Cancer prostatique : l’IRM transforme la stratégie diagnostique

14/04/2020 Par Brigitte Blond
Urologie
L’imagerie est précieuse aux différentes étapes de la prise en charge d’un cancer prostatique, du diagnostique à la surveillance. Le point avec le Pr Georges Fournier, président de l’Association française d’urologie et chef du service d’urologie au CHRU de Brest.
 

  Qu’apporte l’imagerie au diagnostic du cancer de la prostate? L’objectif est ici d’identifier les cancers de la prostate qui le “méritent“, et donc de proposer les biopsies à bon escient. Une certitude, l’échographie comme le scanner ne montrent pas les tumeurs prostatiques au stade précoce de leur développement, encore localisées.  Avant la mise à disposition de l’IRM multiparamétrique, si le PSA était augmenté, ou si l’on sentait une induration au toucher rectal (TR), on proposait des biopsies systématiques dans toute la glande, 12 prélèvements à l’aveugle (parce que non dirigés sur une cible), par voie endorectale, avec les effets indésirables liés à la technique (inconfort, risque infectieux modeste, mais réel).  Aujourd’hui, dès que le PSA est au-dessus de la norme, une IRM est d’emblée indiquée (depuis 2019) avant d’envisager des biopsies : elle objective la tumeur, et donc la cible pour les biopsies qui doivent être réalisées aussitôt après. Celles-ci restent indispensables parce que la spécificité de l’IRM, bonne, n’est toutefois pas de 100 %. Par ailleurs, seul l’examen anatomopathologique permet d’affirmer le diagnostic de cancer, et surtout de préciser la différenciation tumorale et la taille de la tumeur, éléments déterminants pour décider du traitement : “simple“ surveillance (cancer de prostate de petite taille et bien différenciée) ou traitement conventionnel (chirurgie, radiothérapie), en tenant compte du risque de décès en l’absence de traitement dans les dix ans qui suivent le diagnostic (tumeurs localisées volumineuses et/ou peu différenciées).  Les clichés d’IRM peuvent être importés, par fusion, pour être superposés aux...

images d’échographie pour des biopsies ciblées, plus efficaces, qui trouvent le cancer (en général plus agressif puisqu’il était vu à l’IRM). A défaut d’appareil spécifique, la fusion peut être “cognitive“, l’opérateur faisant le lien.   Si l’IRM est normale (et le PSA modifié), peut-on se passer de biopsies ? La décision est à prendre au cas par cas en fonction du toucher rectal, de la valeur du PSA (densité du PSA, vélocité) et du volume de la prostate. Un avis urologique est indispensable dans tous les cas et un suivi de toute façon nécessaire si l’on décide de ne pas biopsier.    Quels examens d’imagerie sont nécessaires pour le suivi ? L’IRM encore, qui détecte au stade localisé une extension périprostatique de la maladie, un franchissement des limites de la capsule, et permet d’adapter le traitement : c’est donc un excellent outil de stadification, pour savoir quels traitements (chirurgie, radiothérapie externe ou interne) et comment les appliquer. L’IRM est utile également pour le diagnostic en cas de récidive après chirurgie ou radiothérapie, en complément des examens d’imagerie classiques (scintigraphie osseuse), mais surtout de l’imagerie par PET Scan avec les marqueurs du cancer de la prostate (PET Scan choline et bientôt PET Scan au Gallium PSMA pour la détection tumorale et des métastases).  Nous ne sommes qu’au début de l’utilisation de l’IRM et des études sont en cours pour juger de la possibilité d’un traitement focal de la tumeur de façon à réduire les effets secondaires. L’avenir nous dira aussi si l’IRM sera suffisante à elle seule pour surveiller activement les petits cancers bien différentiés, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui où le TR, le PSA et parfois de nouvelles biopsies restent nécessaires en complément de l’IRM. Enfin, l’on ne peut pas méconnaître le problème de l’accès à l’IRM, ce qui oblige à une sélection des indications en lien étroit avec l’urologue.  

PSA et surveillance active
En l’absence de test de dépistage sensible et spécifique, le cancer de la prostate est souvent découvert au stade métastatique, et les traitements sont alors palliatifs… Il est à l’origine d’un décès toutes les heures en France. Ce qui explique sans doute l’engouement pour le dosage du PSA quand il est apparu, en 1989… et, en boomerang, les surdiagnostics et surtraitements de cancers avec lesquels les hommes auraient pu cohabiter sans dommage jusqu’à leur décès, pour une autre cause. Une surveillance active peut être exercée pour 30 à 40 % des hommes à qui l’on découvre un cancer sur un PSA modifié.

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Martine Papaix Puech

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