Une intervention de quelques minutes à la place d'une chirurgie mutilante : autour du Pr Gil Dubernard, une équipe de l'hôpital de la Croix-Rousse, à Lyon, a développé un procédé présenté comme "unique au monde" dans le traitement de l'endométriose intestinale.
L'endométriose, qui se manifeste après la puberté sous différentes formes, touche deux Françaises sur dix en âge de procréer. Elle peut conduire dans les cas les plus graves à l'infertilité. "L'endométriose avec atteinte digestive, c'est probablement une des localisations les plus fréquentes et symptomatiques : ce sont des femmes qui vont avoir des crampes au niveau du rectum, des faux besoins d'aller à la selle au moment des règles, des alternances diarrhées/constipations (...) et des douleurs lors des rapports sexuels", a rappelé mercredi devant la presse le professeur Gil Dubernard, chef du service de gynécologie obstétrique de l'hôpital de la Croix-Rousse et initiateur du procédé. En cause, des nodules non cancéreux de quelques centimètres cube qui se développent entre l'utérus et le rectum. Si les traitements médicamenteux s'avèrent inefficaces, une chirurgie lourde est alors proposée, pouvant amener à une ablation d'une partie de l'intestin. "Cette chirurgie est longue, difficile, dure plusieurs heures et expose les patientes à des complications comme des communications entre l'intestin et le vagin (fistules). Pour les prévenir, il n'est pas rare qu'il soit réalisé des dérivations digestives : un anus artificiel transitoire (stomie)", a précisé le chirurgien. C'est en échangeant avec des médecins urologues que ce dernier a eu l'idée d'utiliser la machine Focal One, mise au point par le groupe lyonnais EDAP TMS pour traiter le cancer de la prostate par des ultrasons à haute intensité. "J'ai la prétention de dire que nous sommes les seuls au monde à le faire", a affirmé le Pr Dubernard, en soulignant que l'opération dure seulement "de trois à cinq minutes". Durant l'intervention, une sonde est introduite par voie rectale sous anesthésie locale. L'appareil envoie ensuite des ultrasons au sein du nodule à traiter, localisé au préalable par échographie. L'excroissance est alors "dévitalisée" par tranches successives grâce à un effet thermique, la température atteignant localement jusqu'à "85-95 degrés". Cinq patientes ont été prises en charge ces 18 derniers mois sur les dix autorisées dans le cadre de cette expérimentation, engagée en septembre 2015. L'étude doit s'achever à l'automne. "Aucune complication" post-opératoire n'a été observée à ce jour. Les patientes sont toutes ressorties le lendemain de l'intervention, alors qu'une prise en charge chirurgicale conventionnelle les aurait destinées à une longue hospitalisation avec plusieurs mois d'arrêt de travail. "Il y a peu, l'endométriose, on en parlait pas tant que ça (...) On avait mal pendant les règles (...), on était des douillettes en fait", a témoigné Graziella, 40 ans, fustigeant la méconnaissance de cette maladie par certains gynécologues. "Après l'opération, les douleurs ont complètement disparu", a-t-elle assuré, lors de la même conférence de presse. Cette innovation, qui va faire l'objet d'une publication dans une revue spécialisée américaine, pourrait concerner deux tiers des femmes atteintes d'endométriose digestive, selon les Hospices civils de Lyon (HCL), soit plusieurs milliers de cas par an en France. En mars, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, avait signé une convention avec des associations de lutte contre la maladie pour améliorer la prise en charge des femmes atteintes. [Avec AFP]
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