Que risque un médecin auteur d'agression sexuelle ?

22/05/2023
Les magistrats sont de plus en plus sensibilisés au sort des victimes d’infractions sexuelles commises par des professionnels de santé, qui peuvent être interdits d’exercice et condamnés pénalement à une peine d’emprisonnement.

 

La Cour de Cassation, dans un arrêt du 30 novembre 2021, a adopté une approche sévère face à des situations d’agressions sexuelles où la gravité des faits peut faire craindre la persistance d’une situation dangereuse pour les patients. Dans l’affaire jugée par la Cour de Cassation, un médecin généraliste avait été mis en examen le 1er juillet 2020 pour des faits d’agressions sexuelles aggravées commis au préjudice de deux personnes examinées sur réquisitions judiciaires alors qu’elles étaient en garde à vue. Le même jour, ce médecin est placé sous contrôle judiciaire, ce qui implique notamment une interdiction de se livrer à l’exercice de la médecine.

Une mesure contestée par ce praticien, mais qui sera confirmée par la Cour de Cassation. Ce médecin considérait que cette mesure d’interdiction d’exercice devait se limiter à son exercice en qualité de collaborateur occasionnel du service public de la justice et donc l’autoriser à pouvoir continuer d’exercer, notamment son activité libérale. Dans sa réponse, la Cour de Cassation a tenu à rappeler que ce médecin avait déjà été mis en cause par des personnes ayant subi les mêmes faits d’agressions sexuelles, alors qu’elles étaient en garde à vue. Et la Cour de Cassation de constater « les indices d’un comportement inadapté à connotation sexuelle de la part de la personne mise en examen, répété dans le cadre de consultations avec plusieurs patients différents, de nature à caractériser un risque actuel de commission de nouvelles infractions dans l’exercice de l’activité médicale, au-delà de la stricte mission de collaborateur occasionnel du service public de la justice ». 

 

Agressions sexuelles et téléconsultation 

Privé de consultations physiques, ce médecin demandait à continuer de pratiquer la télémédecine et la téléconsultation pour ses patients, estimant qu’il ne pouvait lui être reproché un délit d’agression sexuelle en l’absence de contact corporel entre l’auteur et la victime. Mais pour la Cour de Cassation, si le cadre de la téléconsultation exclut tout contact physique et empêche ainsi la commission directe d’une agression sexuelle pendant l’examen, il ressortait des éléments du dossier que ce médecin généraliste s’était livré, au cours de précédentes téléconsultations, à des actes répréhensibles (masturbations pouvant être qualifiées d’actes d’exhibition sexuelle). Des faits suffisamment graves, justifiant cette interdiction totale d’exercice. 

Tout médecin doit ainsi s’abstenir de tout acte de nature à déconsidérer sa profession. Un professionnel de santé mis en cause pour un acte intentionnel à caractère sexuel déconnecté de l’acte de diagnostic ou de soin peut être interdit d’exercer et condamné à une peine d’emprisonnement, ces infractions pouvant être qualifiées de délit ou de crime. Ces comportements, lorsqu’ils sont avérés, sont inacceptables et peuvent donc donner lieu à des poursuites pénales mais aussi disciplinaires, avec des condamnations parfois très lourdes (interdiction d’exercice et même radiation) en lien avec le non respect des principes de moralité, de probité et de dévouement indispensables à l’exercice de la médecine.    

Par Nicolas Loubry, juriste

 

 

 
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