FMC : 10 points clésAddictions : de nouveaux types et formes de consommation
À côté de la progression du "binge drinking", du cannabis ou de la cocaïne, de nouvelles addictions "sans substance" se sont développées comme celle aux jeux vidéo. Il est important de savoir les reconnaître.
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01Point formation n°1
Selon l’Organisation mondiale de la santé, l’addiction est une impossibilité répétée de contrôler un comportement et la poursuite de ce comportement en dépit de la connaissance de ses conséquences négatives.
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Le moteur de l’addiction est un mal être qui pousse à rechercher un soulagement (temporaire) dans une substance, le plus souvent, ou un comportement.
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Ne pas réussir à contrôler sa consommation ou persister malgré des conséquences néfastes sont les symptômes de la maladie. Le système de récompense est au centre des mécanismes qui mènent à l’addiction, le plaisir ressenti va amener à la dépendance.
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La consommation d’alcool épisodique mais massive (plus de 4 verres sur deux heures) concerne 16 % des Français, et un tiers des 14-25 ans s’y adonnent de façon mensuelle. C’est le "binge drinking". Il peut être uniquement festif (célébrer un bon résultat à un examen) mais sa répétition (tous les week-end, surtout quand il commence le jeudi) est un marqueur de souffrance psychique. Une prise en charge est alors nécessaire, surtout quand cette pratique perdure après la fin des études, signant une dépendance installée au fil des années.
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La consommation de cannabis chez les adolescents, qui sont particulièrement sensibles aux effets délétères de la substance (le cerveau étant en pleine maturation jusqu’à 30 ans), est à rapprocher de l’augmentation de concentration du THC dans l’herbe, estimée à environ 40 %. C’est cette substance qui entraîne les effets euphorisants et sédatifs du produit et est responsable de la dépendance. En trente ans, le cannabis est ainsi devenu 10 fois plus puissant. Les effets peuvent être paradoxaux puisqu’il est à moyen terme pourvoyeur d’angoisse, et qu’un quart des fumeurs ont déjà fait une attaque de panique. Il peut également entraîner un syndrome dit "amotivationnel" lorsque le produit est pris en quantité importante, avec un retrait de la vie sociale, une perte d’intérêt et des troubles de concentration. On constate cependant un ralentissement de la consommation de cannabis chez les jeunes et une augmentation chez les adultes (qui l’ont consommé plus jeunes).
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Ce ralentissement est à mettre en lien avec une montée de la cocaïne, deuxième produit illicite le plus consommé, avec 2,7 % d’usagers dans l’année (contre 1,6 % en 2017), suivie de près par l’ectasy (MDMA). La cocaïne procure une sensation d’acuité intellectuelle et de non-ressenti de la fatigue, avec rapidement une "descente" (tristesse, anxiété, irritabilité) qui amène une envie de reconsommer. Sous forme de "crack", les effets sont plus rapides, plus intenses et plus fugaces. Le fait que l’on ne développe pas d’addiction à la cocaïne est une idée fausse et encore très répandue.
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Une addiction sans substance a émergé ces dernières années. Elle concerne les jeux vidéo et la perte de contrôle de la pratique de ces jeux, reconnue par l’OMS depuis 2019 comme une addiction. Cette addiction peut constituer le marqueur d’une pathologie anxieuse, en particulier l’anxiété sociale, ou d’un syndrome dépressif. Une pathologie familiale est également à rechercher. Les chiffres sont difficiles à préciser (90 % des garçons sont adeptes réguliers de ces jeux) ; mais on estime à 1 à 2 % de la population générale (variable suivant les pays) les joueurs qui perdent le contrôle de cet usage au détriment d’autres activités, et malgré des répercussions personnelles et sociales.
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08Point formation n°8
On peut enrapprocher l’usage excessif des écrans de façon plus générale, avec une distinction entre leur utilité, qui est évidente, et leur mésusage ; la frontière étant parfois ténue. Leur utilisation a été majorée en 2020, lors du confinement (environ 5 heures de temps libre à cette période) et avec l’explosion des plateformes de vidéo et des réseaux sociaux.
Il s’agit de séparer ce qui permet de ne pas être isolé d’un monde en transformation, où l’écran est indispensable, du rôle de refuge de celui-ci, dans des espaces virtuels, où le besoin de s’évader peut être un symptôme de souffrance psychique. -
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Enfin, l’usage détourné ou excessif de médicaments peut transformer ces derniers en véritables stupéfiants.
Les opioïdes sont ainsi responsables d’une épidémie de personnes dépendantes aux États-Unis. Ces médicaments y ont été très largement prescrits et au long cours, sans contrôle sur le suivi ou leur arrêt. Depuis 2017, il est interdit en France d’acheter de la codéine sans ordonnance, ce qui a mis en évidence une véritable dépendance d’utilisateurs réguliers. La codéine a également connu un détournement en association à des sodas, cocktails, particulièrement appréciés par les adolescents. -
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Les addictions ne touchent pas un groupe bien identifié : âge, niveau social..., tous sont représentés en consultation d’addictologie. Et leur représentation sur les réseaux sociaux ainsi que la facilité à se procurer un produit ont un effet d’entraînement et permissif. La prise en charge doit être globale et l’entourage peut bénéficier de cet accompagnement.
Références :
- Blanc JV. Addicts : comprendre les nouvelles addictions et s’en libérer. Éditions Arkhé (2021).
La Dre Violaine Gonon déclare ne pas avoir de lien d’intérêts concernant les données de cet article.