Covid et infections hivernales : l'hypothèse d'une "dette immunitaire" battue en brèche par un infectiologue
Egora-le Panorama du Médecin : Dans quelle mesure les vagues de Covid-19 ont-elles modifié l’épidémiologie des infections hivernales ? Expliquent-elles, notamment, l’importante et précoce épidémie de bronchiolite à laquelle nous assistons ? Pr Bruno Lina* : On a observé la survenue plus précoce que d’habitude d’une épidémie de bronchiolite, notamment dans le nord de la France ainsi qu’en Ile-de-France. Néanmoins, tous les cas de syndrome de bronchiolite ne sont pas dus au VRS (virus syncytial respiratoire). En effet, la part du rhinovirus a été élevée en première partie d’épidémie. On sait que la mise en place de périodes de confinement, de mesures barrières, puis de déconfinement et d’un relâchement des mesures barrières ont complètement chamboulé l’épidémiologie des virus respiratoires. De fait, le cadencement de circulations des virus, historiquement bien connu, est actuellement modifié. C’est ainsi qu’on a observé, notamment, un épisode de bronchiolite à VRS au printemps dernier, ce qui ne s’était jamais vu. D’autres virus circulent également de façon abondante comme les métapneumovirus, que l’on n’avait pas vus depuis longtemps. Le rhinovirus, quant à lui, a circulé intensément durant l’automne en même temps que la dernière vague de Covid-19. Pour autant, je ne crois pas à la responsabilité isolée et cette année seulement d’une véritable dette immunitaire. Le fait que ces virus aient moins circulé a certes entraîné un défaut d’immunisation des populations sensibles, ce qui a facilité leur propagation quand ils ont pu recirculer, mais cette dette existe toutes les années du fait du faible pouvoir immunisant des infections à virus respiratoire. Il y a toutefois cette année un terreau favorable à une circulation importante de tous les virus respiratoires. Qu’envisagez-vous pour l’an prochain ? Je pense qu’assez rapidement, vraisemblablement dès l’année prochaine, nous allons constater un progressif retour à la normale du point de vue de la circulation des virus respiratoires, même si celle-ci continuera probablement à être un peu perturbée par le Sars-Cov2 qui est devenu un acteur important des infections respiratoires. Pour l’instant, j’ignore comment ce dernier va s’insérer dans le « défilé » des virus respiratoires. Va-t-il déplacer la circulation de l’un ou de plusieurs d’entre eux, un peu plus tôt ou un peu plus tard ? Va-t-il cocirculer avec ces virus ? Se comporter comme les rhinovirus et entraîner de nombreuses infections en septembre/octobre ? On verra, mais ce dont je suis persuadé en revanche, c’est que cela ne bousculera plus les virus respiratoires comme on l’a vu cette année et les années précédentes. La vaccination anti-Covid va-t-elle devenir saisonnière, annuelle ? Cela dépendra du rythme d’apparition des reprises épidémiques. Une vaccination tous les 4 à 6 mois se justifie pour l’instant par l’évolution virale et une durée de protection vaccinale limitée. Dans l’hypothèse où nous ne serions pas confrontés à une nouvelle épidémie avant septembre prochain, il ne serait pas nécessaire de vacciner dans 6 mois. Peut-on se projeter à 10 ans ? Il y a beaucoup d’hypothèses. En ce qui me concerne, je pense que le poids en santé du Sars-Cov2 va baisser progressivement et que dans une dizaine d’années il sera... devenu un virus banal à l’origine d’infections respiratoires hautes sans grandes conséquences, sauf chez les plus fragiles et les immunodéprimés ; ce qui pourrait motiver la poursuite de la vaccination. Cela par analogie avec ce qui a été observé avec un autre coronavirus, le virus OC43 qui, après avoir été probablement responsable d’une pandémie en 1890, s’était assagi a partir de1900. Comment voyez-vous l’avenir des vaccins contre le Covid-19 ? Si, techniquement, le développement des vaccins à ARN messager a été un succès pour les pathologies émergentes, le panel des vaccins disponibles (ARN, protéines recombinantes, autres…) peut conduire à s’interroger sur l’intérêt de nouveaux schémas vaccinaux plus performants intégrant d’autres types de vaccins, comme les vaccins à protéine recombinante. Des études, dont certaines menées par notre équipe, ont montré que les personnes ayant reçu une dose d’ARN messager et une dose d’adénovirus recombinant avaient eu une protection de meilleure qualité par rapport à celles ayant reçu un seul type de vaccin. Il serait intéressant de réaliser de nouveaux travaux sur les possibles bénéfices de panachages de vaccins. L’arrivée prochaine de nouveaux vaccins protéiques va relancer cette question. *Le Pr Bruno Lina déclare n’avoir aucun lien d’intérêts
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