FMC : 10 points clésAmylose cardiaque
Du fait des dépôts de protéines amyloïdes, le traitement "classique" des insuffisances cardiaques n’est pas adapté.
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01Point formation n°1
Les amyloses constituent un groupe hétérogène de maladies liées à l’accumulation extracellulaire de fibrilles amyloïdes, localisées ou systémiques.
La localisation et le type de dépôts amyloïdes entraînent des manifestations cliniques différentes, et des atteintes d’organes différentes (coeur, rein, système nerveux périphérique, tube digestif…). L’atteinte cardiaque conditionne le pronostic. Leur fréquence est estimée à 1 à 5 cas/10 000. -
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Il existe trois types d’amylose cardiaque :
- l’amylose AL liée à un excès de chaînes légères (CL) d’immunoglobulines (kappa ou lambda), liée à une gammapathie monoclonale (myélome ou gammapathie) ;
- l’amylose à transthyrétine (TTR) mutée dans laquelle la mutation est responsable d’un mauvais repliement de la protéine (amyloses héréditaires ATTRv) et TTR sauvage (amyloses sauvages ou séniles ATTRwt) ;
- l’amylose AA secondaire à une inflammation chronique. -
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Le diagnostic d’amylose cardiaque repose sur un faisceau d’arguments.
D’un point de vue clinique, une insuffisance cardiaque associée à une atteinte tégumentaire (canal carpien, canal lombaire étroit…), cutanéo-muqueuse (macroglossie, ecchymose périorbitaire, purpura), une dysautonomie digestive (diarrhées, constipation), vasculaire (hypotension orthostatique), une neuropathie périphérique sensitive et/ou une insuffisance rénale doivent alerter.
L’ECG montre typiquement un microvoltage (qui contraste avec l’hypertrophie à l’échocardiographie), associé à des troubles conductifs aspécifiques. -
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Le bilan biologique comporte : fonction rénale, BNP, troponine, immunoélectrophorèse des protéines sériques et urinaires, recherche de chaînes légères libres sériques, protéinurie de Bence Jones.
L’échocardiographie retrouve une hypertrophie myocardique modérée, un aspect granité du myocarde, un décollement péricardique et une dysfonction diastolique majeure contrastant avec une FEVG conservée ou peu altérée. Devant toute hypertrophie myocardique, il faut penser à une amylose : les amyloses cardiaques ATTR représenteraient 8 % des cardiopathies hypertrophiques, 13 % des insuffisances cardiaques à fraction d’éjection préservée et 16 à 22 % des sténoses aortiques.
L’IRM cardiaque retrouve une hypertrophie myocardique, un rehaussement tardif sous-endocardique ou transmural. La scintigraphie osseuse recherchera une fixation cardiaque du traceur osseux. -
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La biopsie (plutôt extracardiaque dans un premier temps) permet une mise en évidence des dépôts tissulaires par une coloration au rouge congo, un immunomarquage et une analyse génétique. Elle est indispensable et urgente en cas de suspicion d’amylose AL et à discuter au cas par cas pour les formes ATTR.
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Afin de déterminer le caractère héréditaire ou non d’une forme ATTR, il est nécessaire de réaliser une analyse génétique. En cas de positivité, il faudra tester les parents, la fratrie et les enfants.
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Le rôle des centres de référence est essentiel : réalisation des biopsies avec un anatomopathologiste expérimenté, bilan génétique, coordination avec les hématologues, mise en route des traitements spécifiques.
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08Point formation n°8
Le traitement de l’insuffisance cardiaque est limité aux diurétiques de l’anse, car l’hypotension limite la prise des IEC et les troubles conductifs la mise sous bêtabloquants. En cas d’Acfa, les anticoagulants seront discutés, en sachant que le risque hémorragique (gastrique, cutané) est présent. Un pacemaker +/- défibrillateur automatique implantable (PM +/- DAI) sera discuté au cas par cas.
Dans l’amylose ATTR sauvage, à l’heure actuelle, une seule classe de traitement (les stabilisateurs du tétramère de la transthyrétine) est disponible dans l’indication cardiologique pour améliorer la survie. Dans le cas de l’amylose ATTR héréditaire, plusieurs classes thérapeutiques sont disponibles : tafamidis à indication cardiologique, et inhibiteurs de la synthèse de la transthyrétine dans l’indication neurologique (patisiran ou inotersen). Dans l’amylose AL, il s’agit le plus souvent de traitements inspirés de celui des myélomes : chimiothérapie, autogreffe de cellules souches, immunothérapie et thérapies ciblées. La transplantation cardiaque seule ou combinée (rein ou foie) peut être discutée au cas par cas. -
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Pour l’amylose AL, un suivi étroit (BNP, troponine, ECG, échocardiographie) est nécessaire lors du premier mois de traitement, à la recherche d’une décompensation cardiaque, de troubles conductifs et rythmiques, permettant l’initiation de la chimiothérapie en toute sécurité. Le dosage des biomarqueurs cardiaques et des chaînes légères est réalisé tous les mois. Ensuite, un contrôle échographique sera réalisé à trois mois puis à un an.
Pour les amyloses ATTR, un suivi est réalisé au minimum tous les six mois. -
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Le bilan des porteurs d’une mutation asymptomatique ATTRv repose sur l’anamnèse, l’examen clinique, l’évaluation cardiaque, neurologique (sensitivomotrices), la dysautonomie et la fonction rénale. L’âge de diagnostic et la fréquence de suivi sont à adapter en fonction de la mutation et de l’histoire familiale.
Références :
Le Dr David Bacquet déclare n’avoir aucun lien d’intérêts concernant les données présentées dans cet article.