Transplantations rénales : des évolutions sociétales et techniques

13/12/2019 Par Corinne Tutin
Urologie

Donneurs à critères élargis, donneurs vivants, chirurgie robot-assistée, marqueurs de qualité des greffons : les études se multiplient pour augmenter l’accessibilité et le taux de succès de la transplantation rénale. Afin de traiter les nombreux patients avec une insuffisance rénale chronique, davantage de transplantations avec des donneurs à critères élargis (un peu plus âgés, avec parfois une HTA, un diabète) sont entreprises. Les résultats sont globalement satisfaisants. Mais, une étude effectuée sur 10279 transplantations réalisées, dont 43 % provenant de ces donneurs, montre que le taux de complications est malgré tout un peu augmenté dans ce cas (x 1,5), principalement les sténoses et fistules urétérales. Ce qui amène le Dr Benoît Mesnard (CHU de Nantes) à se poser la question d’une surveillance rapprochée chez les receveurs. L’analyse de la graisse périrénale (fraction vasculaire, interleukine 6) pourrait permettre d’évaluer la fonction endothéliale du donneur, son profil inflammatoire, et globalement la qualité du transplant, suggère une autre étude entreprise par le Dr Bastien Gondran-Tellier (CHU de Marseille). Les recherches s’intensifient en tout cas pour identifier des marqueurs non invasifs de la qualité des transplants. Limiter les contraintes et les risques opératoires est essentiel dans le cas de donneurs vivants, qui ne représentaient en 2018 que 15 % des donneurs. Deux études menées sur respectivement 79 et 100 donneurs vivants opérés par les équipes des hôpitaux de la Pitié Salpêtrière à Paris et Henri Mondor à Créteil (94) révèlent que la voie coelioscopique robot-assistée...

qui était jusqu’ici rarement utilisée pour la transplantation rénale, est fiable « avec une petite taille de l’incision cutanée, une sécurité de la ligature artérielle, un confort pour le chirurgien ». « Elle permet de combiner l’apport de la robotique pour la dissection du pédicule rénal et les bénéfices de la laparoscopie pour les suites post-opératoires sans altérer la qualité du greffon ». Apport de la coelioscopie chez le patient obèse Cette intervention permet aussi de transplanter des patients obèses, qui ne le pouvaient pas auparavant, « en raison des difficultés techniques du geste par laparotomie, d’un risque de complications post-opératoires accru », précise le Dr Thomas Prudhomme (CHU de Toulouse). Or, rappelle ce praticien, « 30 à 50 % des patients en dialyse sont obèses ». Les données d’une première étude multicentrique prospective internationale comparative révèlent que les résultats fonctionnels (débit de filtration glomérulaire après 1 an de suivi), la durée du geste, et le taux de complications (hémorragies, taux de conversion en chirurgie ouverte) sont similaires pour la transplantation coelioscopique de donneurs vivants chez les patients obèses (32 malades inclus dans cette étude) et les patients non obèses (137 dont 66 en surpoids), rapporte le Dr  Prudhomme. De bons résultats ont aussi été retrouvés dans une étude de 28 patients obèses, ou avec un périmètre abdominal dépassant 105 cm, contre-indiqués à la transplantation par laparotomie et opérés par voie robot-assisté au CHU de Toulouse. Précisons que chez les patients obèses, la transplantation devant être programmée, on ne peut recourir en général qu’à des donneurs vivants.  

En quelques chiffres 
L’activité de transplantation rénale a baissé d’environ 6 % en 2018 (3567 greffes) par rapport à 2017 avec une réduction des taux de prélèvements sur sujets décédés en état de mort encéphalique (- 154 greffes) (ce qui est peut-être dû à une réduction de la mortalité pour AVC), non compensée par un accroissement des prélèvements de donneurs décédés après arrêt circulatoire (catégorie III de Maastricht) (+ 35 greffes). Les transplantations de donneurs vivants, « qui nécessitent un investissement important des équipes » sont également en recul (541 greffes, - 11 %). En 2018, 19625 patients étaient en attente de transplantation rénale mais le taux de croissance s’est ralenti (+ 4 % contre 6 à 9 % les années précédentes) (Rapport annuel de l’Agence de Biomédecine).

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