Le plan d'attaque des internes contre le sexisme

18/11/2017 Par Aveline Marques

Le poids des mots, la force des chiffres. Avec son enquête sur le sexisme des études médicales, qui montre que 60% des internes en sont victimes et que 9% d'entre eux subissent du harcèlement sexuel, l'Intersyndicale nationale des internes (Isni) donne un coup de pied dans la fourmilière. Libérer la parole, accompagner les plaintes, briser le plafond de verre… Olivier Lepennetier, président de l'Isni, nous dévoile la stratégie qui sera présentée ce samedi lors de l'université de rentrée du syndicat.

  Egora.fr : Etes-vous surpris par les résultats de votre enquête ? Olivier Lepennetier : Malheureusement, on s'attendait à des chiffres élevés, qui dénoncent une situation dont on se doutait mais dont n'avait pas la quantification exacte. C'est la première étude sur le sexisme des internes, et même la première à l'hôpital. Donc on n'avait pas de référence au niveau national. Il y a eu des études menées en Australie et qui nous ont servi de point de comparaison : on arrive aux mêmes résultats.  

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  Comment proposez-vous de lutter contre un phénomène qui a imprégné à ce point les études de médecine, puisque 30% des victimes de harcèlement sexuel et 39% des victimes de sexisme ne se considèrent pas comme telles ? Ces résultats nous ont permis de mettre en évidence que beaucoup de personnes ne sont pas conscientes de l'ampleur du sexisme. Une des premières mesures serait de pouvoir en parler, de briser les tabous, pour ensuite pouvoir lutter contre. C'est un travail, en trois axes, que l'on va mener avec la Fédération hospitalière de France et la Conférence des présidents d'université. Pour le harcèlement, la volonté c'est de faciliter la dénonciation des actes et d'accompagner le dépôt de plaintes des victimes.   Dans votre étude, on constate en effet que seuls 0.15% des actes de harcèlements donnent lieu à des poursuites judiciaires, pourquoi si peu ? Autant dire rien. On n'a pas la réponse, mais clairement c'est un tabou. Il y a des problèmes de hiérarchie, de risques de représailles, qui freinent la dénonciation. L'une des pistes, serait d'organiser une aide juridique via les services dédiés des établissements.  

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  Et contre le sexisme ? C'est le 2ème axe de travail. Il faut déjà que les gens ouvrent les yeux, qu'ils puissent en parler, mettre des mots sur ces agissements. Peut-être par le biais d'affiches. Il y a des expériences qui sont déjà en cours, notamment au CH de Thuir (66). Le 3ème axe concerne le plafond de verre, c’est-à-dire la limitation d'accès des femmes aux postes à responsabilité. Il y a une volonté de mettre l'accent sur le sexisme dès les études, de sensibiliser à la lutte contre les discriminations. Il faut aussi faciliter, aider les femmes à accéder aux postes hospitalo-universitaires, pour aller vers une parité. Enfin, lutter contre les différences de traitement concernant les femmes en particulier lorsqu'il y a des cas de grossesses, qui entraînent le refus de certains postes.   Dans quelle mesure le sexisme du milieu influence-t-il les choix de carrière ? On pense notamment à la chirurgie, qui concentre le quart des déclarations de sexisme… C'est compliqué de le savoir. On ne peut que constater que les femmes sont majoritaires dans les études : 58% des étudiants qui passent les ECN sont des femmes. Elles sont tout aussi bien classées et ont tout autant de choix au niveau du lieu d'exercice et de la spécialité. Mais pour autant, il y a plus d'hommes que de femmes qui font de la chirurgie, et plus de femmes que d'hommes qui font de la médecine générale. C'est cette espèce de conditionnement qui existe tout au long de la vie… A force d'entendre "non tu ne pourras pas être chirurgienne parce que c'est dur", certaines finissent par y croire.

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