Cancer de l’enfant : l’espoir dans le gliome du tronc cérébral

14/02/2024 Par Marielle Ammouche
Cancérologie
Si la majorité des cancers de l’enfant bénéficient d’un bon pronostic – avec un taux de survie estimé globalement à 85% - , certains restent redoutables. C’est le cas du gliome infiltrant du tronc cérébral chez l’enfant. Mais de nouvelles données sont porteuses d’espoirs. Ainsi, un enfant traité à l’institut Gustave Roussy et ayant bénéficié d’une nouvelle thérapie ciblée est actuellement considéré comme guéri

  Les cancers pédiatriques sont au centre d'une journée mondiale célébrée le 15 février. Parmi eux, le gliome infiltrant du tronc cérébral touche entre 50 et 100 enfants et adolescents chaque année en France. Inopérable, ce cancer est traité habituellement par une radiothérapie, qui permet parfois de freiner la maladie mais dont l'effet est transitoire. Aucun médicament n'a encore démontré son efficacité. L'évolution est généralement très rapide avec une issue généralement fatale dans les 9 à 12 mois suivant la découverte de la tumeur. Mais l’histoire d’un enfant belge, Lucas, 13 ans, vient mettre un peu de lumière dans ce tableau sombre. Il a en effet défié tous les pronostics : diagnostiqué à 6 ans de cette maladie réputée incurable, il est désormais considéré comme guéri, son cerveau ne présentant plus de signe de la tumeur. "Lucas a explosé tous les compteurs de vie", se réjouit auprès de l'AFP son médecin, le Dr Jacques Grill, pilote du programme Tumeurs cérébrales du département de cancérologie pédiatrique du centre anti-cancer Gustave-Roussy, au sud de Paris.    Un essai clinique en cours Le pédiatre se remémore avec émotion avoir annoncé il y a sept ans aux parents de Lucas que leur fils allait mourir. A l'époque, sa famille est venue le faire soigner en France, où le petit garçon est l'un des premiers patients à intégrer un essai clinique pour tester un nouveau médicament, une thérapie ciblée. D'emblée, Lucas répond très bien au traitement. "Au fil des IRM, j'ai vu la tumeur complètement disparaître", raconte le Dr Grill, qui n'ose, malgré ces résultats miraculeux, décider d'arrêter le médicament. Jusqu'à ce qu'il comprenne, il y a un an et demi, que l'enfant avait lui-même cessé de le prendre.  "Un cas comme lui, je n'en connais pas d'autre dans le monde", confie le médecin, dont l'équipe a commencé les recherches sur ce cancer il y a une quinzaine d'années. Reste à comprendre pourquoi Lucas a guéri et comment son cas médical pourrait apporter de l'espoir à des centaines de jeunes à l'avenir. Une dizaine d'autres enfants inclus dans le même essai clinique ont vu leur espérance de vie dépasser les statistiques et sont toujours en vie plusieurs années après le diagnostic - mais leur cancer n'a pas complètement disparu. Une espérance de vie accrue sans doute en raison de "particularités biologiques de leur tumeur", expliquant leur meilleure réponse au traitement que d'autres patients sous la même thérapie, souligne le Dr Grill.   Une mutation rare "La tumeur de Lucas présentait une mutation extrêmement rare et nous pensons que c'est cette mutation qui a rendu ses cellules tumorales beaucoup plus sensibles au médicament", ajoute le pédiatre, également chercheur à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Dans un essai en cours (Biomède), qui compare le médicament reçu par Lucas à un nouveau traitement prometteur, les chercheurs de Gustave-Roussy étudient non seulement les anomalies génétiques des tumeurs de tous les patients mais fabriquent aussi des organoïdes tumoraux pour comprendre leur biologie et leur sensibilité aux médicaments. "Le cas de Lucas ouvre un vrai espoir : on va essayer de reproduire in vitro les altérations que l'on a identifiées dans ses cellules", explique à l'AFP Marie-Anne Debily, enseignante-chercheuse supervisant ces travaux. Concrètement, les équipes médicales veulent découvrir si les altérations de l'ADN que présentait Lucas, une fois "reproduites" chez d'autres patients, se traduisent également par une diminution de leur tumeur. Si c'est le cas, "l'étape d'après sera de trouver le médicament ayant le même effet sur les cellules tumorales que ces modifications cellulaires", indique Marie-Anne Debily. Enthousiastes devant cette nouvelle "piste thérapeutique", les médecins préviennent cependant qu'il faudra des années avant de trouver un éventuel traitement curatif. "Il s'écoule en moyenne 10 ou 15 ans entre la piste et le médicament, c'est un travail de longue haleine", rappelle le Dr Jacques Grill.

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