"C’est un grand jour pour le système de santé français, a déclaré ce jeudi le ministre de la Santé, Olivier Véran. Un grand jour comme on n’en a pas souvent. Il y a bientôt 25 ans, la carte vitale venait transformer et simplifier le quotidien des patients et des professionnels de santé. Un quart de siècle après l’arrivée de cet outil si précieux, nous passons un nouveau cap dans le développement du numérique en santé : je suis très heureux de vous annoncer la création de Mon espace santé." Une révolution. C’est ce que le ministère et les pouvoirs publics espèrent opérer avec le lancement de "Mon espace santé", véritable "carnet de santé numérique" auquel peuvent dès aujourd’hui accéder tous les assurés sociaux – soit 65 millions de personnes. Ils pourront y stocker l’ensemble de leurs données de santé, les récupérer et les partager avec leurs praticiens via une messagerie sécurisée, MS-Santé. Objectif : permettre aux citoyens d’avoir "la main sur leur santé". S’il est aujourd’hui uniquement disponible sur Internet, Mon espace santé sera bientôt une application. Outre le dossier médical partagé (DMP) – qui sera automatiquement basculé sur Mon espace santé pour les personnes qui en avaient déjà un – et la messagerie sécurisée, la plateforme sera enrichie, courant 2022, d’un agenda – regroupant les rendez-vous médicaux – et d’un catalogue de services et d’applications.
25 ans après l’apparition de la carte vitale, #MonEspaceSanté est une nouvelle révolution !
Tous vos documents de santé stockés au même endroit, de manière sécurisée et accessibles par vos soignants.
C'est sûr, c'est simple : https://t.co/t2kjkWeqA5 https://t.co/8fTOGuUpnv— Olivier Véran (@olivierveran) February 3, 2022
"Les Français sont prêts, les professionnels de santé sont prêts", a soutenu le ministre, pour qui l’épidémie a accéléré "dans des proportions historiques les pratiques du numérique en santé". "A l’occasion de la première vague, nous sommes passés de 10.000 téléconsultations par semaine à plus d’1 million ! Les médecins, les infirmiers, les kinés ont appris, pour ceux pour qui ce n’était pas encore le cas, à utiliser la télésanté. En pleine tempête, le numérique en santé a montré qu’il était une solution efficace pour accéder aux soins et un allié de poids pour surmonter des contraintes inédites."
"Un coffre-fort sécurisé" Après l’échec du dossier médical partagé (DMP), lancé en 2004 et qui a séduit à peine 10 millions de Français, le ministre en est persuadé : "La donne a changé pour le numérique en santé." Le dispositif prévu par la loi Buzyn de 2019 et co-construit avec l’Assurance maladie, les patients, les professionnels et établissements de santé, et les industriels (éditeurs de logiciels) doit répondre aux attentes des Français, mais aussi à leurs inquiétudes, en particulier en ce qui concerne la gestion et le stockage de leurs données de santé. Il sera "un véritable coffre-fort sécurisé", a défendu Olivier Véran. Toutes les données seront hébergées en France par les entreprises Atos et Santeos. La condition sine qua non pour retrouver "une souveraineté". Exit donc Gmail et les serveurs géants californiens. La Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) veillera au respect des normes éthiques et de sécurité, à l’instar des associations de patients, comme France Assos Santé, dont le président, Gérard Raymond, était présent pour ce lancement. Le directeur général de la Cnam, Thomas Fatôme, a ajouté que "des tests de sécurité, de hacking" sont en train d’être menés pour vérifier "que la sécurité est bien au rendez-vous". L’Etat, l’Assurance maladie, les mutuelles, complémentaires santé ou encore assurances ne pourront accéder aux données déposées sur les espaces personnels des patients, promet Thomas Fatôme. Concrètement, le patient pourra lui-même contrôler qui peut accéder à ses données (traitements, antécédents, ordonnances, comptes-rendus d’hospitalisation, résultats d’examens, e-prescriptions, certificat de vaccination anti-Covid, constantes, informations personnelles…). Données qui pourront être, avec son autorisation, alimentées par les médecins et autres soignants qui le suivent. Il pourra masquer certaines informations personnelles s’il le souhaite. La traçabilité des accès est également une des garanties de Mon espace santé : le patient pourra voir qui a consulté ses données et quand. Il sera aussi averti lorsqu’un document sera envoyé ou modifié dans son dossier médical. Par ailleurs, "selon votre profession de santé, vous n’aurez pas accès aux mêmes données". En cas d’urgence, les Français peuvent aussi autoriser les soignants à accéder à leurs données. Les Français pourront également s’opposer à l’activation de leur espace santé numérique. D’ici le 28 mars, ils seront informés par email ou courrier de l’ouverture de leur espace. Une fois informés, ils pourront l’activer ou s’y opposer. Si au bout de six semaines à compter de la réception de l’email ou du courrier d’information, rien n’a été fait, le profil sera automatiquement créé. Mais, précise le directeur général de l’Assurance maladie, "à tout moment, vous pourrez changer d’avis et le fermer. C’est votre liberté". Ce dernier précise que les Français peuvent aussi spontanément activer leur carnet de santé numérique en se rendant sur le site. L’Assurance maladie organisera par ailleurs dans les prochaines semaines des actions pour aller vers les populations les plus éloignées du numérique. "Personne ne sera laissé sur le bord de la route", assure Dominique Pon, responsable ministériel au numérique en santé. Un support téléphonique a été mis en place pour répondre aux interrogations des Français (le 3422) ainsi que 4000 conseillers numériques et des bénévoles. Dix-huit coordinateurs régionaux ont été désignés. Une campagne de communication à la radio et à la télévision sera également lancée dans les prochains jours. Depuis fin août 2021, plus de 3 millions d’assurés ont déjà pu tester le dispositif dans trois départements pilotes (Loire-Atlantique, Haute-Garonne, et la Somme), indique le ministère de la Santé, qui note que les premiers retours ont été prometteurs, tant du côté des usagers – moins de 1% se sont opposés à l’ouverture de leur espace santé – que du côté des soignants. Cependant, il n’a pas précisé le nombre de praticiens ayant réellement utilisé ce nouveau dispositif lors de l’expérimentation, dont l’objectif, explique-t-il, était surtout de vérifier le bon fonctionnement de l’ensemble des outils. Mise à jour des logiciels métiers Le ministère et l’Assurance maladie l’assurent pourtant : Mon espace santé "simplifiera la vie des professionnels de santé" à coup sûr, notamment grâce à la messagerie sécurisée, qui leur permettra de contacter leurs patients mais aussi de communiquer entre eux sur des parcours de soin avec une garantie de sécurité optimale. Un investissement de 2 milliards d’euros – prévu dans le cadre du Ségur numérique – permettra de moderniser les logiciels métiers des médecins, pharmaciens, infirmières… afin de les rendre interopérables et compatibles avec Mon espace santé et, ainsi, faciliter les échanges. D’ici deux ans, les professionnels de santé bénéficieront ainsi gratuitement d’une mise à jour de leur logiciel, qui pourra par la suite envoyer automatiquement une copie électronique d’un document dans Mon espace santé. "Les 12 travaux d’Hercule", indique Dominique Pon. "Aujourd’hui, il y a des centaines de milliers de logiciels chez les médecins et pharmaciens, biologistes, radiologues, les hôpitaux et les Ehpad, et aucun de ces logiciels n’a respecté un cadre normatif commun. Ces logiciels sont incapables de communiquer entre eux parce qu’ils ne respectent pas les mêmes normes. Concrètement, pour un médecin traitant, récupérer un résultat de biologie émanant du logiciel du biologiste ou un compte-rendu d’hospitalisation, c’est la croix et la bannière car ils ne sont pas interopérables", explique le responsable ministériel au numérique en santé.
Laura Létourneau, déléguée ministérielle au numérique en santé, indique que des financements vont également être débloqués pour former les professionnels de santé à l’utilisation de la messagerie et au dossier médical. "Mon espace santé" devrait également permettre de faire des économies significatives, soutient-elle, même si elles sont à ce jour "difficilement chiffrables" : il permettra de "libérer du temps aux médecins", ou encore de "mieux suivre les malades chroniques". D’ici fin 2023, le ministère de la Santé et l’Assurance maladie espèrent atteindre 250 millions de documents médicaux envoyés annuellement aux patients dans Mon espace santé "contre 10 millions en 2021", indique Laura Létourneau, qui assure être "confiante" au regard des avancées qui ont été observées durant la crise sanitaire.
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