"Il y a quelques mois de cela, les négociations en vue de la ratification d'une nouvelle convention entre la Cnam et les syndicats médicaux ont achoppé sur la question de la revalorisation, sous conditions, de l'acte médical. Se contentant d'une hausse de 1.5 euro, le règlement arbitral n’a pas changé d’un iota la donne sur cet échec cuisant. Les généralistes libéraux, très en colère vis-à-vis du manque total de dialogue, mais aussi du fait d’une absence de prise en compte de leur situation, se sont mis en grève pour exiger une revalorisation rapide des actes. De ce fait, le ministre de la Santé a exhorté le directeur de la Cnam à engager rapidement des pourparlers, avec une feuille de route qu’il a sagement concoctée. La situation du médecin généraliste libéral n’est pas aussi rose que nous pourrions le penser Au-delà de cette triste situation de mésentente et d’incompréhension entre ces deux partenaires qui doivent malgré tout œuvrer en synergie pour améliorer la santé des Français, nous devons prendre du recul et surtout aller sur le terrain pour mieux comprendre les problématiques des médecins de famille. Depuis des années, cette catégorie de professionnels est prise à partie par les médias généralistes, qui n’hésitent pas à mettre sur le devant de la scène leur manque d’empathie, leur refus d’effectuer la permanence des soins, et surtout leur rémunération qui est régulièrement jugée très supérieure à celle du Français moyen. Cependant, on oublie trop facilement que ces soignants sont sur la brèche du matin au soir pour prendre en charge les patients, travaillant le plus souvent bien plus que 50 heures/semaine. Nombreux sont ces libéraux qui sont très attachés aux prérogatives inculquées par leurs maîtres. Ainsi il est injuste de dire qu’ils refusent systématiquement d’effectuer des gardes. En effet, même si certains secteurs ne sont pas pourvus, le nombre de médecins impliqués dans la permanence des soins n’est pas négligeable. On met en avant leur manque d’empathie (certains les comparent à des techniciens), mais on oublie trop facilement que la société a changé de paradigme. Certains patients ne respectent plus ces professionnels, se déchainent parfois injustement sur les réseaux sociaux, et dans certains cas en arrivent à les agresser pour des raisons futiles. Quant à la rémunération, c’est une question qui fait quelque peu hérisser les cheveux de certains confrères. En effet, dans certaines zones, le prix des locaux professionnels, mais aussi les charges que les libéraux doivent payer, sont considérables. En parallèle, aucune revalorisation de l'acte n'est intervenue depuis des années, ce qui contraint certains confrères à changer de voie. Par ailleurs, certains médecins n’arrivent plus à vivre de manière correcte (certains doivent faire des emprunts), et sont obligés pour survive de travailler plus au détriment, parfois de leur propre santé.
Tout aussi difficile est le discours des politiques qui ne connaissent pas les réalités du terrain, bien différentes que sur le papier. Pire, au lieu d'etouffer le feu qui couve, ils attisent les braises en donnant des informations erronées ou trop simplistes. C’est le cas pour les formalités administratives qui auraient dû être simplifiées, et qui dans les faits sont devenues plus importantes dans certains domaines. Par exemple, les dossiers MDPH sont de plus en plus demandés par des structures comme Pôle emploi pour se dédouaner de leur manque de résultats. Les logiciels métiers deviennent inextricables et peu intuitifs, car il a fallu se mettre rapidement dans les clous du « Ségur numérique ». De plus, les sociétés informatiques majorent de ce fait les prix des abonnements car il faut bien comprendre qu'ils ne sont pas nécessairement humanistes. On impose aux libéraux une feuille de route pour qu’ils travaillent en pluriprofessionnalité, avec la carotte d’une rémunération qui n'est pas nécessairement à la hauteur du travail demandé. Une fois encore, les administratifs de tous poils ne laissent pas les mains libres à ces professionnels pour qu’ils donnent leur assentiment à l’intégration dans l’équipe de tel paramédical ou tel autre. Ces soignants doivent subir une situation qu’ils n’ont pas voulue le plus souvent, et qui peut les mettre en difficulté. Une société en grande difficulté Parallèlement à cet état de fait, nous ne devons pas oublier qu’à côté des médecins libéraux nous avons des patients qui ont des difficultés pour joindre les deux bouts, cela malgré un travail parfois difficile, car ils ne bénéficient pas d'aides sociales et que les prix de l'énergie, du carburant, des produits alimentaires ne cessent d’augmenter. La question de la revalorisation des professionnels de santé libéraux est pour cette catégorie de travailleurs mal perçue, et nombreux sont ceux qui manifestent leur désapprobation sur les réseaux sociaux. Ils sont aidés, il faut le dire, par certains journalistes qui martèlent le fait qu’en période de récession économique il est indécent de réclamer plus...
Au final il est nécessaire de ne pas procrastiner Bien entendu, il est important de trouver des solutions pour éviter qu’une fracture sociale soit responsable d’une révolte superposable à celle des Gilets jaunes. Pour ce faire il est impératif d’éviter d’être trop dispendieux à tous les niveaux (postes de dépenses inutiles au sein des collectivités locales, aides sociales sans contrepartie, rémunération des politiques et hauts fonctionnaires…). Mais cela ne doit pas empêcher de reconnaître le travail de certains professionnels, comme les médecins libéraux, qui ne déméritent pas en travaillant d’arrache pied, et qui valorisent le pays. Ce sont des professionnels qui méritent grandement d’être revalorisés car ils donnent beaucoup à la société. C’est en ayant ce comportement qu’il sera possible d’éviter un conflit social qui risque dans quelques mois de faire exploser la cocotte-minute."
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