Engagés dans une négociation bras de fer avec l'assurance maladie sur leurs tarifs, les radiologues savent trop bien que l'article 99 de la loi de financement 2017, accordera in fine le dernier mot aux caisses. "On négocie avec un pistolet sur la tempe", tempête le président de la FNMR qui craint que les baisses annoncées ne bouchent l'avenir de sa spécialité
"On nous oblige à négocier sous la contrainte, le pistolet sur le tempe", clame le Dr Jean-Philippe Masson, le président de la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR). On ? l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) évidemment qui, depuis l'article 99 de la loi de financement de la sécurité sociale 2017, peut moduler à sa guise les tarifs des forfaits techniques de l'imagerie médicale en cas de dérapage de sa ligne allouée, et se passer de tout accord conventionnel pour ce faire. "La caisse a une attitude irresponsable que je ne comprends pas. Elle va tuer l'imagerie française, les comptables de l'assurance maladie se comportent comme des liquidateurs judiciaires", geint le Dr Masson. Engagé dans la négociation tarifaire avec la commission des équipements matériels lourds d'imagerie médicale, instance paritaire créée par l'article 99, où l'assurance maladie est majoritaire, le président de la FNMR s'est entendu "proposer" le 28 mars dernier, une baisse annuelle des forfaits techniques de 10 % pendant deux ans. L'accès aux soins sera impacté "Ce sont des propositions inacceptables, ce montant est faramineux, délirant. Si ces coupes sont mises en place, elles casseront les structures d'imagerie lourde qui repousseront le renouvellement de certains équipements", affirme-t-il. Du fait de la réduction des heures d'ouvertures induites par la réduction de la masse salariale – il faut deux manipulateurs pour un scanner - l'accès aux soins sera impacté, prédit le responsable. Or, la profession n'a de cesse de rappeler qu'il faut 30 jours de délai pour accéder à un examen IRM, quand le plan cancer fixe un objectif de 20 jours. Le Dr Masson souligne que 18 % des centres de scanner et 5 % des installations IRM sont en déficit depuis les premières baisses de tarifs autoritaires prises par l'Uncam, dès janvier 2017 qui se sont traduites par la suppression du modificateur Z et son remplacement par la majoration Y moins avantageuse. A laquelle s'est ajoutée la diminution de 2 % des forfaits technique d'imagerie (scanner, IRM et TEP scan). Les caisses étaient particulièrement gourmandes Cet article 99, attaqué devant le Conseil d'Etat, honni par tous les syndicats signataires de la convention, a été inscrit dans le projet de budget de la sécurité sociale fin 2016, après que 18 mois de négociations au finish entre les caisses et les représentants des radiologues, n'ont pas permis de trouver un accord financier satisfaisant les uns et les autres. Il faut dire que les caisses étaient particulièrement gourmandes, réclamant à la profession, une économie de près de 230 millions d'euros sur une année. Alors que les radiologues avaient déjà été mis lourdement à l'amende, les années précédentes. Jugeant l'affaire impossible d'autant que leurs contre-propositions de maîtrise médicalisée avaient été repoussées par l'assurance maladie, les spécialistes se sont vu imposer ledit article 99, accordant au directeur de l'Uncam, tous pouvoirs. Mais au résultat, le loup a un peu rentré les dents : le premier plan "article 99" ne devrait peser que 60 millions d'euros en montant de remboursement annuels, "inférieur de 40 % en moyenne à celui des mesures précédentes" avait tenu à pondérer Nicolas Revel, le directeur de la CNAM. Un pourcentage qu'il mettait en rapport avec la croissance annuelle de 40 %, des sommes remboursées pour le secteur de l'imagerie en coupe depuis 2010. "La baisse appliquée aux forfaits techniques sera quatre fois moins importante que la dynamique annuelle de ces dépenses", s'était-il justifié il y a un an. Rémunérations pointées du doigt Pétitions, journées de grève des radiologues, rien n'a fait dévier la volonté de la Cnam et du gouvernement de faire plier la radiologie. Il est vrai que les revenus des professionnels se situent dans le top cinq des spécialités les mieux rémunérées, une fois les colossaux frais de fonctionnements déduits. Des rémunérations pointées du doigt par la Cour des comptes, ou calculées par la Drees, qui sont systématiquement contestées par les syndicats professionnels de radiologues libéraux. Lesquels ne recueillent la solidarité de la profession que du bout des lèvres. "Ce qui arrive aux radiologues pourrait arriver à toutes les spécialités un jour", dit-on à la CSMF, bonne fille. La centrale s'est d'ailleurs réjouie de la suppression de cet article, par les sénateurs, en première lecture du PLFSS 2018, avant qu'il ne soit réintroduit à l'Assemblée. Car malgré les sollicitations syndicales, Agnès Buzyn n'a rien changé en arrivant aux affaires. Et c'est donc ce risque d'extension qui a conduit la centrale syndicat à faire de la suppression de cet article 99, l'une des conditions de son retour dans le giron conventionnel. Les négociations tarifaires se déroulent donc dans un climat pesant, mais tout de même un peu moins lourd que sous le règne de Marisol Touraine. Invité aux journées de printemps du CNPS, interrogé sur cet article qui nie le rôle de la négociation conventionnelle, Nicolas Revel a un peu dévoilé le fonds de sa pensée, affirmant que "les régulations les plus efficaces sont celles construites sur un mode partenarial, tendant à une maîtrise des volumes par le juste soin". Une discussion est en cours avec les radiologues, a-t-il confirmé, "permettant de trouver un cadre conventionnel pour trois ans, construit sur la pertinence des actes et assorti d'objectifs économiques, aboutissant au résultat que les ajustements tarifaires ne soient plus la politique de demain". Le directeur a également souligné que les objectifs de maîtrise médicalisée avaient été atteints en 2017. Fond d'optimisme Pour sa part, le président de la FNMR – qui vient de recevoir le soutien de ses homologues hospitaliers du SRH et du SNAM-HP – n'entrevoit pas vraiment cette ouverture dans la négociation. Les propositions de maîtrise médicalisées proposées par son syndicat – notamment l'information et la formation du médecin demandeur sur le terrain, pour qu'il prescrive le juste soin - ont été sèchement repoussées par la CNAM, car "trop longues à porter leurs fruits. Ils veulent des résultats immédiats". Néanmoins, le Dr Masson garde un fond d'optimisme : il veut privilégier le consensus et la discussion avec les caisses. Et rêve, en cas d'accord, "de pouvoir demander la garantie au directeur de l'Uncam, de surseoir aux projets de baisses qu'il a formulées au travers de son représentant à la commission technique". Si l'accord se fait, il faudra pour entrer en vigueur, qu'il soit traduit en avenant conventionnel, puis signé par les syndicats représentatifs polycatégoriels. "Si on trouve un moyen d'éviter l'arme atomique, je suis ouvert , commente le Dr Masson. Je le souhaite, voilà 10 ans qu'on réclame une véritable maîtrise médicalisée, basée sur la pertinence des soins. Tout comme la ministre de la Santé. On va peut être enfin y arriver".
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