Négociations conventionnelles : 2025, l'année des maisons de santé et des CPTS?
[DOSSIER ENJEUX 2025] Si cette année, l’actualité conventionnelle a été marquée par l’accord entre les médecins libéraux et l’Assurance maladie, l’année 2025 sera placée sous le signe des structures d’exercice coordonné, avec des négociations d’avenant pour les MSP, mais aussi, peut-être, pour les CPTS.
"Sécuriser et consolider le déploiement des maisons de santé sur le territoire." Tel était l’objectif assigné aux négociations conventionnelles interprofessionnelles par Geneviève Darrieussecq, alors ministre de la Santé, dans sa lettre de cadrage. Ces échanges, entre l’Assurance maladie et 49 organisations représentatives des professionnels de santé, ont démarré le 6 décembre dernier et doivent se poursuivre, selon le calendrier prévisionnel, jusqu’à la mi-mars, avec en ligne de mire la signature d’un deuxième avenant à l’accord conventionnel interprofessionnel (ACI) qui régit les relations entre l’Assurance maladie et les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP).
Articulées autour de trois orientations principales (simplifier les règles de rémunération, redonner du temps médical, et mieux reconnaître la notion d’équipe), ces négociations sont très attendues par les quelque 40000 professionnels de santé – tous métiers confondus – exerçant en maison de santé: "Avec près de 2 000 MSP actives (...), ces négociations seront l’occasion de consolider la place des MSP dans notre système de santé ainsi que leur déploiement pour parvenir à l’objectif de 4 000 MSP sur nos territoires", précisait ainsi Thomas Fatôme dans un post LinkedIn le 9 décembre dernier.
"Nous aimerions que les indicateurs actuels soient simplifiés, avec moins d’indicateurs quantitatifs et davantage d’indicateurs qualitatifs", indique à Egora Emmanuelle Barlerin, coprésidente d’AVECsanté, la fédération nationale des maisons de santé, présente pour la première fois à la table des négociations à titre d’observateur. L’infirmière libérale installée dans la Loire souhaite aussi "plus de bienveillance" pour les structures qui, du fait d’un départ (retraite ou autre), se retrouvent avec un seul médecin et perdent de ce fait des financements. "Nous souhaiterions également qu’on parle moins de patientèle médecin traitant et plus de file active de l’équipe", ajoute-t-elle. Des améliorations qui nécessitent, bien évidemment, des financements. "Nous ne voulons pas afficher de chiffre précis, car les besoins varient d’une équipe à l’autre, mais on sait qu’un assistant d’équipe, une véritable fonction de coordination, cela a un coût", signale Emmanuelle Barlerin.
Difficile de savoir si, dans le contexte budgétaire actuel, les MSP réussiront à faire valoir leurs besoins de financement, mais une chose est certaine : ces négociations ne seront que le premier acte d’une pièce qui en compte au moins deux. Car une fois que le deuxième avenant de l’ACI-MSP sera signé, ce sera au tour des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) d’entrer en scène. "Nous n’avons pas de calendrier précis pour l’instant, mais les négociations auront vraisemblablement lieu au dernier quadrimestre 2025", nous indique David Guillet, infirmier libéral et président de la Fédération des CPTS (FCPTS).
Aux dernières Journées nationales des CPTS, en octobre dernier, et cinq ans après la signature des premiers accords conventionnels interprofessionnels, le directeur général de l’Assurance maladie avait affirmé "croire aux CPTS". Pour preuve, l’Assurance maladie a "multiplié ses soutiens financiers par trois", assure Thomas Fatôme. Sur le terrain, la dynamique est lancée : la couverture du territoire avoisine les 90%, et 567 contrats ACI ont été signés. Il est "important de continuer à accélérer et à structurer, surtout face aux enjeux majeurs de notre système de santé", a insisté Thomas Fatôme. Et si le premier cap du maillage territorial est passé – bien qu’il avoue ne pas être "obnubilé" par l’idée d’une couverture globale –, il faut désormais passer à un "test de maturité et de crédibilité", assure-t-il. Car il s’agit de savoir, "quand l’Assurance maladie met 120 millions sur la table pour soutenir les CPTS", ce que ça "produit en face", a-t-il poursuivi, tout en insistant sur le fait que "les indicateurs [sont là] pour mesurer ce qui se passe sur le territoire. Est-ce qu’[avec la CPTS], il se passe quelque chose pour les professionnels de santé et les patients? Est-ce que ça change ou apporte quelque chose? Moi, je crois que la CPTS est en train de produire car elles sont très investies notamment sur la prévention, sur l’accès aux soins… Mais pour le moment, c’est le cas dans beaucoup d’endroits, moins dans d’autres…"
Cinq ans après, il est nécessaire de faire évoluer cet ACI. David Guillet souhaite notamment obtenir "des clarifications", par exemple pour savoir comment les CPTS, "qui ne doivent pas être des effectrices de soins", doivent porter sur le terrain des actions de santé (prévention, vaccination…). Des organisations territoriales qui auront besoin également, ajoute celui-ci, "d’un appui structuré, notamment en termes de ressources humaines". Mais le président de la FCPTS ne demande pas forcément des moyens supplémentaires. "Il y a déjà de l’argent sur la table, il faut l’utiliser à meilleur escient", estime-t-il. Des mots que l’Assurance maladie n’a pas l’habitude d’entendre en début de négociation!
Effectifs et rémunération en maisons de santé
Lors de la première séance des négociations conventionnelles ACI-MSP le 6 décembre dernier, la Cnam a présenté un bilan détaillé des maisons de santé.
• En 2023, 39 975 professionnels de santé évoluaient en MSP : 29 % d’infirmières, 23 % de médecins généralistes, 12 % de masseurs kinés, 7 % de pharmaciens et 5 % de médecins spécialistes. "Le nombre de médecins généralistes associés en MSP a doublé entre 2019 et 2023, celui de médecins spécialistes (hors MG) a triplé sur cette même période", note la Cnam. Ainsi, en 2023, 15,6 % des médecins généralistes libéraux étaient associés en MSP (contre 7,5 % en 2019 ou 11,5 % en 2021). Un chiffre qui "augmente de façon significative depuis 2019 pour les généralistes mais également pour les spécialistes".
• Parmi les 1 953 MSP qui ont signé un contrat ACI au 31 décembre 2023, 1 918 ont atteint les prérequis et ont bénéficié d’une rémunération, précise la Cnam. Cette part des MSP rémunérées par rapport aux MSP signataires est relativement constante depuis 2018 (98 % l’an dernier). En 2023, l’Assurance maladie a versé 153,5 millions d’euros aux MSP (125,4 millions d'euros en 2022). Soit une hausse de 22 %. En moyenne, les MSP ont reçu 80 040 euros en 2023 (+10,5 % par rapport à 2022). Et en cinq ans, la rémunération des MSP a augmenté de 229 %. En 2023, elle était donc 3,29 fois plus importante qu’en 2018.
• Avec l’Occitanie et ses 261 MSP, la région Auvergne-Rhône Alpes est la mieux dotée (280), soit 14 % des 1 953 MSP actives et adhérentes en 2023 pour lesquelles une rémunération a été calculée. Viennent ensuite la Nouvelle Aquitaine (201 MSP), les Hauts-de France (193) et l’Île-de-France (168).
• Par rapport à 2022, la part de l’axe "Travail en équipe" était stable en 2023 (soit 75 407 936 euros), l’axe "Accès aux soins" est en légère hausse (32 654 541 euros) comme l’axe "Système d’Information" (45 844 988 euros). L’axe "Travail en équipe", lui, a connu une hausse de sa rémunération de 54 %. L’indicateur "Implication des usagers" a vu également une hausse de rémunération : 29 % pour le niveau 1 et 155 % pour le niveau 2, précise le document de travail.
• En 2023, les MSP comptaient plus de 10 millions de patients MT (près de 8,6 millions en 2022). Ce qui représente une hausse de 16 %. Le nombre moyen de patientèle MT par médecin généraliste associé est en hausse : 1 160 patients en 2023 contre 1 119 en 2022 (soit +3,71 %). Plus largement, la fi le active moyenne des MSP "augmente régulièrement", note le document, alors que "la part de patients C2S, AME et ALD reste stable". Ainsi, la fi le active moyenne des MSP rémunérées en 2023 s’élevait à 6 417 (6 356 en 2022).
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