#MeToo à l'hôpital : 39% des femmes médecins victimes de comportements sexistes
Alors qu'un nouveau mouvement #MeToo traverse le monde médical, les femmes médecins hospitalières font encore face à de nombreux comportements et proposes sexistes au quotidien. Mais la parole peine encore à se libérer, selon les chiffres du 5ème baromètre de l'association Donner des Elles à la santé, publié jeudi 13 juin.
Pas moins 29% des femmes médecins ont subi des propos sexistes sur leurs compétences cette dernière année, et 26% sur leur apparence physique ou leur tenue vestimentaire. C'est ce que révèle le 5ème baromètre* de l'association Donner des Elles à la santé, réalisé par l'institut Ipsos et publié jeudi 13 juin. Menée auprès de 500 médecins hospitaliers – hommes et femmes -, cette étude montre que les praticiennes restent confrontées à de nombreux comportements et propos sexistes.
Alors qu'un nouveau mouvement #MeToo a ébranlé le monde médical ces derniers mois, 19% des femmes médecins déclarent avoir fait face à des questions intrusives et répétées sur leur vie privée ou sexuelle. Au total, 39% des praticiennes ont été victimes de comportements sexistes au cours des douze derniers mois, soit près de quatre femmes sur dix, souligne le baromètre. De leur côté, plus d'un homme médecin sur deux affirme avoir été témoin de tels comportements. Ils ne sont toutefois que deux sur cinq (60%) à les avoir dénoncés.
La libération de la parole reste, en effet, encore faible. Celle-ci "se limite principalement aux collègues - 30% des faits partagés le sont vers des pairs que ce soit par les hommes ou les femmes –", et "s’explique en partie par la méconnaissance des processus et des ressources mis en place dans les établissements", note l'étude. Seuls 4% des victimes ont dénoncé ces faits sexistes au référent en charge de ces questions au sein de l'hôpital ; 4% se sont adressés à leur hiérarchie.
"Aucun suivi des sanctions éventuelles"
Ce manque de libération de la parole a pourtant des effets néfastes. Il "entretient l’omerta et l’impunité pour les agresseurs, tout en empêchant une prise de conscience de la réalité de la situation, car aucun suivi des sanctions éventuelles n’est possible", insistent les auteurs du baromètre.
Au-delà des violences sexistes et sexuelles, cette 5ème étude s'intéresse un "désintérêt croissant" des médecins pour les postes à responsabilités. Aujourd'hui, 37% des médecins hospitaliers souhaitent se assumer un tel poste, contre 39% en 2023 et 49% en 2022. Cette baisse d'intérêt est plus marquée chez les femmes, puisqu'elle est en baisse de 16 points en quatre ans. Chez les hommes, cet intérêt est passé de 51% en 2021 à 43 en 2024, précise l'étude.
Ces chiffres s'expliquent, avant tout, par un manque de temps pour la vie personnelle (80%), ainsi que la fatigue et le stress (66%). "Ces facteurs sont exacerbés par des pratiques internes, comme les réunions après 18h, incompatibles avec une vie familiale équilibrée", complète le baromètre. S'ajoutent aussi des "motivations sexistes" : en effet, 39% des médecins que ce soit des hommes qui ont constaté que des femmes se sont vu refuser un poste à responsabilités ou des femmes qui ont directement vécu cette situation l’ont été pour des raisons sexistes (poste incompatible avec des contraintes familiales, risque de tomber enceinte…).
46% des soignantes ont décalé leur projet "bébé"
Plus largement, les femmes médecins restent "souvent confrontés à des discriminations liées à la parentalité". 46% affirment avoir retardé leur projet de grossesse pour des raisons professionnelles ; 17% ont déjà été incitées par leur manager à ne pas prendre de congé maternité ou parental sur une certaine période.
Face à ces résultats, la présidente de l'association Donner des Elles à la santé, rappelle l'urgence de soutenir les soignantes à l'hôpital. "Il est essentiel […] de clarifier le circuit de décision des signalements, la composition des conseils de discipline, les modalités du retour d’information vers le déclarant", assure la Dre Marie-France Olieric. Actuellement, moins d'un médecin hospitalier sur cinq (19%) connait l'existence d'un référent en matière de violences sexistes et sexuelles dans son établissement. Des mesures doivent donc être prises pour permettre de "créer un environnement où les médecins, et particulièrement les femmes, se sentiront encouragées à accepter davantage de responsabilités", poursuit la présidente.
Fin mai déjà, le Gouvernement a dévoilé une première série de mesures pour "lutter efficacement contre les violences sexistes et sexuelles" dans le milieu médical. Parmi elles, le renforcement de la formation des soignants pour prévenir les violences sexistes et sexuelles, l'approfondissement des enquêtes sur le sujet, ou encore un meilleur accompagnement des victimes.
*Ce baromètre a été réalisé entre le 29 janvier et le 20 février 2024 (avant la nouvelle vague #MeToo à l'hôpital), avec le soutien de l'entreprise pharmaceutique Jannsen France.
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