui qui a inspiré cette loi et l’a portée jusqu’à sa publication.
 

En sa qualité d’hôte, Olivier Véran ouvrait le colloque en rappelant le choc que fut cette loi lors de sa promulgation. Il était alors en 4e année de médecine et se souvient des drames qu’elle suscitait parfois dans un monde médical qui, pour reprendre les termes de Bernard Kouchner, « perdait sa majesté ». Les malades étaient enfin reconnus comme des personnes à part entière, avec des droits, à commencer par celui de l’accès au dossier médical, mais aussi de pouvoir revendiquer des explications afin de partager la prise de décision médicale concernant ce bien suprême qu’est la santé. Cette loi du 4 mars 2020, c’est aussi la représentation des usagers dans la conception même de notre système de santé, la création de l’Oniam, l’organisation de la qualité des soins, etc. Bernard Kouchner se remémore le contexte dans lequel cette loi a été promulguée. Il faut se souvenir en effet du fracas que le SIDA a provoqué dans le monde, mettant la médecine en échec, se souvenir aussi du drame effroyable que fut le scandale du sang contaminé, brisant la confiance entre les soignants et les soignés. « Les Etats Généraux de la Santé, riches de plus de 1 000 réunions sur la France entière, nous ont beaucoup appris, tout comme les Etats Généraux des malades du cancer organisés à l’initiative de la Ligue nationale contre le cancer, se souvient Bernard Kouchner, la voix des malades a été entendue pour la première fois et les associations de patients sont venues vers nous pour travailler sur le texte de loi. Il était urgent de passer de la défiance à la confiance !». Seul regret de Bernard Kouchner, ne pas être allé plus loin sur la fin de vie, par manque d’audace reconnaît-il mais aussi de temps. Cette loi aura marqué l’histoire de la santé publique, en France comme dans bien d’autres pays, mais la crise sanitaire a servi de révélateur de notre insuffisance de culture en santé publique. « Il nous faut développer davantage cette culture, a déclaré Olivier Véran, notamment en matière de prévention, trop longtemps restée le parent pauvre de notre système de santé, aller vers le concept One Health*. Nous devons aussi apprendre à aller vers les plus vulnérables, comme c’est notamment le cas pour les personnes qui n’ont pas un accès facile au système de santé, ne serait-ce que pour un vaccin ». Développer cette culture de santé publique, investir sur la prévention, reprendre les chantiers de Ma Santé 2022 interrompus par la pandémie, la feuille de route pour un nouveau quinquennat semble déjà bien définie !

  *One Health est un concept qui promeut une approche intégrée, systémique et unifiée de la santé publique, animale et environnementale, aux échelles locales, nationales et planétaire.

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