Urgences hyperglycémiques : de nouvelles recommandations internationales
Elaboré en 2001 par l’American diabetes association (ADA), le rapport de consensus relatif aux urgences hyperglycémiques, dont l’acidocétose et le syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire (SHH), n’avait pas été réactualisé depuis 2009. Présentée en clôture du congrès de l’EASD, une mise à jour effectuée par les deux sociétés savantes s’imposait. D’autant que ces situations d’urgence vitale n’ont cessé de devenir plus fréquentes jusqu’en 2015. Et, selon des données américaines de 2020, elles ont atteint un plateau, à 44,5 cas pour 1 000 personnes années dans le diabète de type 1(DT1), et 3,2 cas pour 1 000 personnes années dans le DT2(1).
L’acidocétose a toutefois connu un boom durant la pandémie de Covid-19, du fait de diagnostics tardifs, peut-être aussi d’un suivi dégradé des patients. Selon une étude finlandaise, l’incidence d’acidose diabétique a crû de 36% sur la période mars 2020-août 2021 chez les moins de 15 ans, par rapport à la période pandémique.
Quant au taux de mortalité lié à l’acidocétose, il demeure globalement inchangé, de 1,2% dans le DT1, de 2,8% dans le DT2 dans le mois qui suit un épisode, selon des données américaines(2). Les risques sont plus élevés dans le SHH, et encore plus chez le tiers de patients présentant simultanément acidocétose et SHH.
Le seuil de glycémie abaissé
Inconnues en 2009, lors de la précédente version des recommandations, les glifozines, inhibiteurs du SGLT2 qui bloquent la réabsorption du glucose au niveau rénal, font leur entrée dans cette nouvelle version. Ces agents ont, en effet, été liés à un risque accru d’acidocétose, plus marqué dans le DT1. Dans certains cas, la glycémie est normale, ou légèrement surélevée, une situation pouvant induire un retard au diagnostic(3).
"Les formes euglycémiques concernent environ 10% des personnes endurant une acidocétose", selon la Dre Shivani Misra, diabétologue à l’Imperial College de Londres. Raison pour laquelle le seuil diagnostique de glycémie pour une acidocétose a été revu à la baisse, à 2 g/L, contre 2,5 g/L auparavant. Le nouveau critère mentionne aussi l’antécédent de diabète, afin de tenir compte de ces situations euglycémiques atypiques.
Autre nouveauté, l’introduction du dosage du bêta-hydroxybutyrate, principal corps cétonique produit lors de l’acidocétose, avec un seuil fixé à 3 mmol/L. Selon les experts, ce test sanguin doit désormais être privilégié aux bandelettes urinaires, dont le résultat peut être faussé par certains médicaments. L’acidose demeure caractérisée par un pH inférieur à 7,3, et en-dessous d’un taux de 18 mmol/L de bicarbonates -contre 15 mmol/L auparavant. Quant au SHH, les critères sont globalement inchangés, avec une glycémie supérieure à 6 g/L, une hyperosmolarité sérique à plus de 300 mOsm/L (320 mOsm/L auparavant), et en l’absence d’acidose et de cétose significative.
Réhydratation, insuline, potassium
La prise en charge de ces urgences hyperglycémiques, acidocétose comme SHH, repose sur trois grands piliers : réhydratation par voie intraveineuse, traitement par insuline, prévention de l’hypokaliémie. Parmi les complications les plus fréquemment observées, l’hypoglycémie, l’hypokaliémie sévère et l’insuffisance rénale aigüe, "qui se résout généralement de manière rapide avec la réhydratation", explique le Dr Gian Paolo Fadini, diabétologue à l’université de Padoue (Italie).
Mais le principal danger auquel s’expose le patient est celui d’une rechute. Selon des données américaines, 12,3% des personnes ayant subi une acidocétose en endurent une autre dans les 30 jours suivants, 22% dans l’année calendaire(4). Or le risque de décès est multiplié par près de 6,2 chez les patients déjà hospitalisés plus de cinq fois pour une acidocétose, par rapport à ceux qui n’en sont qu’à leur première fois(5).
Pour Gian Paolo Fadini, "il est crucial de suivre étroitement ces patients au cours des deux à quatre semaines après leur sortie, peut-être en recourant à la télémédecine. Mais il est aussi important d’identifier les causes sous-jacentes à l’acidocétose ou au SHH, dont les troubles mentaux et les déterminants sociaux". Selon les experts, la survenue d’un épisode d’acidocétose doit être l’occasion de parfaire l’éducation thérapeutique du patient, de réajuster son dosage d’insuline si besoin.
Afin d’éviter les rechutes, l’usage de systèmes de mesure du glucose, tels qu’un CGM (Continuous Glucose Monitoring, mesure en continu) ou un FGM (Flash Glucose Monitoring, à la demande), peut permettre au patient de mieux contrôler sa glycémie. Lors de l’étude française Relief, l’emploi d’un FGM a permis de réduire de 56,1% le taux d’acidocétose chez les patients atteints de DT1, de 52,1% celui lié à un DT2(6).
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