"Il faut restaurer la place des généralistes dans le système" : Frédéric Valletoux en opération séduction au congrès du CMG

Top départ de la 17ème édition du Congrès de médecine générale France (CMGF), ce jeudi 21 mars, au Palais des congrès de Paris. Après un discours non sans humour du Pr Paul Frappé, président du Collège de médecine générale (CMG), le ministre délégué à la Santé et à la Prévention, Fréderic Valletoux, s'est prêté au jeu des questions réponses face à un public de généralistes non acquis à sa cause.  

21/03/2024 Par Sandy Bonin
CMGF 2024

C'est par une histoire drôle que le Pr Paul Frappé a entamé son discours d'ouverture du 17ème Congrès de médecine générale France (CMGF). "C’est l’histoire d’un dieu", a-t-il lancé avant de dérouler sa blague et de provoquer l'hilarité dans le grand amphithéâtre comble du Palais des congrès de Paris. Si le thème du CMGF cette année est "mythes et réalités en médecine générale", Paul Frappé a tenu d'emblée à déconstruire le mythe selon lequel le taux de recours aux urgences serait lié à l'accessibilité aux médecins généralistes, d'après une étude réalisée par les urgentistes eux-mêmes.  

"Sans faire de misérabilisme, le malaise est profond dès que l’on gratte le vernis. Avec une vraie crise de confiance, où certains perdent leur sang-froid. Craignent bientôt des années de sévices. Après des années de service. Et en viennent à évoquer le déconventionnement, quitte à être taxés d’antisocial", a pointé le Pr Frappé évoquant "l'évolution des métiers qui cristallise le malaise", en s'emparant "successivement de la vaccination, de la réalisation de tests diagnostiques, de certificats de décès ou encore de la prescription d’antibiotiques"…  

"Nous avons plus que jamais besoin d’un récit politique clair, d’une vision centrée sur les rôles plutôt que sur les activités", a lancé Paul Frappé, face au ministre délégué à la Santé et à la Prévention, Fréderic Valletoux installé au premier rang de la salle.  "Il nous faut réaffirmer qu’être médecin généraliste traitant aujourd’hui. C’est être un empêcheur de soigner en rond, en établissant avec le patient sa stratégie de prévention et de suivi. C’est réguler la consommation de soins sans la fliquer. C’est rester la rare porte ouverte à tous les motifs de consultation, et en assurer le service après-vente", a clamé le Pr Frappé, sous les applaudissements.  

Le médecin généraliste a plaidé pour une meilleure "reconnaissance du cœur de métier de médecin généraliste", clé d'une meilleure gestion de la démographie médicale, alors que chaque année des centaines de médecins, nouvellement diplômés, disparaissent des radars du soin. L'occasion d'une petite pique humoristique adressée sans le citer à Olivier Véran, ex-ministre de la Santé, neurologue de spécialité en formation pour devenir médecin esthétique.  

Le Dr Cyril Bègue, président du comité scientifique du CMG a également pris la parole n'hésitant pas, avec son équipe, à pousser la chansonnette ou à interroger sur la place de l'intelligence artificielle dans le quotidien des médecins généralistes. "Plutôt que de la subir, essayons de la comprendre", a estimé le Dr Bègue. Le praticien s'est aussi élevé contre les contrôles des prescription d'arrêts de travail de la part de l'Assurance maladie. Dire que les généralises "prescrivent trop d'IJ, c'est remettre en cause profondément nos pratiques", a taclé le Dr Bègue, justifiant que cette augmentation est notamment corrélée avec la baisse du chômage. Il a également insisté sur "la nécessité de développer la recherche en médecine générale", déplorant que la France est "loin derrière le Royaume-Uni".  

 

"Je ne suis ni le ministre des hôpitaux, ni le ministre du secteur public"

Paul Frappé a alors repris la parole pour appeler sur scène le ministre délégué à la Santé Frédéric Valletoux. "C'est l'occasion de dépasser les petites phrases médiatiques, prisme autour duquel les généralistes vous connaissent", a-t-il lancé au ministre en guise d'introduction avant de le questionner sur l'avenir de la médecine générale.  

S'il n'a pas clairement répondu à la question posée, Frédéric Valletoux s'est félicité de ce "dialogue" avec les médecins généralistes. "On ne me connaît pas tellement même si cela fait 15 ans que je fais de la politique", a constaté le ministre regrettant d’être "mis dans des cases" et "caricaturé". "J'ai bien compris que lorsque j'ai été nommé, certains syndicats ne m'ont pas jeté des pétales de rose sur la tête pour me signifier leur bonheur", a insisté Frédéric Valletoux. "Ceux qui me connaissent savent que je suis avant tout pragmatique et que j'ai qu'une seule mission c'est d'améliorer la prise en charge des Français, et permettre aux professionnels de santé de mieux travailler dans de meilleures conditions et surtout de lever les contraintes idiotes qui empêchent les exercices mixtes. Je souhaite arriver à des résultats concrets", a plaidé le ministre délégué, face à un auditoire silencieux.  

"Je ne suis ni le ministre des hôpitaux, ni le ministre du secteur public". "Nous avons une responsabilité collective à nous engager tous pour que notre système marche mieux", a-t-il ajouté. "Il faut faire confiance aux acteurs de terrain, notre système a été trop centralisé, trop jacobinisé, conçu depuis Paris", a regretté Fréderic Valletoux. "Il faut qu'on se serre les coudes. Les Français nous regardent collectivement", a-t-il insisté 

Mais comment donner envie aux jeunes de s'installer ? "Il faut restaurer la place du généraliste dans le système", a reconnu Frédéric Valletoux qui estime que le médecin traitant est "la boussole, le pivot qui accompagne le patient. C'est celui qui le connaît le mieux", "le chef d'orchestre".  S'il a admis "enfoncer des portes ouvertes", Fréderic Valletoux a déploré une perte du "bon sens". "Parfois le vrai sujet n'est pas que la problématique financière, il y a une vraie crise de sens", a noté le ministre qu'il s'agisse de la médecine hospitalière ou libérale.  

Fréderic Valletoux entend simplifier l'exercice des médecins généralistes. Interrogé sur les certificats inutiles, il s'est dit "favorable à introduire des éléments de simplification et de souplesse dans le système de santé". "Je veux bien travailler avec vous, certificat par certificat, pour vous aider avec le ministère et d'autres institutions". "Il faut vous débarrasser de ce type d'acte", a tranché le ministre.  

"Je ne vais pas révolutionner le système de santé", mais "j'espère avec vous faire bouger les lignes", a conclu Fréderic Valletoux. 

5 débatteurs en ligne5 en ligne
Photo de profil de Gilles Bouquerel
122 points
Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent
il y a 9 mois
Il est difficile de restaurer la place de quiconque au sein d'un système de santé dont le fondement est justement de différentier ses composantes non du fait de leur fonction, mais du fait de leur sta
Photo de profil de B M
4,7 k points
Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 9 mois
Le type a du confondre "restaurer" et "revaloriser". En général, on restaure ce qui est décrépi, ne marche pas, coute cher et plombe tout. Dans ce pays, c'est simple mais voici ce qui n'est jamais re
Photo de profil de Christiane Kouji
4,1 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 9 mois
c'est le grand coup de brosse à reluire, mais à chaque fois qu'on a rappelé le rôle de pivot du système de soin, de chef d'orchestre et autre aphorisme, on a pris un gourdin sur la tête et un dépeçage
 
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