Immunothérapie allergénique aux pneumallergènes : des données récentes d’efficacité
De récents travaux confirment l’efficacité de l’immunothérapie allergénique (ITA) dans les pathologies respiratoires IgE-médiées ainsi que son impact sur l’évolution de la maladie allergique.
L’immunothérapie allergénique (ITA) a pour principe de rétablir la tolérance de manière spécifique à un allergène en l’administrant à dose croissante. "L’ITA est efficace. La question est de déterminer pour quelles pathologies, comment, quand et qui doit être traité", a souligné le Dr Luc Colas, allergologue et immunologiste (CHU Nantes).
L’ITA est le "seul traitement des allergies ayant une indication curative". Elle a prouvé une efficacité dans les pathologies IgE médiées dont notamment la rhinite allergique (RA) et l’asthme allergique.
L’étude React (Fritzsching B et al., Lancet 2022) a analysé rétrospectivement sur 10 ans, une cohorte de 46 024 patients ayant une RA, avec ou sans asthme, traités par ITA (vs des sujets témoins). Elle a montré que l’ITA est associée à une diminution sur le long terme de la prise médicamenteuse pour la RA et l’asthme et à une réduction plus importante des exacerbations sévères.
"Les données en vie réelle montrent que l’ITA a également un impact en modulant l'évolution vers d'autres pathologies allergiques IgE médiées. Par exemple, elle réduit l'évolution vers l'asthme allergique chez les patients qui se présentaient initialement avec une rhinite. Elle est d'autant plus efficace si les sujets ont été désensibilisés précocement dans l'enfance. Aujourd’hui l'ITA est mieux ciblée aux allergènes déclencheurs chez les personnes poly-sensibilisés. L’intérêt de désensibiliser, notamment dès l’enfance, est majeur pour prévenir une évolution", souligne le spécialiste.
Enjeux 2030 : L’IA appliquée à l’ITA pour une médecine plus personnalisée
"L’ITA est efficace avec un très bon profil de sécurité. L’enjeu maintenant est d’améliorer notre prise en charge. La plupart des patients sont poly-sensibilisés et parfois poly-allergiques. L'efficacité de l’ITA dépend notamment de l’analyse détaillée de leur profil allergique et de l’identification précise de l’allergène déclencheur", souligne le Dr Davide Paolo Caimmi, allergologue, pneumo-pédiatre (CHU Montpellier). Une étude (S. Arasi et coll., Clinical & Experimental Allergy, 2021) a montré l’intérêt de l’IA appliquée à l’ITA. "Ces travaux nous ont permis d'utiliser l’IA comme algorithmes décisionnels pour optimiser la prise en charge de nos patients", indique le spécialiste. Cette approche intègre les données de plusieurs étapes : l’anamnèse, le dosage des IgE, celui des allergènes moléculaires, la e-santé avec des applications, comme Mask-air ou Drago (enregistrement des symptômes au quotidien, vérification de l’observance, scores de sévérité et de contrôle). "L’IA nous aide à aller vers une médecine plus personnalisée, ciblant mieux les besoins du patient en termes de profil allergique, symptômes et qualité de vie. C'est le vrai défi du futur", s’enthousiasme le Dr Caimmi.
Références : D’après un entretien et la présentation du Dr Davide Paolo Caimmi lors de la conférence "Enjeux scientifiques pour une meilleure ITA en 2030 : modèles prédictifs, médecine personnalisée"
L'ITA sublinguale aux acariens améliore la réponse antivirale chez les patients asthmatiques
L’étude Vital (Woehlk C et al., AJRCCM 2023) a montré que, chez des patients souffrant d'asthme allergique, l’ITA sublinguale aux acariens (Slit) améliore les réponses antivirales et inflammatoires épithéliales bronchiques (évaluation à 6 mois). La Slit a entraîné une diminution de la sécrétion d’alarmines T2 et une majoration de l’expression des IFN-β/λ et des cytokines proinflammatoires IL-6 et TNF-α. Ces résultats expliquent potentiellement l'efficacité de la Slit dans la réduction des exacerbations de l'asthme allergique. "Reste à savoir si ces résultats sont également valides pour tous les virus asthmogènes et s’ils persistent sur le long terme", remarque l’allergologue.
Par ailleurs, une étude (Hoof I et al., Thorax 2024) a montré que la Slit a une efficacité encore meilleure chez les sujets asthmatiques présentant une prédisposition génétique à l'asthme et/ou des marqueurs IT2 élevés.
"Actuellement, la désensibilisation n'est pas dans les pratiques courantes. Les données sont convaincantes et incitent à aller plus loin dans ce champ de recherche. L’ITA pourrait être considérée comme un traitement supplémentaire qui permettrait, pour certains patients, de moduler la sévérité de leur asthme. C’est une question actuellement en suspens qui va rapidement évoluer dans les prochaines années", conclut le Dr Colas.
Le parcours de soin "Allergie aux acariens" optimisé avec les CMEI et l’ITA
Le projet Angèle, expérimenté depuis deux ans, vise à structurer les parcours de soins en allergologie et à mettre en place une tarification forfaitaire. "Pour le parcours 'allergie aux acariens', l’objectif est de créer un réseau de prise en charge autour du patient entre l’allergologue, la conseillère médicale en environnement intérieur (CMEI) et le médecin traitant qui peut être mis au courant. Le parcours dure un an et comprend les mesures d’éviction, et le traitement des symptômes et l’ITA. L’idée est de standardiser ce parcours afin qu’il puisse être reproduit par nos confrères et éventuellement ensuite par les médecins généralistes", indique la Dre Sarah Court Devilliers, allergologue (Maison médicale, Dijon), présidente d’Anaforcal Bourgogne Franche Comté.
Référence : D’après un entretien et la présentation de la Dre Sarah Court Devilliers lors de la conférence "Parcours de soin dans l’ITA : optimisation, délégation de tâches et défis".
Au sommaire de ce congrès :
- Allergies professionnelles : des formes multiples et sous-estimées
- Allergies IgE médiées aux additifs alimentaires : Identifier les substances responsables
- Régimes "healthy" et nouvelles allergies alimentaires : une tendance à la hausse
- Allergies oculaires : une modification de la symptomatologie avec l’âge
Références :
19ème Congrès francophone d’allergologie (CFA), du 16 au 19 avril à Paris.
D’après un entretien et la présentation du Dr Luc Colas (CHU Nantes), lors de la conférence "Quelles données récentes d’efficacité de l’ITA aux pneumallergènes ?"
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