Face à l’explosion de l’offre de location de trottinettes électriques dans les grandes villes françaises, l’Académie de médecine a décidé de se pencher sur le sujet. Objectif : faire le point sur l’accidentologie liée à l’utilisation de ce moyen de locomotion, les lésions provoquées lors d’accidents, et établir une série de recommandations visant à remédier aux problèmes identifiés. Sans surprise, l’introduction des trottinettes électriques en location a accru fortement le nombre d’accidents. Selon l’Académie, l’accidentologie liée à leur utilisation est même devenue un "problème sanitaire majeur" et "un enjeu de santé publique". Dans l’hypercentre de Lyon, près de 4000 trottinettes électriques ont été mises à la location. Ce nombre est porté à 15000 à Paris. D’après le registre du Rhône, le nombre d’accidents de trottinettes électriques "a été multiplié par 7,3 par rapport aux trois dernières années pleines (2015-2017) dépourvues de trottinettes électriques de location". Des études internationales confirment que l’introduction du libre-service a été "le facteur majeur d’augmentation des accidents". A Auckland (Nouvelle-Zélande), ils sont passés de 2 à 35 par semaine après cette introduction. A Vienne (Autriche), les admissions aux urgences pour accidents de trottinettes sont passées de 13 à 116 entre 2018 et 2019. L’Académie indique que dans deux-tiers des cas, l’accident est causé par un non-respect de la réglementation : les excès de vitesse d’abord mais aussi la circulation sur les trottoirs – pourtant interdites. Pour un tiers, l’accident est dû à un événement imprévu. L’Académie de médecine rapporte que la chute isolée est la première cause des accidents (70 à 80% en fonction des séries). Elle est liée à une perte de contrôle de l’engin "par défaut d’attention (utilisation d’un téléphone portable en roulant), conduite d’une main, manque d ’expérience, vitesse excessive, obstacle", etc.
Des lésions spécifiques "Les lésions affectent principalement l’extrémité crânio-faciale et les membres, plus particulièrement le membre supérieur", note l’Académie, qui explique que cela résulte de chutes en avant. "L’extrémité céphalique est plus souvent atteinte dans les accidents de trottinettes électriques que dans les accidents de vélo où la chute se produit latéralement (74% vs 43%)", ajoutent les auteurs du rapport. Les traumatismes de l’extrémité céphalique ont considérablement augmenté depuis 2018. Se basant sur plusieurs études menées sur le sujet, l’Académie rapporte que "chez les patients, une intoxication à l’alcool ou aux substances addictives était noté dans près de 50% des cas, tandis que le port du casque était absent dans neuf cas sur dix". La lésion la plus fréquente est "la survenue d’un syndrome commotionnel post traumatique dans près de la moitié des cas". En raison de l’énergie cinétique, le casque n’évite pas la commotion cérébrale mais il protège néanmoins "des lésions de contact direct" et "évite les fractures ouvertes du crâne". Les traumatismes du membre supérieur ont eux aussi tendance à croître. Plusieurs études analysées montrent une "proportion de fractures (ceinture scapulaire, coude, avant-bras, poignet) plus importante qu’au membre inférieur", dominé, lui, "par des lésions superficielles des parties molles. Rendre le port du casque obligatoire Afin de réduire l’accidentalité, l’Académie appelle à mettre en place des "mesures judicieuses". D’abord, concernant l’engin, elle recommande d’exiger des normes pour la largeur de la plateforme, le diamètre et la largeur des roues afin d’assurer une réelle stabilité au conducteur ; de compléter l’équipement par des clignotants de changement de direction et par un feu stop à l’arrière ; d’aligner la puissance réelle des engins sur la puissance autorisée permettant de respecter la réglementation existante. Mais aussi de contrôler les trottinettes de location par plateforme GPS. Les auteurs du rapport estiment nécessaire de relever l’âge des conducteurs à 16 ans ; de mettre en place une formation de base dans les écoles ; de demander aux mineurs un certificat d’aptitude pour la location. Le port du casque et de gants doit être rendu obligatoire. Des équipements de protection individuels au niveau des membres sont par ailleurs conseillés. L’Académie suggère aussi de mettre en place une campagne de sensibilisation sur les risques liés à l’usage de cet engin et sur les conditions d’assurance. Il va de soi qu’il apparaît urgent de faire respecter "impérativement" la réglementation existante. Ce nouveau mode de mobilité doit par ailleurs être pris en compte dans les aménagements urbains. Un suivi épidémiologique devrait par ailleurs être mis en place. Cela pourrait s’inspirer, à l’échelle départementale, du modèle du registre du Rhône. Les sociétés savantes ont également un rôle à jouer "pour entreprendre des recueils prospectifs de données", conclut le rapport.
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