Il devait rapporter 3,5 milliards d'économies par an à l'assurance maladie, grâce à la coordination des soins et la chasse aux doublons. Il a, en fait, coûté plus d'un demi milliard d'euros depuis son lancement dans l'élan de la loi de réforme de l'assurance maladie en 2004, concoctée par Philippe Douste-Blazy et son directeur de cabinet de l'époque, Frédéric Van Roekeghem, qui dirigea par la suite la Cnam, pendant près de dix ans. Plusieurs ministres de la Santé se sont cassé les dents sur ce dossier qui fut personnel, puis partagé. Dont les patients exigeaient, contre l'avis des médecins, que certaines informations soient cachées, et que cette occultation soit elle-même masquée. Au résultat, ce coûteux sur-place lié aux intérêts antagonistes de ceux qui auraient dû en bénéficier a duré une douzaine d'années. Jusqu'à ce que Marisol Touraine enlève le dossier des mains de l'Asip Santé et le remette à la Cnam, désormais chargée depuis deux ans de sa montée en charge. Après une phase expérimentale du DMP dans 9 régions pilotes et 1 million de dossiers ouverts, l'assurance maladie s'affiche sereine sur l'hypothèse d'un lancement généralisé en fin d'année 2018. Le DMP "sera généralisé à l'automne prochain à tous les départements et tous les assurés sociaux, s'est récemment engagé Nicolas Revel, le directeur de la Cnam. L'objectif est d'aller très vite et d'ouvrir d'ici 4 ou 5 ans, plusieurs dizaines de millions de DMP". Il promet pour le mois d'octobre, une application "qui permettra à chacun, y compris dans le métro, chez soi, sur son smartphone, de consulter son DMP". Le patient pourra créer lui-même son dossier, ou le demander à son médecin en libéral ou à l'hôpital ou encore à son pharmacien qui recevra 1 euro par dossier ouvert. Mais cet enthousiasme tranche avec le scepticisme des médecins. Lors d'une récente conférence de presse, le président des généralistes de la CSMF, Luc Duquesnel, a critiqué l'ergonomie du dossier, qui pour l'instant, ne prévoit rien pour recueillir la synthèse, pourtant créée dans le volet de synthèse des médecins traitants. "Ce sont des PDF qui s'empilent les uns sur les autres, sans indexation. Qui est responsable si un antécédent n'est pas indiqué ?", avait interrogé le Dr Duquesnel. Même énervement du côté de la FMF où le Dr Jean-Paul Hamon, décrit "un empilement non répertorié de documents divers. Rien n'est prévu pour une synthèse structurée, rapide à lire, la seule chose qui serait utile pour sécuriser la prise en charge du patient", ajoute-t-il. "Qu'on ne compte pas sur moi pour perdre mon temps à aller chercher des renseignements dans ce foutoir". Enfin, le président du SML n'est pas plus tendre. Pour que le dossier soit adopté par les médecins, ajoute-t-il dans le Figaro, il faut qu'il soit "simple, en phase avec nos logiciels métiers et que ça s'incrémente en un clic sans qu'on ait besoin de retaper tous les dossiers". Il regrette aussi que l'accès au DMP des patients puisse poser des problèmes sur certaines pathologies. "Par exemple, un paranoïaque qui ouvre son dossier, cela peut être contre- productif", note le Dr Vermesch. [Avec Le Figaro]
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