Dans la crise engendrée par l'arrivée du Levothyrox nouvelle formule, "c'est surtout l'information qui a péché", juge le député médecin Jean-Pierre Door (LR, Loiret), qui présente mardi les conclusions d'une mission parlementaire "flash" sur le médicament. Il appelle la pharrmacovigilance et les professionnels à investir internet et les réseaux sociaux, en cas d'alerte sanitaire.
La mission appelle à "rénover" le dispositif d'information, afin de pouvoir s'adresser directement aux patients concernés par des changements touchant leur traitement, a-t-il expliqué à l'AFP. Le législateur devrait étudier le moyen de permettre aux agences médicales d'envoyer une information ciblée à des patients identifiés, avec l'aide de l'Assurance maladie, comme cela été fait pour la crise sanitaire du Mediator. Ce que l'ANSM soulignait n'avoir pas pu faire pour le nouveau Levothyrox. Et les 400.000 courriers qu'elle a adressés aux professionnels de santé sur le changement de formule, "présenté comme anodin", n'ont guère attiré leur attention au milieu de la masse des courriers reçus. Autre piste, également avancée par les associations de patients : insérer une notice spécifique dans la boîte pour sensibiliser les malades et suggérer que certains pourraient devoir adapter la dose, comme cela été fait en Belgique en 2007 lors d'une modification d'un médicament à base de lévothyroxine, comme le Levothyrox. "Il ne s'agit pas d'une crise sanitaire comme pour le Mediator (responsable d'atteintes de valves cardiaques, NDLR), mais d'une crise médiatique autour de la nouvelle formule du Levothyrox", commercialisée à la fin mars, juge le Dr Door au terme de sa mission, qui a notamment permis l'audition d'experts, d'associations de patients, du laboratoire allemand Merck et de l'ANSM. L'enquête de pharmacovigilance de l'ANSM rendue publique le 11 octobre "ne montre aucun effet indésirable nouveau qui serait spécifique à la nouvelle formule", note-t-il. Les troubles résulteraient de problèmes d'adaptation du dosage avec la nouvelle formule, plus stable pendant toute sa durée de conservation - trois ans. Mais les autorités sanitaires n'ont pas anticipé la crise de la mise sur le marché de la nouvelle formule du Levothyrox et sans doute pas envisagé qu'un grand nombre de patients souffriraient d'effets indésirables, selon la mission. Cette crise résulte en partie du fait que les signaux d'alerte en particulier ceux dits "faibles", n'ont pas été bien pris en compte, car les effets indésirables rapportés étaient ceux habituellement associés à ce type de pathologie. "Les médias se sont emparés de l'affaire après une recrudescence de signalements sur les réseaux sociaux et sur les forums en ligne : c'est à ce moment-là seulement que les autorités sanitaires ont commencé à prendre au sérieux les signalements." L'ANSM a recensé, entre mars et septembre, 14.633 signalements, dont 5.062 cas considérés comme graves par les personnes concernées. Les associations ont même fait part de décès, sans lien prouvé avec le traitement suivi. L'agence sanitaire aurait dû activer un dispositif spécifique de pharmacovigilance dès l'introduction de la nouvelle formule du Levothyrox, compte tenu de l'importance du public concerné (3 millions de patients, à 85% des femmes), estime la mission, qui plaide pour que la pharmacovigilance et les professionnels s'adaptent aux nouveaux modes de communication (internet, réseaux sociaux). En raison du tour judiciaire de cette crise - des plaintes ont été déposées au civil et au pénal - une commission d'enquête parlementaire, réclamée par certains, n'est pas possible, explique Jean-Pierre Door. L'explosion des ventes de Levothyrox - passées de 5 millions de boîtes à 30 millions entre 1990 et 2016, conduit à s'interroger sur la pertinence de certaines prescriptions, ajoute la mission. Elle évoque ainsi des opérations (pour des goitres) et des traitements (chez des plus de 60 ans sans symptômes) évitables. [Avec l'AFP]
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