ESC 2017: Coronaropathies, le temps de la désescalade thérapeutique

14/09/2017 Par Corinne Tutin
Cancérologie

Le congrès de la Société européenne de cardiologie, organisé à Barcelone du 26 au 30 août 2017, a permis de presenter de nombreuses études cliniques, dont plusieurs pourraient modifier les pratiques médicales. C’est par exemple le cas des études comme Tropical-ACS, ou Re-Dual PCI concernant le traitement anti-thrombotique après angioplastie, ou de l’étude Compass, portant sur l’addition d’un anticoagulant direct à l’aspirine chez certains patients coronariens stables, ou porteurs d’une artériopathie périphérique, ou encore de l’étude Pure en nutrition.  L’intérêt de nouvelles thérapeutiques a aussi été évoqué, comme des stents ultrafins résorbables ou, de manière peut-être plus étonnante en cardiologie, des anticorps dirigés contre l’interleukine 1.  Que ce soit en cas de coronaropathie après angioplastie, en cas de fibrlliation atriale associée, ou même au cours de la phase aigüe de l’infarctus du myocarde, de nouvelles données pourraient permettre d’alléger le traitement des patients. Certains essais comme Tropical-ACS plaident, comme l’a indiqué le Pr J. Mehili (Munich) “en faveur d’une désescalade thérapeutique du traitement anti-thrombotique chez les patients cardiaques devant subir une angioplastie coronaire ”.  Entreprise chez 2 610 patients avec un syndrome coronaire aigu, cette étude laisse, en effet, penser que l’on peut sans danger réduire l’intensité de l’anti-agrégation plaquettaire après angioplastie. Les deux strategies consistant à administrer pendant un an un anti-agrégant plaquettaire considéré comme très puissant, le prasugrel, ou à administrer l’association prasugrel et clopidogrel durant 2 semaines puis à adapter ensuite le traitement par ces deux anti-agrégants en fonction de l’activité plaquettaire, se sont, en effet, révélées équivalentes pour le critère de jugement primaire  (événements cardiovasculaires et hémorragies) : 7 % dans le groupe avec désescalade thérapeutique contre 9 % pour le groupe traité de manière classique. Ce qui a donc validé l’hypothèse de non-infériorité de cette nouvelle approche thérapeutique (1).   Réalisée sur 3307 patients, l’étude Nippon, conclut après un suivi de 3 ans qu’il suffit de traiter 6 mois et non 18 mois par double anti-agrégation plaquettaire les patients coronariens angioplastiés avec stent actif. Dans cet essai, les résultats étaient globalement équivalents en termes d’efficacité (nombre de décès cardiaques, infarctus du myocarde, AVC et thrombose de stents) et de sécurité (nombre d’hémorragies majeures) pour les deux temps de traitement. La seule exception à cette conclusion concernait, comme l’a mis en évidence l’analyse sur sous-groupes, les patients âgés (70-77 ans), diabétiques ou avec une maladie coronaire étendue, qui doivent probablement toujours recevoir une double anti-agrégation prolongée en raison d’un risque thrombotique majoré. “La reduction de la durée du traitement aux patients n’en ayant pas besoin, devrait permettre de limiter le risque d’effets secondaires du double traitement anti-agrégant et être une cause d’économie de santé”, a souligné le Pr Masato Nakamura (Tokyo). “A signaler aussi”, a indiqué le Pr Mehili “le développement d’un stent actif ultrafin biorésorbable au sirolimus, qui semble améliorer les résultats de l’angioplastie”.  Dans l’étude Bioflow-V, qui a inclus 1 334 patients, le nombre d’échecs de revascularisation au niveau de la lesion cible  s’est avéré significativement plus faible à 12 mois avec ce stent qu’avec un stent  actif à l’évérolimus (6,2 % versus 9,6 %, p = 0,04). En cas de fibrillation atriale associée, efficacité de la bithérapie dabigatran-anti-agrégant Une situation - qui n’est pourtant pas rare en clinique, et parfois difficile à gérer - , est représentée par les patients avec une fibrillation atriale devant être angioplastiés en raison d’une maladie coronaire associée. L’étude Re-Dual PCI, menée chez 2 725 d’entre eux, révèle qu’il est preferable de prescrire une association de dabigatran et d’anti-agrégant plaquettaire (clopidogrel ou ticagrélor), plutôt qu’une trithérapie combinant anti-vitamine K (warfarine), anti-agrégant (clopidogrel ou ticagrélor) et aspirine (2). “Après un suivi moyen de 14 mois, la bithérapie dabigatran-anti-agrégant s’est montrée non inférieure à la trithérapie en termes de prévention des décès et des événements thrombo-emboliques (AVC, infarctus du myocarde et embolies systémiques) : (9,6 % contre 8,5 %, p = 0,11)”, a souligné le Pr Mehili. “Et, cette bithérapie a réduit significativement le pourcentage d’hémorragies” (27,1 % contre 42,9 %, pour les hémorragies totales, p < 0,001 ; 1,4 % contre 3,8 % pour les hémorragies majeures, p = 0,002). Vers un arrêt de l’oxygénothérapie Par ailleurs, dans l’infarctus du myocarde, l’étude Deto2x-Ami amène à s’interroger sur l’intérêt de l’oxygénothérapie, “qui est pourtant proposée en routine à la plupart des patients avec l’idée de réduire la taille de l’infarctus en agissant sur la zone ischémiée”, a expliqué le Dr Robin Hofmann (Stockholm). Ce vaste essai prospectif ouvert a comparé 6 629 patients, hospitalisés dans 35 hôpitaux suédois, qui avaient pour moitié reçu de l’oxygénothérapie à l’aide d’un masque facial et pour l’autre non (3). Aucune difference statistiquement significative n’a été relevée, après un an de suivi, entre les deux groupes, en termes de mortalité, critère de jugement principal de l’étude (5,0 % sous oxygénothérapie contre 5,1 % en son absence). Il en a été de même pour les réhospitalisations pour infarctus et les décès cardiovasculaires.   Les recommandations de la Société européenne de cardiologie sur la prise en charge de l’infarctus du myocarde avec decalage du segment ST préconisent déjà un usage restreint de l’oxygénothérapie, limité aux patients dyspnéiques, hypoxiques, avec une insuffisance cardiaque “considérant que l’usage systématique de l’oxygénothérapie chez les patients sans insuffisance cardiaque, ou dyspnée est d’un intérêt incertain”. Les données de l’étude Deto2x-Ami pourraient réduire encore plus la pratique de ce traitement. En effet, même chez des malades à haut risque comme les patients fumeurs, âgés, diabétiques ou présentant déjà des antécédents cardiaques, aucun impact de l’oxygénothérapie sur la mortalité n’a été relevé. Arrivée des anti-Il 1 dans l’infarctus du myocarde Si l’oxygénothérapie pourrait rapidement disparaitre de l’arsenal thérapeutique de l’infarctus du myocarde (voir ci-contre), en revanche d’autres medicaments de nouvelles classes pourraient y entrer, comme des agents à action anti-inflammatoire. “Un concept auquel les cardiologues pensaient depuis longtemps, car près de la moitié des malades avec un infarctus sont indemnes d’hypercholestérolémie”, a rappelé le Dr Paul Ridker (Boston), mais qui n’avait pas encore abouti à des résultats pratiques. L’essai Cantos 2, mené chez 10 061 patients avec des antécédents d’infarctus du myocarde, ayant conservé par la suite des taux élevés de marqueurs d’inflammation (C-Reactive Protein), suggère que des injections trimestrielles de 150 mg de canakinumab pourraient avoir un effet bénéfique dans cette population de malades. L’administration de cet anticorps monoclonal anti-Il1 a, en effet, réduit de 15 % le risque de décès cardiovasculaires, infarctus du myocarde et AVC non fatals en comparaison d’un placebo. Parallèlement, une baisse importante du nombre de cancers, notamment du poumon, a été notée. “Une relation qui devra aussi être explorée”, a estimé le Dr Ridker. Le canakinumab a été jugé globalement sûr. Néanmoins, une infection fatale a été déplorée chez un patient sur 1000. Il faudra donc évaluer plus précisément le risque infectieux associé à l’administration de cet anti-Il1.

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