Rougeole : la mise au point de Buzyn après le décès d’une jeune femme
Après le décès d’une jeune femme de 32 ans survenue le 10 février au CHU de Poitiers, la Ministre de la Santé insiste sur l’importance de la vaccination de rattrapage, alors que l’épidémie pourrait s’étendre en France.
La patiente présentait "un contexte de comorbidités sévères et complexes" a précisé le CHU, et n’était pas été vaccinée contre cette infection. La mère de la jeune femme envisage cependant de porter plainte contre l’établissement, estimant que sa fille n’a bénéficié d’aucune mesure de prévention de la contagion lors de son arrivée à l’hôpital. Depuis le vendredi 19 janvier dernier, le CHU de Poitiers a accueilli 22 personnes contaminées par la rougeole dont 10 enfants et 4 membres du personnel. Et il reconnait que " sur la totalité des personnes prises en charge, cinq d’entre elles ont pu contracter la maladie au contact d’un autre patient au CHU de Poitiers lors de l’apparition des premiers cas ". Mais il ajoute, dans un communiqué que " dès le début de l’épidémie, l’établissement a décidé d’imposer le port d’un masque pour toute personne se présentant aux services d’urgences adultes et pédiatriques. Cette mesure a été étendue aux services dont les patients présentent une fragilité particulière ". En outre 54 membres du personnel ont dû être vaccinés. Doublement des cas en 1 mois L’épidémie qui sévit dans la région Nouvelle Aquitaine connait actuellement une phase de croissance inquiétante. Ainsi, entre le 1er novembre et le 13 février 2017, 269 cas ont été confirmés dans cette région entrainant 66 hospitalisations (plus d'1 cas sur 4). Quatre personnes ont été prises en charge en réanimation et donc 1 personne est décédée. Les départements de la Gironde et de la Vienne sont, depuis novembre 2017 les plus touchés. Ces chiffres ont été multiplié par plus de deux par rapport à la situation au 24 janvier (115 cas, et 32 hospitalisations), faisant craindre une flambée épidémique. Au total, en France, au 13 février, 387 cas de rougeole ayant entraîné 83 hospitalisations, dont 6 en service de réanimation, ont été déclarés en France depuis le 1er novembre 2017. Cette recrudescence succède à un période d’accalmie depuis 2012. Ont ainsi été recensés : 259 cas en 2013, 364 en 2015, et 79 en 2016. "Avec une circulation active du virus dans plusieurs départements, la France n’est donc pas à l’abri d’une nouvelle épidémie d’ampleur importante, comme celles observées dans plusieurs pays frontaliers", souligne Santé Publique France. Des épidémies ont ainsi été recensés ces dernières années en Italie (près de 5000 cas), Allemagne (plus de 900 cas), Belgique (près de 400 cas), ou encore en Roumanie (plus de 6000 cas) ou en Grèce (plus de 600 cas). Cette situation apparait d’autant plus d’autant plus près vingt ans de combat, que l’Organisation mondiale de la Santé a annoncé en septembre 2016 que l’éradication de la rougeole sur le l’ensemble du continent américain était désormais une réalité. Un rattrapage pour atteindre 2 doses vaccinales Dans ce contexte, les autorités sanitaires locales et nationales s’unissent pour rappeler l’importance de la vaccination contre cette maladie particulièrement contagieuse. La ministre de la Santé Agnès Buzyn a rappelé, le 14 février sur France Inter, que " pratiquement tous les cas de rougeole sont survenus soit chez des gens non vaccinés, soit n'ayant reçu qu'une seule dose dans leur vie, alors que deux doses étaient recommandées à l'époque ". Selon l’ARS de la Nouvelle Aquitaine, en effet, 90% des cas de rougeole constatés " n'étaient pas ou mal vaccinés ". La ministre a demandé " à toutes les personnes qui ne sont pas vaccinées (contre la rougeole) ou qui n'ont pas fait vacciner leurs enfants de faire un rattrapage ", ajoutant que, " quand une couverture vaccinale de la population est insuffisante, les personnes les plus vulnérables l'attrapent ". En particulier en Gironde, en 2015, la couverture vaccinale du vaccin contre Rougeole-Oreillons-Rubéole (ROR) était de 80,3 % chez les enfants de 2 ans, bien loin de l’objectif de 95% de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour envisager une éradication de la maladie. Et à l’échelle nationale, les couvertures pour une et deux doses de vaccins ROR étaient respectivement 90,5 et 78,8% en 2015, pour les enfants âgés de deux ans, avec une hétérogénéité géograhique." Grâce à la vaccination, le virus de la rougeole a circulé à très bas bruit pendant des années. Aujourd'hui, à l'heure de cette recrudescence, on se retrouve avec des jeunes adultes dont le système immunitaire n'a jamais été confronté au virus ", explique le Pr Daniel Lévy-Brühl, responsable de l'unité chargée des infections respiratoires et de la vaccination au sein de l'agence sanitaire Santé publique France. " C'est le reflet de l'histoire de la vaccination en France : il y a des gens de 20 à 40 ans qui ont grandi sans être vaccinés et se retrouvent aujourd'hui non-immunisés. Il reste un énorme réservoir de sujets non-immunisés, qui peuvent être demain les prochains cas de rougeole, voire de décès ", dit-il. Un décès sur 3000 cas La prévention apparait d’autant plus importante que cette pathologie est loin d'être bénigne. Agnès Buzyn rappelle ainsi que la rougeole entraine une encéphalite avec risque de séquelles dans 1 cas sur 1 500, et un décès dans un cas sur 3000. Ainsi, selon les chiffre de Santé publique France, du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2016, soit en 9 ans, plus de 24 000 cas de rougeole ont été déclarés en France (dont près de 15 000 cas pour la seule année 2011). Plus de 1 500 cas ont présenté une pneumopathie grave, 34 une complication neurologique (31 encéphalites, 1 myélite, 2 Guillain-Barré) et 10 sont décédés. Mais 9 décès supplémentaires ont pu être identifiés lors de l’analyse des certificats de décès parvenus à l’Inserm CépiDC entre 2008 et 20141, portant à 19 le nombre de décès de rougeole survenus sur la période 2008-2016.
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