Selon le Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles, dans les cas d’AP aux HPM, figurent les farines impactant surtout les boulangers.
Allergies professionnelles : des formes multiples et sous-estimées
Les agents sensibilisants en milieu professionnel contribuent significativement au développement d’allergies respiratoires. L’intensité de l’exposition est un facteur majeur.
Selon le Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles, dans les cas d’AP aux HPM, figurent les farines impactant surtout les boulangers.
Environ 16% des cas d’asthme résultent d’expositions professionnelles parmi lesquels l’asthme professionnel (AP) par sensibilisation (90%) qui est allergique et celui par irritation (10%). L’AP par hypersensibilité allergique de type I fait intervenir plusieurs mécanismes (Nomenclature de Jutel et al. Allergy 2023). "L’exposition produit une sensibilisation puis une commutation de classe, une commutation somatique, une sécrétion d'IgE et lors de la réexposition, la réaction allergique", indique le Dr Nicolas Migueres, pneumologue (CHRU de Strasbourg). Elle est mise en jeu en présence d’agents de haut et de bas poids moléculaire (HPM : protéines d'origine végétale ou animale ; BPM : produits chimiques).
Selon le Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P), dans les cas d’AP aux HPM, figurent les farines (10%) impactant surtout les boulangers, suivies par les acariens (3,5%) dans les métiers de ménage, le latex (2,1%) dans le système de soins, et les animaux en agriculture ou laboratoire. Ces allergies IgE-médiées sont souvent précédées d’une rhinite au travail qui va évoluer vers un asthme au cours des deux premières années d’exposition. « Pour les HPM, les tests immunologiques disponibles ont une performance diagnostique des IgE spécifiques efficace à la fois en termes de sensibilité et de spécificité », précise le spécialiste.
Les AP aux BPM sont retrouvés dans les métiers du nettoyage avec l’utilisation de l’ammonium quaternaire (5%), l’industrie du bâtiment ou automobile avec l’isocyanate (5%), la coiffure avec les persulfates (5%), les prothésistes avec les acrylates (2%). "Pour les BPM, les tests immunologiques sont peu disponibles et peu performants. La spécificité est bonne lorsqu’ils sont positifs, mais la sensibilité est très mauvaise et fait manquer beaucoup de cas si le test est négatif", poursuit-il.
Des présentations cliniques distinctes
Des travaux (Vandenplas et al. 2018 Allergy) ont montré que les AP aux HPM comportent plus de rhinites allergiques, de conjonctivites associées, d’obstructions bronchiques et sont plus souvent atopiques. Les AP aux BPM présentent plus d’exacerbations et de serrements thoraciques. Au niveau de l’endotype, sur les expectorations induites, les deux sont éosinophiliques (à 70% des cas). Lors de l'exposition, les HPM ont une augmentation de la FeNO plus importante que les BPM. "Le mécanisme des asthmes sensibilisés aux BPM n’est pas bien connu. Il est parfois IgE-médié. Nous savons qu’ils sont éosinophiliques mais peut-être est-ce une médiation cellulaire ou encore des haptènes ?", remarque le Dr Migueres.
"Plus l’exposition est intense (en heures travaillées ou en quantité d’allergènes de HPM / BPM), plus les probabilités d'être sensibilisé sont élevées et plus le risque d'avoir des symptômes par la suite est important. Réduire l'exposition, diminue les symptômes et prévient la survenue de nouveaux cas", rappelle le médecin. L’hyperréactivité bronchique non-spécifique avant l’exposition et le statut atopique est également un facteur de risque. "La valeur prédictive positive (VPP) de l’atopie est de 30% (AP aux HPM). Ce qui veut dire qu’une exposition contre-indiquée, le sera à tort 7 fois sur 10. Ainsi les recommandations de l’ European Academy of Allergy & Clinical Immunology (EAACI) préconisent seulement d’informer les sujets atopiques de leur statut afin qu’ils contrôlent leur environnement et consultent leur médecin de façon plus rapprochée", poursuit-il.
La pneumopathie d’hypersensibilité : fréquemment professionnelle
"L’hypersensibilité de type III présente une réaction par complexes immuns lors de l'exposition à l’antigène puis une réaction mettant en jeu à la fois le complément et le système immunitaire inné créant une pneumopathie d’hypersensibilité (PHS). La fraction attribuable des expositions professionnelles est importante (19%). Dans 60% des cas, l’antigène n’est pas retrouvé", souligne le Dr Migueres. Selon le RNV3P, le cas le plus fréquent est le poumon du fermier (40%), le poumon d’éleveur d’oiseaux (9%), la mécanique avec les fluides de coupe (5%), les fromagers avec les moisissures (4%). Les agents sont hétérogènes (bactéries, champignons, protéines animales, isocyanates, résines époxy, cobalt et zinc). "Là encore, l'intensité est le facteur de risque majeur des PHS. […] La diminution de l'intensité de l’exposition est un sujet important. Une réponse collective doit être apportée", conclut le pneumologue.
Au sommaire de ce congrès :
- Immunothérapie allergénique aux pneumallergènes : des données récentes d’efficacité
- Allergies IgE médiées aux additifs alimentaires : Identifier les substances responsables
- Régimes "healthy" et nouvelles allergies alimentaires : une tendance à la hausse
- Allergies oculaires : une modification de la symptomatologie avec l’âge
Références :
19ème Congrès francophone d’allergologie (CFA), du 16 au 19 avril à Paris. D’après la présentation du Dr Nicolas Migueres (CHRU de Strasbourg), lors de la conférence "Les pathologies respiratoires allergiques induites par l’environnement au travail".
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