Harcèlement

Harcèlement : qui sont les harceleurs, qui sont les harcelés ?

Avec 5% d’enfants victimes et jusqu’à 19% aux urgences de pédopsychiatrie, le harcèlement scolaire est un phénomène international aux déterminants et conséquences bien décrits.

26/03/2025 Par Caroline Guignot
Pédiatrie
Harcèlement

Le harcèlement se définit par l’intention de blesser, la répétition des actes et un déséquilibre de pouvoir entre les individus. Mais cette définition présente certaines limites : l’intentionnalité n’est pas toujours évidente, les processus d’empathie sont encore souvent immatures et, surtout, «85 % des cas sont liés à une situation collective, les témoins jouant un rôle dans l’initiation et le maintien du harcèlement», a expliqué la Pre Diane Purper-Ouakil (psychiatre, CHU Montpellier).

Le programme Phare est déployé dans tous les établissements scolaires depuis 2021 : il repose sur un réseau de référents académiques, des élèves ambassadeurs vigilants, et une équipe ressource formée à la méthode de préoccupation partagée qui vise à mobiliser tous les élèves concernés – harceleurs, harcelés, témoins – sans les stigmatiser. Il prévoit des sanctions disciplinaires, une exclusion temporaire, un changement d’établissement pour les harceleurs, voire des démarches judiciaires. Il s’articule avec un site internet et une plateforme téléphonique, le 30 18, auprès desquels il est notamment possible de signaler les situations de harcèlement, afin d’alerter les référents de l’Éducation nationale. 

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Ce type de programme réduit le harcèlement de 20%, le sentiment de victimisation de 15%, et améliore le climat scolaire, avec une diminution globale de l’anxiété et de la dépression.

 

Qui est à risque ?

Si toutes et tous peuvent être concernés, les jeunes ayant une caractéristique perçue comme une différence (comportementale, sociale, physique...) sont les plus exposés. L’anticonformisme, la timidité ou un faible comportement prosocial peuvent aussi jouer.

Les professionnels de santé doivent évaluer la qualité de vie scolaire de l’enfant, son isolement, son risque suicidaire. Ils doivent faire un signalement au procureur en cas de danger. «Il faut évidemment déculpabiliser la victime, soutenir les parents et favoriser le dialogue avec l’établissement», a commenté la Dre Vanessa Milhiet (psychiatre, hôpital de La Pitié-Salpêtrière, Paris) au cours de la session du dernier Congrès de L’Encéphale (Paris, 22-24 janvier), consacrée à ce thème.

Les harceleurs, eux, se répartissent entre différents profils : ceux dits proactifs sont souvent populaires, ont une intelligence sociale élevée mais une faible empathie, et alternent stratégies coercitives et prosociales pour dominer. Ceux qui ont une impulsivité marquée, une faible capacité d’empathie, une perception positive des comportements agressifs ou un désengagement moral sont autant des profils favorisants. Il existe aussi un profil de harceleurs-victimes, qui représentent environ 10% des jeunes impliqués dans le harcèlement : ce sont ceux rencontrant des difficultés d’ajustement social et des troubles internalisés (anxiété et dépression) et externalisés. Attention aux enfants souffrant de TDAH : ils ont une forte impulsivité et une faible régulation émotionnelle, avec un comportement social intrusif qui favorise la stigmatisation, le rejet social et l’agressivité réactive. Ils peuvent être perçus comme des harceleurs, malgré leur non-intentionnalité.

Les conséquences du harcèlement sont lourdes : isolement, décrochage scolaire, idéations suicidaires, troubles mentaux. Le programme d’actions interministériel mis en place en 2023 doit aider à contrer ces phénomènes. Mais le cyberharcèlement est en pleine explosion, touchant actuellement 17% des jeunes en France, dont 66% de filles. Ses conséquences sont parfois plus sévères, du fait du caractère omniprésent du harcèlement qui expose les victimes à un stress permanent. La fin de la modération sur les réseaux sociaux fait craindre le maintien et même la progression de ces comportements délictuels.

Références :

D’après les communications des Prs Diane Purper-Ouakil ( CHU de Montpellier) et Olivier Bonnot (EPS Barthélémy-Durand, Sainte-Geneviève-des-Bois) et de la Dre Vanessa Milhiet (hôpital de La Pitié-Salpêtrière, Paris) au cours de la session «Harcèlement scolaire» lors du Congrès de L’Encéphale (Paris, 22 au 24 janvier).

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