De son vivant, un patient peut s’opposer à la transmission d’informations le concernant, après son décès, notamment à ses ayants droit. Comme le précise l’article L.1110-4 du Code de la santé publique, « le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès ». S’il est préférable que cette volonté soit exprimée par écrit, cette opposition peut aussi s’exprimer oralement, comme l’a rappelé un arrêt du Conseil d’Etat du 21 septembre 2020. Dans cette affaire, la fille d’un patient décédé le 2 novembre 2014 avait demandé à son médecin traitant la communication de son dossier médical, dans la perspective de faire valoir ses droits successoraux, alors que le testament rédigé par son père, le 18 septembre de la même année, était revenu sur les dispositions successorales antérieurement prises par ce dernier.
Ce testament était ainsi moins favorable pour ses enfants et sa fille voulait alors vérifier si la fragilité de son père avait pu être à l’origine d’un abus de faiblesse, susceptible d’invalider ce testament. Après avoir sollicité l’avis du Conseil départemental de l’Ordre, ce médecin a refusé la transmission de ce dossier car son patient lui avait indiqué, certes oralement, mais à deux reprises, sa volonté que ses enfants ne puissent avoir accès aux informations médicales le concernant. S’en est suivi un dépôt de plainte à l’Ordre de la fille de ce patient qui considérait que la preuve de l’opposition de son père à la communication de son dossier après son décès n’était pas rapportée. Cette plainte a été rejetée en première instance puis...
en appel par l’Ordre et le Conseil d’Etat, saisi en dernier recours, s’est également prononcé en faveur de ce médecin, malgré une absence d’opposition écrite de son patient, en ces termes : « En cas de litige sur ce point, lorsqu’une telle volonté n’a pas été clairement exprimée par écrit, il revient à chaque partie d’apporter les éléments de preuve circonstanciés dont elle dispose afin de permettre au juge de former sa conviction pour déterminer si la personne concernée, avant son décès, avait exprimé de façon claire et non équivoque sa volonté libre et éclairée de s’opposer à la communication à ses ayants droit des informations visées à l’article L.1110-4 du Code de la santé publique ».
Quelles preuves ? Si une opposition exprimée seulement par oral est ainsi recevable, le médecin doit toutefois apporter des preuves de cette opposition : mentionner au dossier médical le refus oral du patient, en rappelant les dates et les termes employés, afin de faire préciser à ce patient quelles sont les personnes visées par son refus. Une personne de confiance ou un proche peuvent aussi être témoins de l’expression de ce refus. Selon les cas, ces preuves pourront être insuffisantes : mieux vaut alors convaincre son patient de formaliser son refus par écrit afin de faire respecter, après son décès, ses dernières volontés.
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