IVG : l'allongement du délai ne résoudra pas les problèmes d’accès et de prise en charge, alerte le CNGOF
Après un parcours parlementaire sinueux, la proposition de loi (PPL) visant à renforcer le droit à l’avortement a finalement été définitivement adoptée mercredi 23 février après un ultime vote des députés, ouvrant ainsi la voie à l’allongement du délai de recours à l’IVG, de 12 à 14 semaines. Une avancée historique saluée par de nombreuses associations (notamment le Planning familial), mais aussi le ministre de la Santé, Olivier Véran, qui a déclaré qu’il s’agissait d’une "victoire pour les femmes" et pour "la société tout entière".
Pourtant, la mesure phare de cette proposition de loi est loin de faire l’unanimité, en particulier dans le corps médical. Dès le début de son examen, le texte – défendu par la députée Albane Gaillot –, a été critiqué par l’Académie de médecine, opposée à l’allongement du délai légal de recours à l’IVG. L’institution estimait que cette extension ne répondait "à aucune demande légitime des femmes qui espèrent au contraire une prise en charge plus rapide, avec le risque d’augmenter le délai de leur démarche".
Les Académiciens craignaient également que cet allongement n’entraine "inéluctablement une augmentation significative des complications à court ou à long terme".
Si le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), saisi par Olivier Véran, ne voyait de son côté pas "d’objection éthique" pour s’opposer à cet allongement du délai de recours à l’IVG, il indiquait toutefois dans son avis que cela ne résoudrait pas les problèmes s’il ne s’accompagnait pas d’une meilleure offre de soins, "sans quoi l'allongement de l'IVG s'apparenterait à un palliatif non bienfaisant d'une prise en charge bienfaisante".
Dans un communiqué du 25 février, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) a dit regretter "que les responsables de ce projet n’aient pas pris en compte ces réflexions et ses demandes concernant l’amélioration de la prise en charge de l’IVG en France pour se focaliser uniquement sur l’allongement du délai". Celui-ci "n’est pas une réponse appropriée aux problèmes de prise en charge de l’IVG", a-t-il assuré. D’autant que "plus l’IVG est réalisée tard, plus elle implique un nombre important de soins, complexifie sa prise en charge et limite le choix de la méthode".
Par ailleurs, le CNGOF estime que cet allongement ne réduira que "partiellement" le nombre de femmes qui se rendent à l’étranger pour avorter, s’appuyant sur une étude récente (de Zordo) menée à propos des Françaises qui doivent aller à l’étranger en raison d’un délai dépassé. Celle-ci "démontre que 70% d’entre elles ne se savaient pas enceintes avant 14 semaines" et qu’"elles sont prises en charge en moyenne à 19 semaines".
Selon la société savante, "la principale raison du dépassement du délai légal de l’IVG en cours en France est la difficulté d’accès aux soins". Elle s’explique par "le non-respect des recommandations et lois déjà existantes, qui demandent à tous les acteurs impliqués, dont les services de gynécologie-obstétrique, de prendre en charge rapidement les femmes demandant une IVG", explique-t-elle. Conséquence d’un manque de moyens accordés aux centres.
Par ailleurs, "le secteur planning /IVG est trop souvent mal considéré dans nos établissements : insuffisance de locaux, de personnel dédié et formé, de places aux blocs opératoires, acte jugé peu rentable par nos établissements à juste titre, car très mal rémunéré", explique le Collège qui dit attendre des propositions en termes de temps médical et de budget alloués aux structures qui vont appliquer la nouvelle loi.
Il demande également que les problèmes d’accès et de réalisation des IVG soient "pris en compte au même titre que pour les autres pathologies féminines". "Il est en effet inadmissible que les coûts de remboursement de prise en charge de l’IVG fassent de celle-ci une activité déficitaire pour les structures de soins."
Le CNGOF assure qu’il respectera cet allongement du délai, voté par le Parlement, mais "il est indispensable qu’il s’accompagne de conditions de réalisation acceptables pour les femmes et conformes aux bonnes pratiques médicales". "C’est à ce prix que la liberté de choix des femmes sera réellement respectée", conclut-il.
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