Alors que le Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR) organise aujourd'hui et demain à Avignon ses rencontres nationales, Egora en profite pour revenir sur le poids politique de ce regroupement dont deux acteurs majeurs se sont hissés aux premières loges du pouvoir.
C’est une évidence, le Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR) est une structure qui a le vent en poupe. Depuis le changement de gouvernement et l’arrivée d’Agnès Buzyn avenue de Ségur, deux d’entre eux occupent une place de choix auprès de la Ministre. Un ancien président de ReAGJIR, le Dr Jacques-Olivier Dauberton, a intégré presque immédiatement le cabinet, conseiller en charge (notamment) de la médecine libérale. Jeune installé depuis 2014, il a, pour ce faire, lâché son cabinet en maison de santé à St Rémy en Bouzemont, dans la Marne. Et plus récemment, c’est la présidente en exercice du regroupement, Sophie Augros, qui est devenue l’une des trois délégués, chargés par Agnès Buzyn d’aller porter le plan d’accès aux soins auprès des acteurs de terrain, et de relayer les bonnes pratiques auprès du comité national de suivi des actions locales. Bref, ReAGJIR, qui réunit son congrès à Avignon ce 7 décembre, semble avoir l’oreille de la Ministre.
"Nous avons enfin atteint le dernier échelon de l'infiltration"
"Nous avions déjà de bonnes relations avec la CNAM, le CNOM ou encore les syndicats de jeunes mais là, nous avons enfin atteint le dernier échelon de l'infiltration, en étant au sein du ministère", s'enthousiasme le Dr Sophie Augros. Elle nuance pourtant : "Mais ça n'est pas avec deux nominations que nous pouvons avoir de l'influence". Les nominations de Jacques-Olivier Dauberton et de Sophie Augros ont été dures à avaler pour les autres syndicats médicaux notamment chez les jeunes. "Nous avons essuyé plusieurs piques de la part d'autres structures de jeunes médecins", admet sans langue de bois la présidente de ReAGJIR. Mais cette dernière ne manque pas de rappeler qu'avant "c'était l'ISNI et l'ISNCCA" qui côtoyaient le pouvoir. "Olivier Veran (député Lrem, rapporteur du PLFSS 2018. Ndlr), est un ancien président de l'ISNI", argumente-t-elle.
"Nous portons des idées nouvelles"
En attendant le travail mené par ReAGJIR depuis de nombreuses années semble enfin porter ses fruits. "Nous portons des idées nouvelles et concrètes depuis longtemps. Je pense que c'est pour cela que le ministère à pensé à nous. On peut enfin dire que l'on nous connaît. Nous n'avons plus besoin de rabâcher nos idées", estime la présidente de ReAGJIR. Que demandent les remplaçants, qui forment le gros de la troupe de la structure ? Une meilleure protection sociale, surtout pour les femmes enceintes, pouvoir percevoir la ROSP durant leurs remplacements et enfin, siéger es qualité lors des négociations conventionnelles. "Nos propositions de guichet unique à l'installation et de protection sociale des remplaçants ont été reprises", se félicite le Dr Augros. Néanmoins, Luc Duquesnel, le président des généralistes de la CSMF, estime que cette dernière revendication ne sera pas très facile à mettre en place. "Si l’on réfléchit sur le statut et la protection sociale du remplaçant, la difficulté est de savoir où mettre le curseur", estime-t-il. Selon l’enquête de ReAGJIR, publiée en 2016, le portrait-robot du remplaçant est celui d’une femme (70 % des répondants), âgée de 31 ans et ayant soutenu sa thèse (le cas de 56 % des réponses). Ces professionnels effectuent en moyenne 26 semaines de remplacements dans l’année, près des 2/3 font leurs gardes de soir ou de week-end. Par ailleurs, 1/3 exerce une activité mixte la plupart du temps salariée (ce qui leur procure une couverture sociale). Et il y a de plus en plus de médecins retraités qui décident de continuer des remplacements car ils ne souhaitent pas cesser définitivement leur activité. Bien délicat d'imaginer un statut et une couverture sociale "pour une population aussi disparate", fait-il valoir. ReAGJIR entend bien y parvenir.
"Il y a beaucoup de blocages"
En tant que déléguée, chargés par Agnès Buzyn d’aller porter le plan d’accès aux soins auprès des acteurs de terrain, la généraliste admet avoir un rôle politique et de communication. "Tout le travail du plan est fait par un comité technique composé entre autres de la DREES, de la CNAM, de la DGOS… C'est important d'avoir les idées mais il faut aussi les administrations pour aider à les concrétiser", analyse la jeune femme. Objectif donc : transformer des idées en lois. La partie sera plus compliquée pour se frayer une place de signataire autour de la table des négociations conventionnelles. "Il y a beaucoup de blocages de la part des autres syndicats", commente la généraliste. "Qu’ils assistent et donnent leur avis sur les sujets qui les concernent directement comme la démographie médicale ou les aides à l’installation, bien entendu. C’est ce qui s’est fait l’an dernier. Mais ces négociations sont menées entre l’Assurance Maladie et les syndicats représentatifs, car la convention médicale concerne les médecins installés. Or, un certain nombre de ces jeunes n’exerceront jamais la médecine et d’autres ne s’installeront pas en libéral…" estime Luc Duquesnel. Néanmoins, lors des mouvements de grève et de négociations ayant marqué la gouvernance de Marisol Touraine, autant la FMF que MG France ont invité plusieurs représentants des internes ou chefs de clinique à siéger à leurs côtés à la CNAM, mettant ainsi un pied dans la porte. Contre l'avis de la CSMF et du SML.
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