Obligation vaccinale : l'impact sur la couverture vaccinale pas clairement démontré

18/12/2017 Par Marielle Ammouche
Infectiologie

Une mise au point de l'Inserm confirme l’efficacité et l’innocuité des 11 vaccins qui seront obligatoires à partir de 2018. Mais ce rapport souligne aussi les divergences entre pays européens sur l’obligation vaccinale, ainsi que l’absence d’homogénéité dans les études d’impact de cette mesure.

Une étude montrait récemment que la France est un des pays au monde où la défiance vaccinale est la plus importante. Et force est de constater que l’extension de l’obligation vaccinale, qui prendra effet le 1er janvier 2018, continue de provoquer des débats qui sont souvent attisés par un manque d’information. C’est pourquoi l'Inserm a souhaité apporter un regard scientifique, basé sur l’analyse de la littérature sur ce sujet. Tout d’abord, les auteurs de cette mise au point qui vient d’être publiée, concluent que l’efficacité et l’innocuité des 11 vaccins qui deviendront obligatoires sont prouvées scientifiquement. Ainsi, l’efficacité a été estimée à plus de 90% pour chacun des 11 vaccins obligatoires. "Les effets indésirables, quand ils existent, sont généralement mineurs et de courte durée", ajoute l’Inserm. Il s’agit dans la grande majorité des cas de réaction au site d’injection, ou d’effets généraux de courte durée. Des réactions allergiques graves existent, mais elles sont "extrêmement rares" (< 1 cas sur 450 000 vaccinés). Et concernant les autres effets indésirables rapportés par les opposants à la vaccination, ils sont "scientifiquement infondés", affirment les auteurs. Ces derniers éliminent, en particulier, le risque d’autisme lié aux vaccins, en précisant qu’il "est avéré que l’étude suggérant un lien entre vaccination ROR et autisme était une fraude scientifique". Ils sont aussi totalement rassurants sur les risques de sclérose en plaque ou autres maladies auto-immunes. Et concernant la suspicion de toxicité des adjuvants, ils soulignent que, "au vu des données disponibles à ce jour à l’échelle internationale, avec un recul d’utilisation de 90 ans et des centaines de millions de doses injectées, l’innocuité des sels d’aluminium contenus dans les vaccins ne peut être remise en cause". Pour eux, l’analyse indépendante "n’a pas permis à ce jour de démontrer l’existence d’un lien"  entre myofasciite à macrophages au site d’injection et symptômes chroniques. Les auteurs de l’Inserm affirment aussi les bénéfices des vaccins combinés en soulignant que "les arguments développés par les lobbys anti-vaccins et qui prétendent que les vaccins combinés provoquent un "épuisement du système immunitaire" ne reposent sur aucune base scientifique. La stimulation du système immunitaire induite par un vaccin – fût-il hexavalent – est en effet négligeable par rapport à ses capacités de réponse et par rapport aux stimulations environnementales quotidiennes. L’argument de l’âge invoqué par ces mêmes lobbys n’a aucun appui, puisqu’en effet les nourrissons sont au contact d’antigènes en grand nombre dès leur naissance".   Double bénéfice   La mise au point de l’Inserm a aussi analysé l’apport que l’obligation sur la couverture vaccinale. Les auteurs concluent que cette mesure apportera des bénéfices à la fois individuels et collectifs, par la diminution du risque de contamination pour les personnes non vaccinées. Ils rappellent ainsi qu’actuellement, les taux de couverture vaccinale contre la rougeole ou la méningite C sont insuffisants pour permettre une immunité de groupe. On assiste donc à des résurgences épidémiques de la rougeole de grande ampleur (plus de 23 000 cas déclarés en France entre 2008 et 2012, plus de 30 encéphalites et 10 décès) ; et 800 cas et 100 décès de méningite C depuis 2011, alors qu’aux Pays-Bas cette infection a presque disparu grâce à une couverture vaccinale très élevée.     Etudes partagées sur l’impact de l’obligation   Les auteurs de ce travail ont aussi effectué une recherche sur la situation à l’étranger. Ils affirment que "le choix des décideurs étrangers est partagé entre la simple recommandation et la vaccination obligatoire". Ainsi, 16 pays européens sont dénués d’obligation vaccinale. La Belgique a un vaccin obligatoire, 8 pays en ont au moins 4, la Slovénie en a 9 et l’Italie 10 depuis 2017. La France est le seul pays à en avoir 11. Les auteurs du rapport confirment que les études démontrent que "la vaccination obligatoire réduit considérablement les taux d’infection des maladies associées". Cependant, les études divergent sur la corrélation entre obligation et augmentation du taux de vaccination. Ainsi, une étude des différents types de politiques de vaccination (Briss P. et al., Am J Prev Med., janvier 2000 ; doi : 10.1016/S0749-3797(99)00118-X) suggère que l’obligation de vaccination avant l’entrée à la garderie ou à l’école est efficace pour augmenter les taux de couverture. Alors que le rapport du projet européen Asset (Asset, Compulsory Vaccination and Rates of Coverage Immunisation in Europe, 6 septembre 2016 ; http://www.asset-scienceinsociety.eu/reports/pdf/asset_dataviz_I.pdf), dans le cadre du 7e Programme cadre de recherche et développement, dont l'objectif est de définir une stratégie participative innovante de préparation aux épidémies et pandémies, conclut sur l’impossibilité de confirmer une relation entre l’obligation et les taux de couverture vaccinale (polio, rougeole et coqueluche) des enfants en Europe, suggérant que d’autres facteurs que les politiques vaccinales et l’hésitation de parents pourraient entrer en jeu (gratuité, facilité à accéder à l’acte vaccinal…). Mais une enquête menée en France en 2016 semble objectiver l’inverse, puisque seuls 55 % des parents d’enfants âgés de 1 à 15 ans ont répondu qu’ils feraient certainement vacciner leurs enfants si la vaccination diphtérie-tétanos-polio n’était plus obligatoire (rapport de la concertation citoyenne sur la vaccination, 30 novembre 2016). Enfin, les auteurs de ce rapport soulignent la nécessité d’accompagner l’obligation vaccinale de "la mise en œuvre d’actions prioritaires et du développement de programmes de recherche qui couvrent les différents aspects de la vaccination".

Limiter la durée de remplacement peut-il favoriser l'installation des médecins ?

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