Une action symbolique mais spectaculaire. Ce jeudi, trente-trois victimes présumées du Dr V., baptisé par la presse "le chirurgien de l'horreur", se sont réunies à l'initiative de Maître Edouard Bourgin à Grenoble. Un rendez-vous qui a permis aux anciens patients d'exposer "collectivement les griefs qu'ils peuvent avoir vis-à-vis de ce médecin" et de connaître la marche à suivre pour faire valoir leurs droits. Alors qu'il défend actuellement cinq dossiers, dont deux ont fait l'objet d'une plainte au pénal, cet avocat spécialisé dans les erreurs médicales affirme avoir reçu, depuis la médiatisation de l'affaire, une soixantaine d'appels de personnes disant souffrir de séquelles après une opération orthopédique menée par le chirurgien grenoblois. "C'est du jamais vu", s'étonne-t-il. "Le but de cette réunion est également de montrer publiquement, à travers la présence de ces 33 patients réunis tous ensemble en un même lieu, l’ampleur des dégâts imputables à ce chirurgien, explique Maître Édouard Bourgin. Et prouver qu’il s’agit bien d’un scandale de santé publique. Car après les 54 victimes déjà recensées par la CPAM, j’estime qu’il n’est pas possible que parmi les 60 appels que j’ai reçus, une partie importante de ces patients n’ait pas de réels griefs à développer contre ce médecin". Non-respect des techniques opératoires, absence dommageable de qualité dans le suivi opératoire, erreurs médicales ayant conduit à des amputations ou des invalidités, oubli de compresses ayant entrainé une surinfection … La liste des torts qui lui sont reprochés s'allonge. Alors que la section des affaires sociales du Conseil de l'ordre des médecins l'avait déjà suspendu en janvier pour trois ans, dont 18 mois avec sursis, pour des "manquements d'une extrême gravité et un comportement gravement fautif" dans la prise en charge de patients et qu'il fait aussi l'objet d'une enquête préliminaire pour "mise en danger d'autrui", le chirurgien a de nouveau été sanctionné par ses pairs. Le 25 avril, la chambre disciplinaire de l'ordre des médecins de Rhône-Alpes lui a infligé "un blâme" pour avoir commis une "faute déontologique" dans la prise en charge d'un patient aujourd'hui en fauteuil roulant. "Mes os étaient trop fragiles. Ils n'auraient jamais dû m'opérer" Pour Serge Gillet, 62 ans, la sanction infligée au docteur V. est une première victoire, lui qui se bat depuis des années pour faire reconnaître la responsabilité du chirurgien : "C’est bien la preuve qu’il a fait des erreurs sur ma personne. Et ses fautes ont été reconnues par ses pairs." Alors qu'il souffrait d'une hernie discale, le médecin lui avait posé une dizaine de vis dans la colonne vertébrale en 2014. "Mes os étaient trop fragiles. Il n’aurait jamais dû m’opérer. Un nerf a été touché. Une grave infection s’est aussi développée au niveau de ma colonne. J’aurais pu terminer entre quatre planches", raconte au Parisien celui qui a par ailleurs porté plainte en 2016 puis en décembre 2018 pour "blessures involontaires" auprès du parquet de Grenoble. Dans sa décision rendue le 25 avril, qui a été transmise au procureur de la République de Grenoble pour d'éventuelles poursuites pénales ainsi qu'à la ministre de la Santé, la Chambre disciplinaire de l'ordre des médecins de Rhône-Alpes reproche notamment au praticien de ne pas avoir réalisé d'examens complémentaires et de n'avoir proposé aucune alternative thérapeutique à son patient qui le consultait pour la première fois. "Un rendez-vous égale une décision d’opérer, quels que soient le parcours médical et les antécédents du patient. Maintenant, on n’a plus de doute, ce chirurgien a totalement désacralisé la fonction d’opérer et l’a méprisée. On a affaire à un compulsif de l’opération", a commenté Me Edouard Bourgin. De son côté, par la voix de son avocat, Maitre Bernard Boulloud, le docteur V. dénonce des accusations infondées de la part de ses anciens patients. [Avec le Parisien.fr, RTL.fr et AFP]
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